Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

« Essayer de s’inspirer de l’Ajax »

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Par athor
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Loïc Désiré, de dos, travaille main dans la main avec T. Laurey © rachmaninov

Arrivé cet été à Strasbourg, Loïc Désiré est le nouveau coordinateur du recrutement du Racing. Il nous raconte son parcours, entre Vannes et l’Ajax d’Amsterdam, son rôle aujourd’hui et la politique qu’il souhaite mettre en place avec les dirigeants.

Commençons par votre parcours de joueur...

Je suis originaire de Châteauroux, où j'étais jusqu'à 16 ans à la Berrichonne. J'étais également en équipe de France cadets, à 15 ans, ensuite, je suis parti au centre de formation de Brest Armorique. Malheureusement, c'était la mauvaise période, puisqu'il y a eu un dépôt de bilan. Je suis quand même resté cinq ans là bas, où je n'ai pas été professionnel, mais j'ai joué jusqu'en National, avec des Didier Monczuk, Pape Fall, Jean-Pascal Beaufreton, Laurent Bénier, qui a aujourd'hui un rôle de directeur à Epinal. J'ai côtoyé ces gens là, mais je n'ai pas percé. J'avais été sollicité par des clubs mais cela ne s'est pas fait, donc j'ai atterri à Vannes, en National 2 à l'époque, où j'ai fait une carrière de bon niveau amateur, en CFA ou National. C'est le niveau maximum auquel j'ai joué. Puis, tout en jouant à Vannes, j'ai embrayé sur une carrière d'entraîneur. J'ai passé mes diplômes très tôt : dès 18 ans, j'ai passé le premier, puis dès 21 ans, j'ai commencé le Brevet d'Etat, puis j'ai eu le DES quand j'étais entraîneur adjoint en L2.

A Vannes, j'ai tout fait, j'ai eu toutes les fonctions : entraîneur adjoint pendant six ans (trois ans en L2, trois ans en National), j'ai été aussi directeur sportif pendant trois ans, et en parallèle de ces missions, à 28 ans, j'ai eu l'opportunité de travailler avec l'Ajax Amsterdam. A ce moment là, j'ai eu la tête sur les épaules, je savais que je n'allais plus faire carrière en tant que joueur, donc j'ai choisi d'arrêter pour être libéré le week-end. Ca a duré 12 ans.

A Vannes, vous aviez la responsabilité des équipe de jeunes et du centre de formation...

En fait, il n'y avait pas de centre de formation, c'était aussi mon rôle de le mettre en place. Il y avait un projet de construction de centre, avec une politique sportive autour de la Bretagne, mais on n'a pas eu le temps de le mettre en place. Avec la descente en National, tout a été freiné, car avec Stéphane Le Mignan, le coach de l'époque, il a fallu tout bâtir, il n'y avait pas grand chose, pas beaucoup de moyens. La descente a laissé le projet du centre dans les tiroirs.

Après la descente, on fait une année où on finit quatrième. Celle-là, elle nous a fait mal, car il fallait repartir avec encore moins de moyens, d'autant qu'il n'y a jamais eu de gros budget. Il a toujours fallu être malin. Et après est arrivé ce qu'il devait arriver, le dépôt de bilan...

Après ce dépôt de bilan, vous êtes resté en tant que directeur sportif. En quoi a consisté cette mission, sachant que le club est reparti de 0 ?

En fait, je devais signer dans un club de L2, ça ne s'est pas fait, et du coup, le club m'a reproposé ce poste, car il voulait garder les mêmes structures. Avec le président, qui a prononcé le dépôt de bilan et qui est reparti, on a gardé les mêmes structures de formation. On avait finalement une structure de formation plus importante après le dépôt de bilan qu'en L2. La base du projet à Vannes, c'était de repartir avec la formation, donc il a fallu rencontrer les parents, expliquer le projet et puis, avec l'équipe première remonter le plus vite possible en CFA2, ce qu'on a fait. J'ai donc eu un rôle de directeur sportif, directeur général, mais je faisais tout en fait.
Mais à cette époque, je cherchais tout de même à garder le contact avec le monde pro, et j'ai eu l'opportunité de commencer à travailler avec Strasbourg, sans être salarié.

Revenons à votre expérience à l'Ajax, comment se sont passés les contacts avec le club ?

J'étais donc éducateur à Vannes, je m'occupais des U19 Nationaux, tout en jouant en même temps. Il y a eu un tournoi d'avant saison, au mois de juillet, organisé par TV Breizh, la télé bretonne, avec quatre clubs qui étaient en préparation en Bretagne : le Dinamo Bucarest, Marseille, Nantes et Rennes. Les équipes jouaient tous les deux jours, et Piet Keizer, de l'Ajax, était là pour observer le tournoi, car il venait voir un joueur du Dinamo Bucarest. A la fin de son séjour, il dit qu'il cherche un recruteur pour la France, car il estime qu'il y a un vivier. Je fais donc sa connaissance, lui dis que ça m'intéresse et lui présente mon parcours. Ils m'ont alors invité quelques jours à Amsterdam, avec mon épouse. Comme c'est la tradition aux Pays-Bas, avant de découvrir le club, ils veulent nous faire connaître la ville, puis pendant deux jours, c'était les matchs de l'école de foot jusqu'aux pros, à l'Arena. J'ai rencontré Leo Beenhakker, le directeur sportif de l'époque, qui était content de l'entretien et qui m'a proposé une période d'essai de trois mois, ce que j'ai accepté. Et au bout d'un mois, ils m'ont appelé et m'ont dit que j'avais le profil et qu'ils me faisaient un contrat. J'étais travailleur indépendant, tout en étant salarié à Vannes, mais j'avais demandé au club d'avoir une certaine liberté.
En tout, ça a duré 12 ans. En tant que directeur sportif, j'ai connu Leo Beenhakker, qui a fait mon premier contrat avec Piet Keizer, après j'ai eu Danny Blind, Louis Van Gaal... Mais c'est bien Piet Keizer qui m'a ouvert les yeux sur le recrutement, avec une méthodologie, car l'Ajax, ça reste un club précurseur en la matière, que ce soit au niveau des jeunes ou des pros. Ca m'a ouvert beaucoup de portes, sur la Belgique, les pays scandinaves, etc... En terme d'organisation, c'est ce que j'aimerai mettre en place au Racing, car l'Ajax, c'est une référence.

Vous aviez plutôt une expérience d'entraîneur et de joueur, comment on devient recruteur ?

Ca reste une vocation, les deux apportent quelque chose à l'autre. Pendant toutes ces années, j'ai eu la chance de faire les deux, quand j'étais entraîneur adjoint, avec une équipe sur le terrain, automatiquement, on décèle des choses plus vite. Le métier d'entraîneur a apporté au métier de recruteur, et vice versa. A un moment, il a fallu faire un choix, et j'ai embrayé avec la carrière dans le recrutement.

Lors de vos deux dernières saisons avec Vannes, vous avez donc collaboré en parallèle avec le Racing. Comment vous fonctionniez, alors que le club était encore amateur ?

Je m'occupais de la partie ouest de la France, c'est vrai que cela fait beaucoup de clubs : Lorient, Guingamp, Rennes, Nantes, Brest, Laval, Carquefou, Luçon... J'ai commencé comme ça pendant un an, puis le président m'a demandé de prendre un peu plus de responsabilités au niveau du recrutement, tout en restant à Vannes, mais j'avais une promesse d'embauche en cas de montée en L2.

Vous êtes arrivé cet été à plein temps à Strasbourg, au poste de coordinateur du recrutement, en quoi cela consiste exactement ?

Coordinateur du recrutement des pros, c'est mettre en place une cellule de recrutement, une méthode, un suivi des des championnats, que ce soit en France ou dans certains pays étrangers, et ramener des profils recherchés par le coach.

Comment fonctionne cette cellule que vous mettez en place ?

Quand il y a un besoin, on doit être prêt à proposer des joueurs au coach. On a à peu près trois noms par poste, avec un choix numéro 1, un choix numéro 2, un choix numéro 3, puis l'entraîneur regarde et choisit. Mais il y a un ordre d'établi, en fonction des profils, et c'est la sensibilité du coach qui va faire qu'il en préfère un par rapport à l'autre. Quoi qu'il arrive, c'est lui qui a le dernier mot.

Au quotidien, il y a deux personnes qui travaillent avec moi, il va y en avoir une troisième prochainement (NDLR: Bruno Paterno a été recruté depuis cet entretien). On sera donc quatre personnes sur les terrains tous les week-ends. Moi, en tant que coordinateur, j'aurai tout le temps l'ouest de la France, Le Havre, Paris, jusqu'à Toulouse, puisque j'ai toujours mon réseau là bas, avec la proximité avec la Bretagne. Ca permet de voir tous les niveaux, de la L1 jusqu'en CFA2, de voir beaucoup d'équipes. Après, il y en un basé en Auvergne, un autre en Alsace bien sûr, et bientôt une nouvelle personne. Après, c'est à moi d'apporter des idées et de développer la cellule, d'avoir des idées un peu nouvelles.

Les dernières années, Sébastien Roi et Christophe Rempp participaient également de près ou de loin au recrutement, qu'en est-il aujourd'hui ?

Sébastien ne s'en occupe plus. Quant à Christophe, il était avec nous mais là, il a souhaité prendre du recul.

Vous parliez de votre réseau en France, qu'en est-il du suivi des championnats étrangers ?

C'est à moi de le mettre en place justement, ça fait partie de mes fonctions. C'est une question de réseau. Par rapport à ce que j'ai vécu à l'Ajax, je connais du monde aux Pays-Bas, en Belgique, dans les pays scandinaves, on ne va pas aller très loin pour le moment avec un club de L2. On va commencer par regarder dans les pays frontaliers, mais il faut d'abord bien maîtriser tout ce qui se fait en France, sur les jeunes joueurs, sur la L2, la L1. Et après développer le réseau, me déplacer par rapport à ce que j'entends ou envoyer quelqu'un si besoin.

Sur le recrutement de cet été, le Racing s'est concentré uniquement sur des joueurs français, c'est justement une volonté de rester "en terrain connu" ?

Quand on monte, on essaye de limiter l'erreur, d'autant que dans le recrutement, on n'a pas toujours 100% de réussite. On avait déjà bien travaillé sur ceux de la saison précédente, donc oui, c'est une vraie volonté de n'avoir travaillé que sur le marché français.

De manière générale, les cellules de recrutement des clubs français sont assez peu développées, par rapport à d'autres championnats (Pays-Bas, Allemagne). Certains clubs, comme Saint-Etienne, n'en ont d'ailleurs plus du tout, et ne fonctionnent qu'avec certains agents. Qu'en pensez-vous ?

Je m'inspire plus de ce que j'ai connu à l'Ajax, de ce qui se fait en Allemagne, avec une cellule très importante, avec un travail vidéo important, maintenant qu'il y a des logiciels (comme Wyscout). Moi, je regarde des matchs à longueur de journée. Donc non, pour moi, ne fonctionner qu'avec un agent, ce n'est pas possible, ce n'est pas notre volonté, ce n'est pas ma façon de voir les choses. Après, je n'ai pas la science infuse, mais je vais m'inspirer de l'Ajax, où il y a quelqu'un qui fait tous les pays scandinaves, quelqu'un en Belgique, quelqu'un en France, quelqu'un dans les pays de l'est, quelqu'un en Amérique du sud... Alors nous, on ne va pas aller aussi loin pour l'instant, car il faut rester à notre niveau, mais je veux m'inspirer de ces grands clubs, comme le fait le Bayern Munich, Dortmund, qui est maintenant bien présent sur le marché français, ou les clubs de Premier League, qui ont tous un recruteur à plein temps sur le territoire français, ce n'est pas pour rien. Des fois, on se déplace pour voir un joueur, mais c'est aussi pour entretenir le réseau, entendre des choses.
On veut, avec nos moyens, être un peu précurseur dans le développement de notre cellule.

Entretien réalisé le 25 juillet 2016, publié début septembre à la demande de l'intéressé. Un grand merci à Loïc Désiré pour sa disponibilité.

athor

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