Khalid, t’en va pas !

Khalid,

Tu ne connais pas, je fais partie des nombreux anonymes que tu as côtoyé cette saison, que cela soit au bord du terrain d’entraînement, dans les petits villages alsaciens lors des matchs amicaux ou de coupe de France, ou dans les tribunes de Ligue 2.

Nous ne te connaissions pas vraiment avant de te voir à l’œuvre. A ton arrivée, tu avais l’étiquette double du joueur professionnel venant de Ligue 1 et en même temps, tu fleurais bon l’amateurisme que nous venions de quitter, avec tes passages à Uzès et à Luzenac notamment.

Dès tes premières rencontres, nous avons compris que nous avions recruté un joueur hors du commun pour la Ligue 2, dans la plénitude de l’âge et sans la froideur habituelle des buteurs chirurgicaux. Il t’a fallu trois matchs pour réaliser un triplé à Tours et convaincre les suiveurs strasbourgeois.

Mieux vaut tard que jamais

Marocain né à Bagnols-sur-Cèze, dans la vallée de l’Atlas… non, du Rhône, tu as mis du temps à te faire connaître au plus grand nombre et même à tes compatriotes. C’est à 28 ans déjà que tu obtiens ta première sélection avec le Maroc. Plusieurs fois tu touches de près le monde professionnel, à Istres ou à Luzenac avec les conséquences que l’on sait. A Uzès aussi, le club finit par disparaître, comme les deux autres, comme le Racing aussi. En fait tu es un joueur de club… qui dépose le bilan.

Puis vient la rencontre avec Thierry Laurey, et vous devenez le duo qui monte, qui monte… à chaque fois de Ligue 2 en Ligue 1. Après le pittoresque Gazelec, OVNI en Ligue 1 la saison passée, tu suis ton mentor à Strasbourg. Ce ne sont pas les mêmes moyens, mais le même résultat. Même s’il y a également de la ferveur à Ajaccio, ce n’est pas le même public. Celui qui t’a fait battre le cœur à 200 et te donne des frissons en fêtant tes buts.

Le public vaut tout l’or du monde

Tu sais, on comprendra tout à fait que tu veuilles assurer tes arrières financièrement, en partant dans un pays du Golfe ou en Turquie. Tu auras du cash, tu pourras réinvestir des revenus dans des affaires qui t’apporteront de la prospérité pour ta famille ou pour ta retraite. Inversement, tu connais les risques que les salaires ne soient pas payés au bout de quelques mois. Tes potes l’ont sûrement déjà connu un jour. Tu nous dis toujours que tu ne souhaites signer que des contrats d’un an, est-ce une volonté pour te remettre toujours en question ou pour pouvoir mieux valoriser tes talents ?

La France, c’est pas forcément une grande nation de supporters de football. Beaucoup préfèrent les tranquillisants pour pouvoir supporter le quotidien. Il y en a aussi beaucoup qui mettent toutes leurs économies pour assister aux matchs du Racing et te supporter contre vents et marées. Tu l’as vu cette saison encore plus qu’avant, le mur bleu sait recevoir les siens et faire peur aux adversaires.

Un homme, un club

J’ai l’impression que tu as connu les mêmes expériences que le Racing. Cette remontée de CFA2 a permis de relativiser beaucoup de choses. Tu as tout connu en partant de la DH. Tu as progressé lentement jusqu’à arriver à ta plénitude cette saison. Le Racing aussi a dû être patient pour monter les marches une à une et se constituer une philosophie de vie qui l’empêche de retomber dans ses travers. Toi en tant qu’homme et on l’espère pour le club, tu as les fondations pour ne pas vaciller face aux épreuves de la vie et pour ne pas perdre tes valeurs.

Dis-toi que tu vis aujourd’hui l’expérience qui correspond le mieux à ton parcours. C’est même peut-être ton destin que d’avoir ramené le Racing en Ligue 1, pas par opportunisme ou rêve de gloire mais juste parce que c’est sa route, son évidence. Peut-être voudras-tu encore un peu prolonger cette rencontre « entre un homme et un peuple » ?

Dans tous les cas : MERCI

Peu importe le choix que tu feras, et tu auras de bonnes raisons de le faire, le public strasbourgeois t’adresse chaleureusement un énorme MERCI pour cette saison.