Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Disparition de Francis Piasecki

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Après Dominique Dropsy et Rémy Vogel, un troisième champion de France 1979 nous a quittés. Francis Piasecki était le numéro 10 de cette inoubliable équipe, un organisateur sachant aisément se muer en buteur et avant tout un homme de caractère.

Durant neuf saisons, de 1977 à 1986, Francis Piasecki porta haut l’étendard du Racing Club de Strasbourg. Une période débutée en fanfare, avec la constitution astucieuse par Gilbert Gress d’une équipe mêlant individualités expérimentés et joueurs prometteurs du cru. A cette ossature alsacienne maintes fois fantasmée se sont greffés de véritables cadres du football français des années 1970 : Novi, Vergnes, Jouve.

Piasecki n’était toutefois pas à cet instant un joueur « achevé ». Natif de la vallée de la Fensch, c’est naturellement qu’il débute au Football Club de Metz. Après un court passage à Valenciennes, il croit son heure arrivée au FCM mais fait les frais de la fameuse grève des joueurs de la fin 1972, mouvement national dont il fut perçu comme l’un des meneurs en Moselle. Envoyé à Sochaux, où il ne s’épanouira pas, il rejoint la capitale où Daniel Hechter tente de bâtir une équipe capable de remplir le flambant neuf Parc des Princes. Aux côtés de Dahleb et M’Pelé, Francis Piasecki endosse enfin le rôle de meneur de jeu dont il était privé à Sochaux. L’aventure dure deux saisons, jusqu’au moment où Gilbert Gress profite d’une situation contractuelle peu limpide pour lui mettre le grappin dessus.

Arrivé gratuitement au Racing à l’été 1977, alors promu, il n’en repartira que neuf ans plus tard, dans les remous provoqués par l’arrivée à la présidence d’un certain Daniel Hechter. Entretemps, Piasecki guida le RCS en coupe d’Europe, s’offrit trois capes en Equipe de France en l’absence de Michel Platini, reprit le brassard de capitaine au gré des départs des uns et des autres.

Les entraîneurs passent, Piasecki reste le premier nom coché sur la feuille de match. Sundermann en fait un libero, Huck le rappelle en cours de saison alors qu’il s’était retiré des terrains. A 35 ans, il prend les rênes d’une équipe quasiment condamnée à la relégation. En dépit d’une dynamique retrouvée, la D2 est au bout, puis arrive l’enlisement d’août 1986 et l’inéluctable renvoi.

Brutalement mis à l’écart alors qu’il était encore considéré quelques mois auparavant comme l’ultime garantie sportive d’un Racing dépérissant, Piasecki coupa totalement avec le monde du football professionnel. Il se reconvertit dans l’hôtellerie et s’occupait dernièrement d’un établissement niché de l’autre côté du col du Hantz, à Belval.

Nous vous proposons la lecture ou la relecture du portrait touchant et détaillé écrit par @filipe il y a une dizaine d’années. Francis Piasecki figurait au rang de légende du Racing Club de Strasbourg.
Toute l'équipe du site racingstub.com adresse à sa famille et à ses proches ses plus sincères condoléances.




« Sur les pelouses du championnat de France, le talent de Francis Piasecki faisait l'unanimité ; mais l'attitude atypique de ce Mosellan d'origine polonaise lui assura tout aussi sûrement la réputation d'un caractère bien trempé. Et ce n'est pas ce reporter d'une station de radio qui dira le contraire, lui qui un soir l'aborda avec un peu trop d'empressement à la sortie des vestiaires de la Meinau... « Le type de la radio, je ne le connaissais pas. Je lui ai demandé de se présenter. Sous prétexte qu'ils ont un micro dans les doigts, ils se croient tout permis. Avec moi, ça ne marche pas. J'en ai rien à faire. Maintenant, tout le monde demande poliment la permission de m'interviewer. »

Et à son arrivée au Racing en 1977, la réputation de Piasecki n'est déjà plus à faire. Tout juste promu en D1, le RCS cherche alors à recruter quelques joueurs expérimentés capables d'encadrer sa jeune équipe. Le Parisien Jacky Novi, avec ses 453 matchs dans l'élite et ses 20 sélections en Equipe de France, offre le profil idéal. Il signe à l'intersaison au club et y retrouve Gilbert Gress, son ami et ancien coéquipier à l'OM au début de la décennie.
Rapidement, Novi est rejoint en Alsace par Francis Piasecki que les dirigeants parisiens ne sont pas mécontents de laisser filer, lui et son caractère irascible, malgré sa place de titulaire incontesté au sein de l'équipe de la capitale. Quittant la vie parisienne, il retrouve dans l'Est les espaces nécessaires pour assouvir sa grande passion de la chasse. Certains iront même jusqu'à dire que Piasecki n'aurait jamais signé à Strasbourg sans cette perspective.
Le voilà en tout cas en charge d'une mission délicate, celle de remplacer Ivica Osim au poste de meneur du jeu strasbourgeois, joueur admiré par le public et loué pour sa disponibilité auprès de tous. Il va sans dire que Piasecki ne présente a priori pas exactement le même profil. « Moi, on ne me tape pas sur l'épaule du jour au lendemain » disait-il en assumant son attitude ombrageuse. « Je me méfie de tous ces amis de passage. »

Bien qu'âgé d'à peine 26 ans quand il signe son contrat strasbourgeois, Piasecki dispose déjà d'un vécu appréciable en première division, sept ans après ses débuts sous le maillot du FC Metz.
Alors en concurrence avec Patrice Vicq (lui aussi passé par Strasbourg), il perd sa place de titulaire lorsque ses obligations militaires l'éloignent du maillot grenat. Mécontent de ce qu'il considère être une injustice infligée par l'entraîneur messin, Piasecki demande au président Molinari l'autorisation de quitter le club. C'est ainsi que débute sa légende de personnage caractériel et incontrôlable, qui le suit à Sochaux, Valenciennes, Paris et donc Strasbourg.
Il faut dire qu'il ne fait rien pour la démentir. Dans les coulisses mais aussi sur le terrain où on ne compte plus ses coups de gueule contre les adversaires, les arbitres mais aussi ses propres coéquipiers. « Je sais, je ne peux pas admettre chez les autres les fautes que je commets parfois moi-même. Mais je suis comme ça. Il faut que je gueule quand ça ne va pas. »
Cependant, en s'imposant rapidement comme le patron du jeu strasbourgeois, il finit par faire admettre ses excès, y compris ceux qui pouvaient coûter cher. Comme celui qui offrit un penalty aux Hibs d'Edimbourg un soir de 16ème de finale de la Coupe UEFA : venu au secours de Dominique Dropsy bousculé par Ally Mac Leod, Piasecki s'était précipité sur ce dernier qui en profita pour simuler une agression. Le capitaine Jacky Duguépéroux pouvait sermonner son coéquipier bien qu'à l'arrivée, malgré ce penalty transformé, le Racing parviendra à se qualifier (2-1 sur l'ensemble des deux rencontres).

Oui, ses emportements lui furent pardonnés car au cours de ses 338 matchs disputés sous le maillot du Racing, on a admiré sa technique exceptionnelle, ses passes - courtes ou longues - millimétrées, sa frappe puissante et précise mais aussi son élégance et sa combativité : pendant huit ans, Francis Piasecki sera l'incontesté meneur de jeu du Racing, son véritable patron.
Et c'est dans le système mis en place par Gilbert Gress qu'il pourra exprimer au mieux son talent. Pièce incontournable du dispositif strasbourgeois, Piasecki réalise probablement la meilleure saison de sa carrière en 1978-1979, en disputant les 38 matchs de championnat dans leur intégralité (pour 14 buts), exception faite de la seconde mi-temps à Saint-Etienne, ainsi que les six matchs de Coupe d'Europe du club (seuls Dropsy et Specht feront mieux).
C'est également au cours de cette saison où le RCS conquiert le titre national qu'il connaîtra ses trois sélections en équipe nationale : face au Luxembourg en octobre et en février ainsi que l'Espagne en novembre, en compagnie de Dropsy, Specht, Jouve et Gemmrich.

Une régularité non démentie jusqu'à la fin de sa carrière et d'autant plus remarquable qu'il n'hésitait pas à transgresser les règles strictes édictées par l'entraîneur concernant la diététique et l'hygiène de vie.
Amateur de bonnes tables, de bières et de cigarettes, le comportement du numéro 10 du Racing ne pouvait qu'exaspérer Gilbert Gress. Et Francis Piasecki de son côté n'aurait sans doute jamais accepté d'un autre technicien les provocations répétées d'un entraîneur encore plus exigeant et grondeur que lui. Mais tandis que Gilbert Gress était bien obligé d'admettre le rôle incontournable de son meneur de jeu, Piasecki quant à lui ne pouvait que reconnaître les capacités de celui qui lui permit d'exploiter enfin tout son talent et qui constitua selon lui « le meilleur entraîneur croisé au cours de (s)a carrière. »

Mais après le licenciement fracassant de Gress en septembre 1980, Strasbourg s'enfonce peu à peu dans l'ennui et le ventre mou du classement. Les champions de France s'en vont l'un après l'autre et à l'entame de la saison 1984/1985, Francis Piasecki est le dernier, avec René Deutschmann, à demeurer fidèle à un club en pleine déliquescence. Une fidélité qui lui coûte d'ailleurs définitivement sa place en équipe nationale, à une époque où la concurrence aux postes offensifs du milieu de terrain était impressionnante : Alain Giresse, Jean-François Larios, Bernard Genghini et Michel Platini bien sûr ; ce Platini auquel ne s'était pas intéressé le Racing au moment de son départ de Nancy, d'après Gilbert Gress, parce qu'il comptait justement dans ses rangs Francis Piasecki.

A l'entame de la saison suivante, en 1985, Piasecki annonce la fin de sa carrière. Il prend alors place dans le staff technique du club aux côtés de l'entraîneur Jean-Noël Huck, qui vient de remplacer Jürgen Sundermann. Mais après un début de championnat catastrophique, Piasecki est rappelé sur le terrain pour participer à quatre rencontres, avant de retrouver le banc, cette fois-ci comme entraîneur du club après le limogeage de Huck par Jean Willaume, qui en tant que président par intérim vient de succéder à André Bord.
Nous sommes en décembre 1985, Strasbourg occupe la lanterne rouge après une nouvelle déroute (4-1 au Havre) et compte cinq points de retard sur le 17ème au classement général. « Ne joueront que ceux qui sont convaincus que nous pouvons rétablir la situation » annonce Piasecki ; au même moment, les joueurs profitent de leur repas de Noël en commun, au cours duquel ils ont convié Jean-Noël Huck, leur déjà ex-entraîneur...

Malgré la confusion, le Racing réalise une seconde moitié de saison tout à fait correcte (16 points en 14 matchs) mais insuffisante pour échapper à la relégation. Strasbourg échoue à deux petits points du sauvetage ce qui permet à Piasecki de conserver la confiance des dirigeants pour mener à bien l'objectif de la saison suivante : la remontée immédiate en D1. Malheureusement, le début de saison est une nouvelle fois catastrophique : à la mi-septembre, le RCS est 15ème du classement de D2 sur 18 clubs.
Le nouveau président du Racing change donc tout : Daniel Hechter, remplaçant Jean Wuillaume qui remplaçait André Bord, remplace Piasecki qui avait remplacé Jean-Noël Huck par Robert Herbin, qui sera remplacé par Henryk Kasperczak à l'intersaison 1986.
A cette date, Francis Piasecki a déjà tiré un trait définitif sur sa place dans le petit monde du football. Un milieu rejoint 16 ans plus tôt, après un accident au cours de sa formation professionnelle qui lui fit perdre l'auriculaire gauche (sectionné par une scie électrique) et qui l'incita alors à se consacrer plus sérieusement au ballon rond.

Mais tout au long de sa carrière, une fois les portes du stade franchies, il aimait se détacher totalement des choses du football pour se consacrer à son autre centre d'intérêt : la chasse. Un précepte qu'il appliqua dès lors définitivement. « Je passe ma vie à la chasse. Loin du bruit et des gens. J'oublie tout. J'aime par-dessus tout le silence, la solitude. » Seulement les supporters du Racing ne l'ont pas oublié et le citent régulièrement parmi les meilleurs joueurs ayant porté le maillot bleu. Il semblerait cependant que Francis Piasecki n'apprécie guère la nostalgie. Et encore moins qu'on lui demande de parler du passé.
Il nous pardonnera de l'avoir fait pour lui. »

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