Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Il y a 30 ans : le drame Sattler

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Par kitl
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Le décès accidentel du jeune stoppeur plongea le Racing et toute la région dans un abîme de tristesse.

17 décembre 1988. Le Racing Club de Strasbourg vient de confirmer son redressement en gagnant à Lens, irrémédiablement décroché au classement. Début février, il sera temps d’entamer une seconde partie de saison bien plus courte que la première, avec seulement 14 journées à disputer. Après ce succès à Bollaert, c’est le moment pour les joueurs de regagner leurs pénates.

A l’inverse de ses coéquipiers, Vincent Sattler ne prend pas la route de l’Alsace, mais celle de Paris. Artisan de la bonne passe actuelle, ce défenseur au gabarit imposant (1m87 pour 85 kg) et au jeu de tête remarqué vient en effet d’intégrer le bataillon de Joinville, dans le cadre de son service national. Il s’agit d’une section, chapeautée par un certain Roger Lemerre pour sa partie football, au sein de laquelle sont affectés les joueurs les plus prometteurs. Camarade de régiment, le Lensois Eric Sikora regagne la région parisienne en sa compagnie après la rencontre.

Après quelques jours au bois de Vincennes, Vincent Sattler bénéficie de sa première permission, accordée à l’occasion des fêtes de fin d’année, qu’il entend passer chez les siens, à Dahlenheim. L’occasion pour le jeune homme de souffler un peu, après six derniers mois intenses : il achève la saison 1987-88 avec ses copains de la réserve par une demi-finale de Gambardella et une accession en D3. Ces échéances l’ont fait quelque peu sortir des treize de Kasperczak, mais son écot fut remarqué au printemps, lorsqu’il faisait la paire avec Juan Ernesto Simon, le capitaine Specht étant alors positionné en libero du milieu de terrain.

Repéré à 17 ans par Robert Herbin, qui l’emmena « pour voir » dans le groupe un soir à Amiens, Sattler est couvé par Albert Gemmrich, revenu au club pour s’occuper de la formation à l’initiative de Jean Willaume à l’été 1986. Aux côtés de J.Cobos ou Rolling, il incarne avec fougue cette nouvelle génération de joueurs régionaux, destiné à être peu à peu incorporés à l’équipe-fanion.

D’une saison à l’autre, Sattler n’a pas le temps de se reposer, mais après tout il n’a pas besoin de répit, à son âge. Il est appelé à participer à la préparation estivale de l’équipe première, dans un rôle de troisième défenseur central, derrière les expérimentés Léonard Specht et Francis Gillot. Les blessures cumulées de ces deux joueurs, le déclin du champion de France 1979 et les prestations laborieuses de l’ancien Lensois feront en un rien de temps de Vincent Sattler la poutre de la défense strasbourgeoise.

A son retour en Alsace, le 21 décembre, Sattler passe la soirée en compagnie de José Cobos et Franck Rolling. En voulant regagner son petit village viticole, vers 4h30 du matin, sur la D30 entre Furdenheim et Ergersheim, sa Renault percute violemment un camion long-porteur chargé de rondins de bois, qui descendait des Vosges. L’image insoutenable de la R18 déchiquetée sera heureusement repoussée en pages régionales des Dernières Nouvelles d’Alsace. Elle ne laisse aucune place au doute.

Il reviendra aux journalistes sportifs de répandre l’horrible message aux joueurs et dirigeants du Racing, en vacances et éparpillés aux quatre coins du pays. Le drame suscite une intense émotion au sein du football alsacien, qui pensait tenir un stoppeur de niveau international, digne héritier de Specht et Vogel.
Sur ce qu’il avait montré en quelques mois, "Satti" aurait certainement eu l’étoffe d’un porte-étendard pour le football régional. Pour une génération de supporters, il incarne le souvenir des maillots bleus ciel dessinés par Daniel Hechter. Au sein d’un club souvent taxé de parisianisme à cette époque, il personnifie un certain ancrage local, aux côtés des glorieux anciens Gemmrich et Specht, destinés à devenir les cadres techniques de demain.

Sa prestance et son aisance dans les airs – quatre buts de la tête – en ont fait l’un des éléments les plus réguliers de cette saison mal emmanchée, plombée par un recrutement estival erratique. A son corps défendant, l’émergence attendue de Vincent Sattler pourrait servir d’explication au sacrifice de Juan Ernesto Simon, écarté sans ménagement pour faire place au numéro 10 pauliste Pita. Avec Specht, impérial lors de la saison de D2, Gillot, lequel avait tout du bon coup, et Sattler en réserve, la présence du libero argentin devenait moins indispensable.

On mesure aujourd’hui ce que ce malencontreux transfert représente pour l’ère Hechter. La disparition de Sattler, perte humaine mais aussi sportive, fut une terrible épreuve. Un autre tournant, politique celui-ci, fragilisera une direction dépendante des subventions : l’alternance municipale de mars 1989 portant Catherine Trautmann à l’Hôtel de Ville.

Décapité, le Racing perpétuera le souvenir du défunt en arborant un brassard noir durant toute la seconde partie de saison. Les joueurs décideront qu’aucun d’entre eux ne revêtira le numéro 4 dévolu au stoppeur.
Vincent Sattler repose au cimetière de Dahlenheim, son village, qui a baptisé son stade en son honneur. Le Racing y a organisé durant quelques années un match amical chaque été. Sur la route de Sochaux, lors de la dernière journée du championnat 1988-89, l’équipe avait tenu à faire un crochet par Dahlenheim.

Ce poignant article signé @filipe en 2007 rappelle le lourd tribut payé par le Racing en matière d’accidents de la route. Il convient d’y ajouter le grand Paco Mateo, disparu quelques semaines après le titre de champion de France 1979, alors qu’il avait encore tant de footballeurs en herbe à enchanter.

kitl

Commentaires (9)

Flux RSS 9 messages · Premier message par athor · Dernier message par GEMMRICH PIERRE

  • Très bel article, très émouvant (tout comme celui de @filipe).
  • Très bel article , émouvant et triste à la fois
  • Je ne savais pas que contre le Matra de Ginola ,en tribune ouest, c’était la dernière fois que je le voyais.
  • article qui me fait malheureusement penser à Frédéric Johansen un autre espoir du football alsacien qui est parti en 92 dans les mêmes circonstances
  • Bel article. Et pareil que bouba, ça fait effectivement penser à d'autres décès analogues (Johansen, Borrelli ou Schuth plus récemment...).
  • Outre le fait qu'il 'était un super joueur, extrêmement prometteur, il était aussi un chouette type, accessible et qui gardait les pieds sur terre. J'ai eu l'occasion de le connaitre un peu, et son décès a été une très triste nouvelle, pour ses proches, sa famille, ainsi que la famille du Racing. Une larme coule encore au coin de l'oeil en se remémorant ce si tragique accident.
  • Tres bel article. Merci.
    C'était vraiment cruel, ce destin brisé.
    Je m'en souviens comme si c'était hier.
  • Super article je suis un petit cousin lazarus meder par ma mère qui est de dahlenheim marie Louise une anecdote je cherchais le lait dans la ferme a ses parents on jouait le soir dans sa cour ,un jour je suis allé voir un dimanche matin un match de dahlenheim 2 a Altdorf et je vois Vincent et on se salut il rentrait de monaco ou le rcs avait perdu 4 a 2 il était la le matin et faisait le juge de touche pour le fcD on a pris un orangina et on pas revu et en décembre il est parti c t une personne sympa av tous et humble réservé et genereux il avait 2 a 3 autographe aux jeunes a Altdorf quelle perte dany linkenheld
  • BONJOUR,
    Oui,Vincent était un joueur extrêmement prometteur,un garçon du pays,athlétique,doté d'une technique exceptionnelle et un jeu de tête extraordinaire,je garde de ce grand joueur au grand sourire incomparable un souvenir inoubliable.J'étais,à ce moment là,entraineur des juniors du Raçing.Pierre GEMMRICH

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  • pliughe Bonne nuit
  • takl bonne nuit
  • takl 2024 devrait accoucher d'un 2025 appaisé et empathique. Tout va bien se passer, le Racing sera en L1, paix amour liberté et fleurs.
  • takl futur antérieur : [lien]
  • takl mais bon on a pas le droit de les exterminer. Y'en a qui ont essayé, ils ont eu des problèmes.
  • takl le monde serait mieux sans "les gens"
  • takl les gens tu leur donne une pelle ils creusent avec le manche
  • pliughe Pff si les gens creusé un peu plus ça nous éviterait de polluer
  • takl BO de la saison : [lien]
  • takl il manque plein de choses dans la dernière phrase, dont des mots, la honte.
  • takl allez dédicace à tous ceux qui ont eu la "cahnce" de mourir avant vu la Racing BlueCo [lien]
  • pliughe Mais oui
  • takl Excellent les Young Gods
  • pliughe L'octogone
  • pliughe [lien]
  • pliughe Et pour le fun, genre yen a dans locomoteur et puis l'entraînement
  • takl allez un morceau quye j'adore : [lien]
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