Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Dans le rétro : juillet 1989

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Souvenir/anecdote
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Par kitl
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José Cobos, entre le marteau et l'enclume

Ayant cessé d’espérer le chimérique repêchage en première division entrevu par son président – mais Daniel Hechter y croyait-il lui-même ? – le Racing repart pour une nouvelle saison dans la fange, avec un effectif royal. En coulisses, la nouvelle municipalité entend resserrer son contrôle sur le club.

A la reprise de l’entraînement fin juin, le parking du stade de la Meinau a de faux airs de hall de gare. Certains vident leur casier, d’autres endossent pour la première fois de vieux maillots d’entraînement siglés Mammouth, mais c’est globalement le sentiment d’un vaste surplace qui prédomine. L’incertitude quant au sort sportif du RCS, envoyé en barrages, puis les rumeurs de repêchage ont engendré une dizaine de jours de stand-by, au cours desquels il a fallu s’assurer que les joueurs approchés étaient enclins à rejoindre le club en deuxième division.
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Les dirigeants ont en effet programmé une vaste lessive, afin de renouveler un effectif 1988-89 au rendement décevant, surtout dans l’implication et les ressorts psychologiques. Pas de mauvais footballeurs, mais des mollassons. Des recrues de l’été précédent, on retrouve Gillot, Plancque, Bade et l’emblématique Pita placés en quarantaine, devenus indésirables et priés de laisser la place à des éléments de tempérament et prometteurs. Même l’icône Peter Reichert est poussée vers la sortie – son agent Jeannot Werth lui dégotera une porte de sortie à Toulouse où Passi et Marcico ne manqueront pas de l’alimenter.

Néanmoins le made in Germany continue d’exercer son pouvoir de fascination à Strasbourg, puisque deux pointures n’ont pas hésité à quitter la Bundesliga pour la D2 française : Thomas Allofs n’est autre que le Torschützenkönig en titre et vient marcher sur les traces de son frangin Klaus, encore Marseillais au début de l’été ; l’aboyeur Wolfgang Rolff a pour sa part joué les porteurs d’eau pour le grand HSV, Leverkusen et le onze de RFA à 37 reprises.
Les deux Allemands sont attendus comme les incontestables patrons d’un groupe renforcé par les jeunes Sudistes Dall’Oglio, Leclerc et Sansone, ou encore l’avant-centre auxerrois Monczuk.

Comment un club relégué pour la deuxième fois en trois ans peut-il s’offrir ce recrutement cinq étoiles ? Pour l’équipe Hechter, cela va de soi : il suffit d’aller tendre la sébile auprès de la Ville. Le Racing attend ainsi une avance remboursable de plus, à hauteur de 30 millions de francs, que le club compte rembourser sur dix ans… Cette avance viendrait en sus de la subvention annuelle versée par la municipalité.
On comprend mieux dans ces conditions la porte de sortie cherchée par la nouvelle équipe Trautmann, aux commandes depuis mars, qui entend rompre avec la complaisance de l’ère Rudloff. La fameuse SEM – Société d’Economie Mixte, associant capitaux publics et privés – est sur les rails, avec un certain nombre de conditions fixées par la Ville. Après tout, c’est elle qui paie.

Par la voix de l’adjoint aux Sports Robert Herrmann, la Ville a formulé quatre exigences : elle souhaite séparer la section professionnelle du reste du RCS omnisports (ce qui ne plaît pas à André Bord) ; le versement d’une subvention du 10 millions de francs est conditionné à la réalisation d’un audit sur les comptes du club ; il faudrait prévoir un nantissement des contrats ; enfin garantir des prix des places attractifs pour le plus grand nombre.
Notons que la configuration de reprise en main municipale est la même au FC Mulhouse, enfin promu en D1, dont le recrutement fait pâle figure à côté de celui du Racing à cause du brutal tarissement du robinet communal… Ce qui n’empêche pas le club cher à André Goerig de braconner sur les terres du RCS, en organisant des matchs amicaux à Erstein ou Weyersheim, chez Max Hild.

Toujours en poste, Gérard Banide entend fonctionner avec un groupe réduit de 14 professionnels, que viendront ponctuellement renforcer des jeunes. Au moment du premier amical, le 6 juillet contre Marseille à la Meinau, huit joueurs sous contrat et non retenus sont encore au club. Le 19, seuls Bade, Flucklinger, Etamé et Pita n’auront pas encore trouvé de porte de sortie.
La venue du champion de France en titre, devant 8.200 spectateurs, se fait dans un certain tumulte côté marseillais, avec la rumeur du transfert de Maradona. Il faudra se contenter d’Amoros, Waddle et Francescoli, de jolis lots de consolation. Le Racing flaire le bon coup et guigne des joueurs surnuméraires, comme le jeune Eyraud ou le vieux routier Bernardet, à moins qu’il ne s’agisse d’une rumeur low cost lancée par les DNA. Toujours cette quête obsessionnelle du numéro 10 créateur, que n’aurait pas été Fabrice Mège, même en cas de maintien, lequel aurait rigolé cinq minutes après la défaite à Brest selon Daniel Hechter.

Gilles Leclerc retenu en Equipe de France militaires, le nouveau capitaine Rolff fait figure de libéro de substitution. Banide aligne un 4-4-2 assez offensif, sans meneur de jeu mais avec Géraldès et Péron sur les ailes. Le match nul (2-2) est accueilli favorablement par le public et le staff technique.

Après une rencontre amicale au pied des vignes à Dahlenheim contre une sélection du secteur, qui valait plus pour l’hommage à Vincent Sattler que pour l’enjeu sportif, le Racing essuie deux revers face à des écuries de D1, Saint-Etienne et Toulon. Pas inquiétant, mais de quoi causer des soucis relativisés par le niveau des adversaires, à l’image du FCM qui s’est offert en pâture au Bayern Munich et à l’Etoile Rouge de Belgrade.

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« Yo, c'est trop cher ! »

Et le reste de l’actualité me direz-vous ? Rien à se mettre sous la dent au mois de juillet 1989, si l’on excepte un vague putsch au Soudan ou encore le défilé du Bicentenaire mis en scène par Jean-Paul Goude, événement voulu comme une cérémonie mémorable dont il ne reste plus grand-chose aujourd’hui. Signe que les commentaires bégaient, le sommet du G7 organisé à la Défense suscitera les mêmes réactions que celui de 1982 à Versailles, égratignant l’appétence de François Mitterrand pour le faste impérial.

Interrogé par la presse régionale à la veille du début du championnat, Gérard Banide interpelle en annonçant son souhait d'encaisser moins de buts, volonté qui ne tardera pas à être mise en application. C’est finalement Vincent Cobos qui débutera la saison comme libéro, Wolfgang Rolff apparaissant indispensable au milieu de terrain.
Ce recrutement germanique reçoit enfin la bénédiction du légendaire Oscar Heisserer, dont l’anniversaire fait figure de marronnier de la page Sports des DNA au mois de juillet.

Comme en 1971, le Racing débute une saison de deuxième division contre Gueugnon. Illustration du remue-ménage de l’intersaison, sept nouveaux joueurs sont titulaires :
Equipe

Lorsque Monczuk, puis Didaux d’un corner direct donnent l’avantage à Strasbourg, les rescapés de l’époque RPSM se prennent à rêver d’un nouveau 7-2 (triplés de Molitor et Burkhard). Franck Orsoni, impliqué sur le premier but, l’est également sur la réduction du score signée Caveglia, avant l’inévitable égalisation des Forgerons.
2-2, mauvaise opération et bien mauvaise impression donné au public, qui réplique par d’impitoyables sifflets.

Un mot, tout de même, du mythique Tour de France 1989, celui des huit secondes, qui démarra doucettement, à l’image du tenant du titre Pedro Delgado, en retard sur la rampe de lancement du prologue à Luxembourg. Défaillant dans le chrono par équipe du lendemain, l’Espagnol se lancera dans ce qu’on l’on qualifierait de nos jours de remontada. Dernier du général, il finira troisième trois semaines plus tard.

Ce Tour de France longtemps pluvieux, rythmé par les caprices de la Renault louée par les Dernières Nouvelles d’Alsace, décollera véritablement au bout de quinze jours de course, à la première transmission Fignon - LeMond. En jaune depuis le chrono de Rennes, l’Américain cède sa tunique dans les Pyrénées, non sans être attiré les foudres de son rival pour sa réticence à assumer le poids de la course en montagne. Inlassable attaquant, Fignon perd la tête à Orcières-Merlette (sur un contre-la-montre) et le reprend à l’Alpe d’Huez, avant de creuser l’écart, toujours à coup de secondes, dans le Vercors. Le dénouement – guidon de triathlète vs. « blessure à la selle » – est connu. Huit secondes entre les deux hommes, qui n’ont jamais été séparés par plus de deux minutes.

Pour la deuxième journée, le RCS obtient un 0-0 au même goût de béton que les gradins du vieux stade Charles-Berty. Banide avait annoncé la couleur. Ce triste match vaut surtout pour son contexte, alimenté par une passe d’armes entre les deux présidents. Sorte de Bernard Tapie discount, Marc Braillon affiche sa boîte d’intérim R.M.O. dans les pelotons et sur les pelouses : il attaque Daniel Hechter, qui ferait les yeux doux à son jeune capitaine, qui n'est encore que le fils de Jean Djorkaeff. Grenoble attend 5 millions de francs pour son joyau…

Article réalisé à partir des archives des Dernières Nouvelles d'Alsace, consultables à la médiathèque André Malraux ou au Musée historique de Haguenau.

kitl

Commentaires (6)

Flux RSS 6 messages · Premier message par vloutch · Dernier message par lamazonienbleu

  • Merci!
    Quels souvenirs. J'étais ado. On écoutait Eric Sold. Il y avait à l'époque le FCM et le Racing en alternance. Quand un but était marqué sur l'autre terrain, un jingle l'annonçait: Allo maman bobo si c'était un but encaissé, et Hans im Schnokeloch si c'était alsacien.
    Ce qui est insensé, c'est comme une petite équipe comme Strasbourg, en D2 , pouvait passionner malgré tout les jeunes. Les joutes européennes ou même nationales en D1 nous intéressaient beaucoup moins.
    Gueugnon, Rodez, Avignon, Annecy, Louhans-Cuiseaux, Chaumont, Alès... Tout un monde...
  • Frédéric Christen en discussion avec Alles Gemmrich sur la photo, que de souvenirs !
    Ou quand le meilleur buteur de Bundesliga venait jouer en D2 française... Même si ça n’allait pas durer longtemps, impensable aujourd’hui !
  • Yo c’est trop cher!! :p
  • Et tout ça va finir par un impérissable 0-6 à Nice en barrage alors que tout le monde se voyait déjà en division 1 après le 3-1 de l'aller... Mais ces échecs à répétition en barrages (pour descendre ou ne pas réussir à remonter) vont façonner le contexte de l'exceptionnel RCS-Rennes de mai 92, un des plus beaux moments de l'histoire du club !
  • Et toujours la politique municipale dont l'ingérence (officielle) ne prendra fin qu'à la cession à Mac Cormack.
    Les prix des abos me semblent élevés, surtout pour de la D2. En 1989 le SMIC était de 4961 FRF. Avec 300 FRF tu remplissais ton caddie.

    Gueugnon: Rencontré en National 2010/2011. (liquidé en cours de saison)
    Rodez: Rencontré en National 2010/2011.
    Chaumont: Rencontré en CFA2 2011/2012.
  • Oui toujours beaucoup de souvenirs, merci ! Mon premier de cette saison à la journée suivante avec le quadruplé de Monczuk contre Chaumont !

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