Yuito Suzuki veut monter en régime

L'information avait de quoi surprendre, autant par sa soudaineté que par sa nature, le Racing a bouclé, avec son habituel discrétion en matière de recrutement, la venue d'un milieu offensif japonais de 21 ans, Yuito Suzuki. Le club strasbourgeois n'avait jamais exploré le « marché » japonais auparavant, si ce n'est avec les essais furtifs de Daisuke Ichikawa en 2003 et de Keisuke Ogawa, dix ans plus tard. Quelques années auparavant, à la fin des années 1990, le Sud-Coréen Jung-Won Seo faisait presque figure de précurseur des joueurs asiatiques en France.

S'il est encore jeune, Suzuki possède déjà une belle expérience au niveau professionnel et fait partie des solides espoirs du Japon. Originaire de Hayama, préfecture de Kanagawa, au sud de l'agglomération de Tokyo, et issue d'une fratrie de trois enfants (ce qui est relativement rare au Japon), il débute le football dans le club des Yokohama F. Marinos, puis rejoint le lycée de Funabashi. L'établissement est assez réputé pour sa section football, puisque cette équipe participe à la Prince Takamado League West, un championnat de jeunes U18 où l'ont retrouve les équipes réserves de clubs professionnels. Avant même la fin de son cursus lycéen, le milieu offensif est appelé lors de plusieurs rassemblements avec les sélections nationales U17 et U18. En novembre 2019, son diplôme en poche, il est appelé avec la sélection U19 pour préparer le Championnat d'Asie U19 avec le Japon, qui doit avoir lieu en Ouzbékistan en mars 2020 (reporté à cause de la crise sanitaire en octobre 2020, avant d'être définitivement annulé).

Début 2020, il signe un contrat professionnel avec le club de Shimizu S-Pulse, basé à Shizuoka. Un choix que le joueur justifie par la réputation du club à former des joueurs, comme les internationaux Jungo Fujimoto et Shinji Okazaki. Après un début de championnat retardé par la crise sanitaire, La J-League reprend finalement en juillet et Yuito Suzuki gagne peu à peu sa place dans le onze de départ. Mais Shimizu S-Pulse se traîne en bas de tableau, collectionnant plusieurs séries de défaites consécutives, sans que l'entraîneur australien Peter Cklamovski ne trouve la bonne formule. Le jeune milieu offensif achève sa première saison avec un bilan de 30 rencontres disputés, dont 12 titularisations. Relégable, le club doit son salut qu'à la décision de la Fédération de geler les relégations pour passer le championnat à 20 clubs au lieu de 18.

Lors de la saison 2021, Suzuki gagne un peu plus en responsabilités, en étant régulièrement titulaire comme deuxième attaquant dans le 4-4-2 mis en place par l'espagnol Miguel Anglet Lotina. Mais malgré des promesses d'un jeu offensif à son arrivée, l'entraîneur peine à convaincre et à faire jouer son équipe, qui termine avec un bilan de 37 buts marqués en 38 journées. L'année 2022 sera bien plus heureuse, puisqu'elle débute avec une bonne surprise : Yuito Suzuki est appelé à participer à un rassemblement de l'équipe nationale du Japon, composé uniquement de joueurs locaux, en janvier mais le match amical contre l'Ouzbékistan a finalement été annulée à cause de la pandémie. Toujours en sélection, mais chez les jeunes cette fois, il participe au mois de mars à la Dubai Cup U23, avec l'équipe du Japon U21, compétition amicale qu'il remporte. Quelques semaines plus tard, au mois de juin, le Japon participe à l'Asian Cup U23, compétition officielle organisée par l'AFC, et termine troisième. Titulaire, Suzuki marque un but contre les Emirats Arabes Unis en phase de poule, puis un doublé contre la Corée du Sud en quart de finale. Ses prestations en championnat, entre la première journée au mois de février et le mois de mai avant son départ en sélection sont également salués par tous les observateurs. Même si son équipe est toujours moribonde, le joueur est devenu un titulaire indiscutable et a inscrit trois buts et délivré deux passes décisives en seize matchs. Malheureusement, une blessure à la cuisse le prive de près de trois mois de compétition.

Son retour et ses quelques petites apparitions en fin de saison n'empêcheront pas la relégation de Shimizu S-Pulse. Mais après trois ans et plus de 80 matchs disputés en championnat, il paraît clair que l'avenir de Yuito Suzuki n'est pas en J-League 2, d'autant qu'il est suivi depuis plus d'un an par des clubs belges et par le Celtic Glasgow, friand de joueurs japonais depuis quelques mois et l'arrivée d'Ange Postecoglou sur le banc des Bhoys. Un passage en Europe qui paraît d'autant plus logique que son agent, Yusuke Akiyama, y est déjà bien implanté, notamment avec Takumi Minamino. Et après de nouvelles approches de la part du FC Bruges et de Majorque, c'est le Racing, après avoir pu l'observer au cours de la tournée européenne de la sélection U21 du Japon cet automne, qui a su convaincre le milieu offensif, dans le cadre d'un prêt de six mois, assorti d'une option d'achat, de l'ordre de 450 000€. Une période durant laquelle le Japonais pourra s'adapter à une autre culture et à un style de jeu différent, en étant accompagné par le héros national Eiji Kawashima.

A Strasbourg, Yuito Suzuki tentera de gagner du temps de jeu, dans son rôle de numéro 10 ou second attaquant polyvalent, dans le style de son idole Kévin De Bruyne : « ma force est que je peux jouer dans n'importe quelle position offensive. Ce qui m'est demandé, c'est de recevoir le ballon dans les intervalles et d'aller provoquer l'adversaire » (yahoo.jp)