Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Rolling a roulé sa bosse

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Par strohteam
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Franck Rolling a initié l'opération de solidarité organisée par le club en faveur d'Haïti. L'occasion pour l'ancien défenseur central de revenir pour Racingstub.com sur sa carrière de joueur et sa reconversion réussie.

Quatre garçons dans le vent


Nous sommes en avril 1987 et le Racing de Daniel Hechter ne parvient guère à s'extirper du milieu de tableau de son groupe de Division 2 (D2). Robert Herbin choisit alors de faire confiance aux stagiaires et aspirants du centre de formation, qui s'entraînent désormais très régulièrement avec les pros. Parmi ces jeunes pousses évoluant sous la férule d'Albert Gemmrich, on trouve notamment Marc Eschbach, José Cobos, Vincent Sattler et surtout Franck Rolling, qui dispute son premier match chez les séniors à 18 ans à l'occasion d'un déplacement à Beauvais. Entré au centre de formation deux ans plus tôt, le Colmarien de naissance est une des valeur montantes du club, régulièrement sélectionné en équipe de France de jeunes aux côtés de joueurs comme David Zitelli, Didier Deschamps ou Marcel Desailly. A Strasbourg, il forme depuis les minimes une charnière centrale de choc avec le regretté Vincent Sattler, plus jeune d'une année. Ce Racing des années 1980 connaît quelques problèmes d'effectif dans le secteur défensif, c'est une des raisons de sa descente un an plus tôt et cela signifie aussi qu'il y a des places à prendre pour des jeunes qui « ont faim ». Franck Rolling effectue en tous cas des débuts remarqués, puisqu'il marque pour fêter ses deux première titularisations, contre Amiens en championnat et face à Toulouse en huitième de finale aller de la coupe de France. Ces prestations convaincantes lui assurent une place de titulaire jusqu'à la fin de la saison avec comme partenaire en défense centrale le futur vice-champion du monde Juan Ernesto Simon.

Des débuts réussis donc, mais au Racing l'instabilité règne - pour ne pas changer – et la concurrence se fait rude. Le club attaque en effet la saison 1987/1988 avec un nouvel entraîneur, Henryk Kasperczak, et un effectif remanié en profondeur, avec notamment le retour de Léonard Specht. Difficile dans ces conditions de se faire une place, et les jeunes seront réduits à jouer les utilités. L'année suivante, le Racing est en première division, Rolling joue davantage mais la saison est tragiquement marquée par le décès de son ami et compère des équipe de jeunes. Au final, Franck Rolling regrette un peu de n'avoir jamais pu effectuer une saison en « partant comme titulaire » au sein d'un Racing qui ne s'est pas encore décidé à faire véritablement confiance aux joueurs issus de sa pépinière. Il effectuera tout de même six saisons au club pour 49 matches de championnat au total mais la dernière, en 1991/1992, sera gâchée par trois blessures successives et des relations difficiles avec le nouvel entraîneur, Gilbert Gress. A bientôt 24 ans il est temps de changer d'air, et Franck Rolling descend d'un échelon pour rejoindre une ambitieuse équipe de Pau entraînée par Slavo Muslin. Jouant devant « 5-10 000 spectateurs de moyenne », les Palois décrochent la première place de leur groupe de D3 mais pas l'accession en D2. La saison suivante, au sein du nouveau championnat de National 1, sera plus anodine, avec une huitième place à la clé.

Voyages et rencontres


En cet été 1994, Franck Rolling fait alors le choix, encore peu commun pour l'époque, de se tourner vers l'étranger. Il parvient à dénicher les coordonnées de son ancien coéquipier du Racing Simon Stainrod, désormais entraîneur-joueur en Ecosse, et lui offre ses services. C'est ainsi qu'il débarque à ses frais à Ayr United, club de deuxième niveau, en juillet après avoir effectué seul toute sa préparation physique. Une semaine plus tard, il signe son contrat et débute dans la foulée en championnat. « Une expérience extraordinaire », surtout à une époque pré-Bosman où les joueurs quittent encore rarement leur pays, surtout s'ils ne sont pas internationaux. L'Alsacien effectue une saison pleine à Ayr - il est même promu capitaine au bout de six mois - mais le club est relégué en fin de saison. Les bonnes performances de Rolling et l'entregent de son agent écossais lui ont néanmoins permis de décrocher un essai d'un mois à Leicester, entraîné par Mark McGhee. L'ancien d'avant-centre d'Hambourg lui donne sa chance à l'occasion d'un match contre Norwich et ça paye puisque Rolling est élu « Man of the match » et s'engage définitivement avec les Foxes. Leicester, désormais entraîné par Martin O'Neill, réalise une belle saison et sort vainqueur des barrages d'accession en Premier League, disputés au mythique stade de Wembley. L'actuel entraîneur d'Aston Villa pratique alors un jeu très physique et Franck Rolling doit gagner sa place face à des joueurs qui font souvent une tête de plus que lui. Régulièrement utilisé en Division One, le Français joue plus rarement à l'échelon supérieur et devra se contenter des tribunes pour son deuxième passage à Wembley, en finale de la coupe de la League. Son aventure britannique se poursuit néanmoins puisqu'il rebondit la saison suivante en Division Two (troisième niveau) à Bournemouth avec, à nouveau, un passage par Wembley. Le club dispute en effet le « Auto Windscreens Shield », une coupe réservée aux clubs de troisième et quatrième niveau. En demi-finale, Rolling et ses partenaires affrontent en matches aller/retour l'équipe de Walsall, où l'on retrouve Roger Boli, Didier Tholot mais aussi Jean-François Peron. Lors de la première manche, Bournemouth s'impose 2-0 à Walsall, avec un but de Rolling, et semble bien parti pour se qualifier. Mais le retour à domicile est plus difficile qu'escompté. Menés, 3-1 à 10 minutes du terme de la partie, les Cherries ont absolument besoin d'un but pour se qualifier et c'est une nouvelle fois de Franck Rolling que viendra la lumière, sur corner à la 82è. Le défenseur a joué un rôle décisif dans la qualification et on imagine sa déception quand l'entraîneur décide de ne pas lui faire confiance pour la finale. Fâché, il quitte le club sur ce « point de non-retour », clôturant ainsi une riche aventure britannique qui l'aura même vu participer à deux émissions de télévision pour faire étalage de ses talents de... cuisinier !

Les voyages ne cessent cependant pas pour Franck Rolling puisque, après quelques touches en Italie mais aussi aux Etats-Unis (1), on le retrouve début 1999 en Autriche avec une autre vieille connaissance du Racing : Jürgen Sundermann, qui débarque au même moment en Styrie pour tenter de sauver le Vorwärts Steyr de la relégation. L'expérience tourne court, puisque le club finit dernier de Bundesliga et Franck Rolling change à nouveau de pays et de championnat pour se retrouver en deuxième division grecque, à Veria, où il signe pour trois ans. Comme d'autres joueurs, il connaît des difficultés pour obtenir le versement de son salaire et finit par quitter le club au bout d'une seule saison. L'Alsacien a alors quelques touches pour revenir en D2, à Valence, mais choisit à 32 ans de privilégier la reconversion en signant à Jura Sud. Ce club de CFA 2 lui offre en effet la possibilité de passer en parallèle un BTS de gestion des PME/PMI en alternance chez le fabricant de jouets Smoby. Une reconversion dont l'ancien du Racing a très tôt saisi l'importance et la difficulté pour un ancien footballeur professionnel, grâce notamment aux conseils de joueurs plus âgés. Il faut en effet passer d'un environnement bien protégé où le joueur est largement assisté à une vie professionnelle plus classique, le plus souvent en dehors du football. Dès son passage à Leicester, Rolling avait donc entrepris des études à l'université de Loughborough, conscient que les diplômes sont « un gage de crédibilité » face à un employeur potentiel. Ses études lui ont ainsi permis de décrocher un emploi chez SITA (Groupe GDF-Suez), où il a travaillé pendant sept ans dans le domaine de la gestion des déchets avant de rejoindre récemment Aequalia - une entreprise à caractère social spécialisée dans la potabilisation de l'eau en urgence (2) - en tant que chargé des relations publiques. Des domaines bien éloignés du ballon rond mais pas totalement séparés, puisque l'ancien joueur a continué à fréquenter régulièrement la Meinau pour des fonctions de représentation. L'occasion pour lui de jeter un regard extérieur sur l'évolution du club. Comme beaucoup de suiveurs, Franck Rolling espère que le Racing parviendra à trouver une stabilité en coulisses et déplore également un certain déficit de « culture club » par rapport à ce qu'il a pu connaître en Angleterre, notamment en matière de relations avec les anciens joueurs ou avec les supporters.

Un vaste chantier, mais l'action en faveur d'Haïti à laquelle Franck Rolling participe va en quelque sorte dans ce sens, en mettant en exergue l'idée que le Racing est avant tout une famille qui doit pouvoir se réunir et se mobiliser autrement que pour des commémorations ponctuelles. A l'occasion du prochain match contre Nantes, le club fera en effet un don d'un euro par place vendue à l'organisation non-gouvernementale Action contre la Faim sans surtaxe sur le prix des places (3). Une bonne raison supplémentaire de se rendre au stade pour soutenir son équipe et une cause humanitaire par la même occasion. Première république noire, Haïti – dont est originaire le Nantais Jean-Jacques Pierre – est l'Etat le plus pauvre de l'hémisphère Nord. Au-delà de l'urgence, il s'agit donc aussi d'accompagner le pays sur le long-terme pour espérer pouvoir enfin le voir sortir du marasme. En résumé, ce Racing - Nantes est une belle occasion d'allier solidarité et passion. On a connu trop de cocktails bien moins ragoûtants ces derniers temps pour ne pas saluer l'initiative.

L'auteur remercie Franck Rolling pour sa disponibilité et Jean-Noël Roth pour sa réactivité.

Notes


(1) Rolling avait en effet évolué à Pau avec Billy Thompson, international américain qui retourna plus tard au pays pour participer aux débuts de la Major League Soccer au sein de l'équipe de Columbus Crew.

(2) Plus d'informations sur le site d'Aequalia

(3) Il y aura toutefois une majoration sur le prix des billets, mais celle-ci est destinée à la Ligue d'Alsace. Les deux opérations sont simultanées mais distinctes.

Sources


« Rolling, l'Ecossais », article d'Alain Voyer dans les Dernières Nouvelles d'Alsace du 17 juillet 1995
« Rolling, le risque-tout », article de Patrick Fort dans L'Alsace du 12 mai 1997
« Franck's dish of the day », The Daily Mirror, 6 octobre 1997
« Rolling avec Sundermann », article de Jean-Pierre Meyer dans les Dernières Nouvelles d'Alsace du 3 février 1999

Les déclarations entre guillemets et en italiques sont issues d'un entretien que Frank Rolling a bien voulu nous accorder.

strohteam

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