December 2008


Lagadec viendra à toi

19/12/2008 21:05
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Suite à mes conneries sur les Aïnous dolichocéphales (=billet précédent), j'ai eu l'occasion de farfouiller sur le sujet. Je remarque, et ça me rassure car j'étais un tantinet péremptoire, que je n'ai toujours pas trouvé de contradicteur convaincant. Beaucoup insistent sur le fait que les "êtres humains sont à 99,9% identiques" (ce qui est déjà faux lorsqu'on parle d'homme et de femme, le chromosome masculin Y représentant 2% du génôme, mais passons), or les définitions académiques de - l'affreux mot de - race ne parle jamais d'un niveau de divergence suffisant pour pouvoir utiliser ce mot. A ma connaissance en tout cas. C'est quoi le "bon" seuil, 70%, 80%, 90% ? Seuil utilisable aussi bien pour les races d'insectes, etc... ? Méfiance, car si on se loupe, il y a de bonnes chances que de nombreux primates se retrouve dans une "race humaine"...Fixer un seuil serait de toute façon arbitraire, et ne sert ici uniquement qu'à essayer de limiter l'usage d'un mot honni.

Je maintiens donc. De façon générale, nier l'existence d'une importance variation génétique entre populations humaines serait véritablement absurde. Voilà ce que dit, par exemple, le Pr. Jérôme Goudet de Lausanne (une bête) sur les fameuses pubs pour déterminer génétiquement ses origines:
«Ce type de test [concernant des origines juives] n'est pas crédible, car il est fondé sur la comparaison de quelques dizaines de marqueurs génétiques seulement, estime Jérôme Goudet, professeur de génétique des populations à l'Université de Lausanne. «Des tests sur 500 000 marqueurs coûtent 1000 dollars et sont beaucoup plus fiables pour des populations qui ont peu bougé.. Ce qui n'est pas le cas des juifs. Reste que j'ignore ce qu'est la définition génétique d'un juif», précise-t-il.




La vraie question restant, encore une fois : pourquoi cette hystérie ? Pourquoi le racisme est associé à des tabous aussi forts, avec clergé, inquisiteurs, culpabilité,... Tiens, j'ai vu des blogs où des types se torturaient pour comprendre pourquoi la sortie de Zemmour laissait finalement peu de prises à la mécanique classique de dénonciation/culpabilisation. La réponse semble simple: il ne dit rien de strictement raciste, et d'ailleurs ses vis-à-vis échouent à le mettre en défaut. La reconnaissance des différences physiques est de l'ordre de l'observable. S'il est vraiment raciste, il est dans la situation du pervers qui n'a pas encore mis la main au cul à sa voisine de missel. Voyant cela, ces blogueurs se rongeaient pour savoir comment reconnaître des intentions racistes... antiracisme neuneu = Inquisition / morale dévoyée.

Pourquoi ? Je suis persuadé que l'existence de l'antiracisme répond à un besoin de morale globalement frustré par l'amoralisme moderne. Et la question devient aussi: pourquoi ce besoin de morale ? J'avais ma petit idée aussi, vague et mal formulée. Il a fallu que je tombe sur ce livre de 1996 de ce Claude Lagadec (1932-2000), disponible en ligne. Comme d'habitude en pareil cas - c'est à dire, quand je trouve un savant méconnu qui pense tout pareil que moi-, je me demande si j'ai affaire (1) à un pionnier génial, comme moi (là je doute fort), faisant face à une ignorance inouïe (bon ça me frappe souvent, notamment en biologie, même pour les questions les plus simples) (2) le mec est en fait super connu, je manque dramatiquement de connaissances (snif) (3) le mec est un foireux et moi aussi (sob).
Quoi qu'il en soit, voilà le travail (en très rapide) (c'est moi qui souligne avec mes petits doigts):

La vie sociale résulte de l'évolution darwinienne


http://www.imagier.net/albums/userpics/10004/normal_ruche-abeille...

«Je sais que cette dernière affirmation, à l'effet que la vie sociale résulte d'un développement particulier et contingent de l'évolution darwinienne, risque de heurter un certain nombre de sociologues et d'anthropologues qui pourraient soutenir une opinion contraire. Il sera difficile d'en discuter tant que ces divers spécialistes ne nous donneront pas leurs raisons et ne nous procureront pas, en termes raisonnablement vérifiables, une réponse à la question suivante : quelle est selon eux l'origine de la vie sociale, par opposé à la vie solitaire ?

Pour le philosophe, la première conséquence de la conception du social comme forme de vie produite par l'évolution est que ces deux modèles, celui de Hobbes et celui de Darwin, sont totalement incompatibles et s'excluent mutuellement. Si nous acceptons le modèle de Hobbes, alors Darwin a tort, nous sommes des enfants de Dieu et la théorie hobbesienne du « contrat social » appartient à la version protestante des suites de l'expulsion du paradis. Ce sont les humains et eux seuls qui ont inventé la société en renonçant à la totalité de leur liberté individuelle (au sens hobbesien d'absence de contraintes), donc en enchaînant leur liberté à l'absolutisme du Léviathan, qui est un despote. Un siècle après Hobbes, Jean-Jacques Rousseau a proposé une version plus latine, moins luthérienne de cette même fable. Il se trouve que les philosophes ne disposent d'aucune autre théorie de l'origine du social que cette fable.

Ou bien, au contraire, nous acceptons la théorie darwinienne de l'évolution, mais il nous faut alors être conséquents, ces choses-là ne doivent pas se faire à moitié, il faut en voir et en accepter intégralement les conséquences. Ce qui signifie que toute la théorie philosophique du « contrat social » doit être appréciée pour ce qu'elle est, c'est-à-dire une fable philosophique à forte saveur théologique. C'est l'évolution qui a inventé la vie sociale comme mode de compromis par rapport à la compétition, et non pas les humains par leur seul génie. Si loin que l'on remonte dans l'histoire de l'humanité et au-delà dans ce que l'on sait des anthropoïdes et des premiers représentants de l'espèce homo, les humains semblent toujours avoir été sociaux, aucun fait connu ne nous permet de croire que ce primate ait jamais été solitaire.

Cela mérite d'être dit plus explicitement encore. Il n'y a pas le plus infime document historique justifiant la thèse d'un « contrat social » prétendument conclu entre humains qui auraient vécu jusque-là dans un « état de nature » comme Rousseau et Hobbes voudraient nous faire croire. On demandera à savoir à quelle date ce supposé contrat a été conclu, quels en étaient les signataires et où sont les traces de leurs témoignages.

En pratique, seule la biologie répond à la question de savoir pourquoi nous sommes sociaux : nous sommes sociaux parce que c'est ainsi que l'évolution nous a faits. La vie sociale est une stratégie, parmi d'autres, de l'évolution, dont l'effet présumé est de réduire l'âpreté de la compétition dans la reproduction


J'ajouterais un petit bémol - ce monsieur vient des sciences sociales ! - l'effet n'est pas de réduire la compétition, mais d'optimiser la reproduction de manière générale, par rapport au modèle "primate solitaire". Ce qui n'exclue pas nécessairement une intense compétition dans le groupe social, et entre groupes. Bref.


La morale, c'est la loi du groupe


«Lorsque Bertrand Russell a écrit son histoire de la philosophie, il l'a intitulée : Histoire de la philosophie occidentale, reconnaissant ainsi le caractère limité de son entreprise et du corpus où il puisait. Je ne connais pas de traité de morale dont le titre dise expressément sa particularité d'être occidentale, et donc partielle. Par défaut, logiquement, l'absence de quantificateur confère à cette particularité la prétention à l'universalité. Prenons, par exemple, l'ouvrage de G.E. Moore, l'ami de Russell, publié en 1903 : Principia Ethica. Le philosophe moraliste n'aurait-il pas dû signaler dans son titre que son traité était réservé à l'usage des Anglais ? Ou des anglophones ? Ou des Occidentaux ?

Il suffit que chaque moraliste persévère, sérieux, bien intentionné et compétent et qu'il continue ainsi à publier chacun à tour de rôle ses propres Principia Ethica sans faire la moindre allusion à l'existence d'autres morales et d'autres discours tout aussi sérieux, bien intentionnés et compétents que le sien mais incompatibles, et qu'il continue à espérer que personne ne s'en aperçoive. Ce phénomène, à lui seul, est tout à fait extraordinaire, pratiquement invraisemblable, mais ce n'est encore rien, car personne ne semble en effet s'en apercevoir, ou en tout cas s'en formaliser.»


Bon, jusque là c'est un peu de l'enfonçage de portes ouvertes, mais généralisation est finalement saisissante:

«La surprise fut de devoir reconnaître, malgré tout ce que nos maîtres nous ont enseigné et malgré tout ce que je croyais savoir, que le fondement de la morale humaine se situe dans le groupe et non pas dans la personne individuelle ou dans sa rationalité.»

Claude Lagadec donne ainsi trois exemples des fondements évolutionnistes de la morale du groupe:

1. Les soins à la progéniture: «Au premier contact physique avec son nouveau-né un être humain éprouve habituellement l'obligation de le nourrir et de le protéger. Il existe en biologie ce qui a été appelé "la stratégie du gros bébé ".»
. Eh oui. Le groupe commence ici avec sa propre progéniture (dans d'innombrables espèces, les parents n'investissent
absolument pas dans les soins à la progéniture. A commencer par les végétaux).

2. «L'inceste. En général, les animaux ne pratiquent pas l'inceste. Il y a des exceptions, comme l'accouplement frère-soeur chez quelques insectes.» On connaît tous le résultats des croisements consanguins: à terme, le coût sur la fécondité mènerait à la disparition d'une lignée trop portée sur l'inceste.
http://vial.jean.free.fr/new_npi/img_pool/portr/esp_charl2.jpg
Le sémillant Charles II - un obscur Habsbourg d'Espagne - résultat bien connu d'une expérience assez poussée de croisements consanguins

3. Enfin, last but not least, la coopération au sein du groupe «L'altruisme. Lorsque, de propos délibéré, nous sommes altruistes au sens moral du terme, nous appliquons une règle dont l'effet est d'avantager quelqu'un à nos dépens, généralement un proche». Ceci s'apparente à favoriser ses gènes de façon plus étendue, le groupe social, à certains niveaux d'endogamie, étant composé d'individus apparentés.

La morale d'un groupe serait donc uniquement un comportement universel associé à la vie sociale, ce que les anthropologues connaîtraient finalement assez bien :

Liste des comportements du syndrome de l'ethnocentrisme

Attitudes et conduites par rapport au groupe
1.1Voir son groupe comme vertueux et supérieur.
1.3Croire que ses propres standards sont universels, intrinsèquement vrais. Voir ses propres coutumes comme originales et au fondement de l'humanité.
1.4Voir les membres de son groupe comme forts.
1.8Des sanctions punissent le vol dans le groupe.
1.10Des sanctions punissent le meurtre d'un membre du groupe.
1.12Coopération avec les membres du groupe.
1.14Obéissance aux autorités du groupe.
1.16Empressement a demeurer un membre du groupe.
1.18Empressement a se battre.


Attitudes et conduites par rapport à l'extérieur du groupe
1.2Voir l'autre groupe comme méprisable, immoral et inférieur.
1.5Voir l'autre groupe comme faible.
1.6Distance sociale.
1.7Haine a l'égard de l'autre groupe.
1.9Sanctions ou non sanctions du vol fait aux dépens des membres de l'autre groupe.
1.11Sanctions ou absence de sanctions du meurtre d'un membre de l'autre groupe.
1.13Absence de coopération avec les membres de l'autre groupe.
1.15Absence d'obéissance aux autorités de l'autre groupe.
1.17Absence de volonté de devenir membre de l'autre groupe.
1.19Absence de volonté de se battre et de mourir pour l'autre groupe.
1.20La mise a mort du membre de l'autre groupe est un acte vertueux.
1.21Dans l'éducation des enfants on utilise le comportement des autres groupes comme exemple du mal.
1.22L'autre groupe est tenu responsable des malheurs du groupe.
1.23Méfiance et crainte a l'égard de l'autre groupe.


On a l'impression que sont résumés ici bon nombre de nos réflexes moraux. On pourrait noter, ça et là, des connexions de la première partie avec l'intuition de la common decency de Georges Orwell, et de manière générale, la réflexion anarchiste sur les sources et les conditions de la vie en groupe. On notera aussi, dans la deuxième partie, des comportements typiquement racistes, mais j'y reviendrai à la fin.


Individu, liberté et amoralisme


En corollaire avec le paragraphe précédent, l'auteur exclue l'idée que la moralité est choisie par l'individu (le précieux libre-arbitre, je crois), puisqu'elle est la loi du groupe.

«La plupart des humains, lors de leur premier contact physique avec leur nouveau-né, subissent une contrainte dont l'effet est de les porter à nourrir et protéger cet enfant. Une autre contrainte, inhibitrice celle-là, fait que la plupart d'entre nous, la plupart du temps, éprouvons une nette répugnance à commettre l'inceste. Troisième exemple, la plupart d'entre nous sommes particulièrement attentifs au bien-être et aux souffrances des membres de notre famille immédiate.
(...)
Or, puisque la moralité de l'existence humaine est aussi ininterrompue que la vie elle-même – l'être humain est un être moral par définition, « à temps plein », pour ainsi dire, et non pas « à temps partiel » – ne faudrait-il pas supposer l'existence de quelque système permanent de moralité à l'intérieur de nous-mêmes, qui nous épargne habituellement d'avoir à prendre de telles décisions conscientes et délibérées tout en nous laissant le loisir de le faire dans certaines circonstances exceptionnelles ?»


Exit aussi, en passant, l'idée que l'individu est bon/mauvais par nature, puisqu'il est déterminés par des contraintes biologiques, à commencer par les intérêts de son groupe. Que reste-t-il de la liberté ?

«J'appelle liberté l'ensemble des performances dont un organisme est physiquement capable. C'est l'autonomie de l'organisme dans son environnement.
(...)
La liberté est un ensemble que la morale, comme sous-ensemble, vient réduire. La morale est un sous-ensemble de contraintes dont l'effet est de diminuer, circonscrire et limiter la somme des performances qui, bien que physiquement possibles, deviennent en pratique soit obligées, soit au contraire, inhibées. L'effet de la contrainte morale peut être incitatif ou inhibiteur ; elle peut nous obliger à faire quelque chose que nous pourrions ne pas faire, ou au contraire nous inhiber et ainsi nous empêcher de faire quelque chose que nous pourrions faire physiquement.»


C'est une définition universelle, basée sur les déterminismes biologiques, qui dépasse les conceptions particulières du groupe sur la liberté/morale (par exemple, les droits de l'Homme (et du citoyen), écrits en France en 1789). Par conséquent,...

«(C'est une définition qui) nous fait écarter toute conception de la liberté qui suppose le sujet. On rappellera pour mémoire qu'il n'y a pas de concept de sujet chez Aristote. Le sujet est une invention typiquement moderne occidentale, elle n'apparaît que dans la tradition philosophique occidentale chrétienne, ses premiers représentants historiques étant Augustin, Descartes et surtout Kant. L'idée de sujet n'est pas universelle mais seulement occidentale et donc ethnocentriste.
(...)
Historiquement, l'invention kantienne du sujet humain qui est sa propre liberté et qui, en cela, est donc égal à tout autre sujet humain, était d'une extraordinaire audace à l'époque puisqu'elle s'adressait à des hommes et à une philosophie d'Ancien Régime pour lesquels elle fut exactement ce qu'elle voulait être : une rupture démocratique et égalisatrice qui mettait fin à la hiérarchie métaphysique et théocratique. C'est ce qui, en philosophie, fait de Kant le véritable père des droits de la personne. Cette philosophie était révolutionnaire en son temps mais il y a belle lurette qu'elle ne l'est plus pour nous qui sommes post-révolutionnaires et pour qui la réversibilité de la liberté et de la pensée est devenue en fait beaucoup plus cartésienne que kantienne. Nous continuons en effet à croire, malgré toute la psychanalyse que l'on voudra, que tout ce qui est dans la liberté humaine est dans sa pensée et réciproquement. C'est l'âme transparente à elle-même de Descartes qui ne pense que ce qu'elle est et qui pense n'être que ce qu'elle pense qu'elle est. Nous devrons donc retourner brièvement à Kant pour reprendre les données de ce problème afin de le reformuler pour notre compte et le résoudre en termes modernes.»


http://quadri.files.wordpress.com/2008/01/nietzsche-785802.jpg
Il roulait des pelles au poney-ses (véridique !)

Dans mes souvenirs, Nietzsche a abondamment écrit, à la suite de Kant, sur ce concept d'individu et les fondements de la morale, mais j'ai pas poussé jusqu'à ce chapitre. On pourrait développer, concernant ces concepts de la liberté/individu, sur la contradiction qu'ils induisent avec la morale fondée sur le groupe. Les Ultras, qui affrontent l'hostilité d'une société d'individus, connaissent cela très bien. J'ai pas parlé non plus de libéralisme, mais j'y pense. Ceci dit, j'y suis attaché, moi aussi, à mon petit individu. On pourrait aussi causer sur la contradiction avec la morale causée par la négation totale des individus dans le schéma communiste (qui niait du même coup l'"égoïsme relatif" d'une nation, d'une classe ethnie, famille). Orwell l'a si bien senti dans 1984.



Et ce foutu racisme ?


«Je résume. La liberté biologique rend possibles un certain nombre de performances physiques. Des contraintes primaires, appelées contraintes morales dans le cas des êtres humains, viennent limiter le nombre et l'exercice de ces performances.
Il existe cependant des contraintes primaires dont nous pouvons trouver des traces observables et universelles dans le comportement humain et que, néanmoins, nous refusons d'ordinaire d'inclure au nombre des contraintes de la morale humaine. Je veux parler (notamment) de la xénophobie (...)
Or, il existe bel et bien un principe de xénophobie en biologie sociale. On l'appelle le « principe » parce qu'il a été vérifié et documenté dans pratiquement tous les groupes d'animaux vivant en société possédant une vie sociale un peu complexe et qui ont été examinés sous ce rapport. Sans être universelle, la xénophobie animale est très fréquente dans les sociétés animales. Chez les lions, les fourmis ou les primates, par exemple, l'apparition d'un étranger constitue le plus fort stimulus de conduites agressives dont les membres sont capables et qui sont alors dirigées contre l'intrus. La présence de l'étranger représente une menace au statut social, au rang de chacun des membres du groupe, elle provoque les plus grands désordres qui ne cessent qu'avec son éviction, parfois sa mort ou éventuellement son intégration après une période de probation plus ou moins longue. La généralité de la xénophobie dans les sociétés animales nous suggère l'idée que sa présence est probablement sociogène, qu'elle facilite la vie sociale dont elle renforce la cohésion et la stabilité.

Je pense que sur ce point il n'y en a plus. Nous avons toutes les raisons de penser que la xénophobie et le racisme font partie de la nature humaine depuis très longtemps. Au point que l'apparition des termes eux-mêmes de xénophobie et racisme semble incroyablement récente. Selon Le Petit Robert, « xénophobe » date du début du XXe siècle, « raciste » apparaît vers 1930. Ce qui signifie qu'avant le XXe siècle et probablement depuis la nuit des temps les sociétés humaines ont toujours été racistes. Il en va de même en anglais. L'apparition relativement récente du mot n'indiquerait alors que le moment où certaines de ces sociétés racistes ont cessé d'être fières de l'être.»


Bref, le racisme/xénophobie serait une expansion de la morale du groupe. Il est fort probable, par exemple, que le nazisme ait été un moyen d'achever l'unité allemande, en dépassant les clivages de classes (voir les Damnés de VIsconti) et régionaux, en éveillant la morale du groupe aux dépens de malheureux indésirables.
Dans ces conditions, l'antiracisme se déploie, lui aussi, uniquement dans le champ de la morale. Les pseudo-justifications rationnelles, du type de celles qu'on opposent au petit Zemmour ("les races n'existent pas, les scientifiques l'ont dit") sont des cache-misère. Il est significatif que toutes les solutions envisagées par Lagadec sont de l'ordre de la "réeducation" (c'est son mot), décidée par le groupe, il s'agit bien de redressement moral:

«Ce qui est requis c'est plus qu'un simple changement dans les idées, c'est un changement dans les perceptions et seul le groupe est en mesure de produire ce genre de résultat. (...)l'acceptation d'un nouvel ensemble de valeurs et de croyances»

C'est précisément ce qu'on voit à l'oeuvre avec l'"antiracisme années 80" (Lagadec a écrit la première version de son livre en 1982). Je ne suis pas philosophe. Mais pour travailler, depuis des années, sur les conséquences implacables des déterminismes biologiques et de l'évolution darwinienne, je doute fort sur la possibilité d'une "rééducation". Je pense même, de façon floue, que cela créera beaucoup plus de souffrance que ça n'en évitera. Il me semble qu'il faudrait assumer:
  • Soit de composer vaille que vaille avec la morale du groupe, celle qui pré-existe: le groupe est susceptible d'être étendu, pourquoi pas à l'universel. On y voit la trace de l'universalisme français jusqu'à l'élection d'Obama. Un tel projet est à rapprocher aussi de la réflexion anarchiste, qui se passe me semble-t-il de "rééducation", de son clergé et Cie.
  • Soit de reconnaître l'évidence et la généralité du racisme - et donc celles de la générosité, aussi, sans quoi nous serions des démons : Coluche était encore capable d'une telle finesse, dans le magma des années 80. Il faudrait donc imposer, par la domination, la vie collective. C'est le sens de la laïcité à la française.

Bref, je radote (et bonnes fêtes de fin d'année aux deux ou trois lecteurs survivants).

Le vide est religieux ?

06/12/2008 22:11
1.669 lectures
Petit extrait du dernier livre d'Emmanuel Todd, Après la démocratie . Pas le genre qui donne la patate et envie de souscrire un emprunt sur 50 ans, mais il contient une synthèse séduisante des clivages politiques en France par la géographie. Apparemment l'auteur y tient, c'est peut-être pas si con: c'est amusant de penser que ces trésors de rhétorique, déployé sur le stub quand [login=modérateur] laisse pisser, ne tiennent qu'à des histoires familiales. Notons que le cas de l'Alsace (dépourvue de gauche, Tambow oblige) n'est pas vraiment traité.

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