Pourquoi ne pas voter Sarkozy? La preuve par sept!

05/05/2007 19:07
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Le Second tour des élections présidentielles sera un «débat entre deux idées de la nation, deux projets de société, deux systèmes de valeurs, deux conceptions de la politique». Comme l'a signalé Nicolas Sarkozy au soir du premier tour, les Français seront confrontés à un choix majeur le 6 mai 2007. Bien que la littérature anti-sarkozyste ne manque pas, que l'on me permette ici d'insister sur les motifs pour lesquelles les électeurs démocrates, quelque soit leur tendance politique, devraient à mon sens glisser un bulletin Ségolène Royal dans l'urne.

On le savait depuis plusieurs siècles, « diviser pour mieux régner » constitue l'une des bases de la politique. On croyait cependant que la formule se limitait à semer la division parmi ses adversaires, pas parmi les électeurs. Depuis son arrivée fracassante à la tête du Ministère de l'Intérieur, celui qui prétend « rassembler » au second tour multiplie les assimilations, catégorisations et divisions faciles. Il y eut par le passé les prostituées, tristes cibles du Ministre alors fraîchement nommé. Puis s'en suivi l'épisode « racailles » dont on allait « débarrasser » la France. Arrivèrent ensuite les émeutes de Décembre 2005, répercussion directe ou indirecte (qu'importe !) d'une politique visant à stigmatiser une partie des banlieues. Et puis, ce terrible appel lancé aux préfectures à « faire du chiffre » sur les expulsions, qui poussa nos administrations à se concentrer sur les roms, populations facilement expulsables car vivant en communauté. Un passage par le controversé « Ministère de l'Immigration et de l'Identité Nationale », dont on ignore encore, heureusement sans doutes, les fonctions autres qu'électoralistes, et Sarkozy d'annoncer qu'il est au service de « La France qui se lève tôt », comme si l'autre France, celle de l'assistanat, passait son temps devant la télé. Que les paroles qui lui furent rapportées suite aux évènements de la Gare du Nord (« Encore une ou deux émeutes comme celle là, et c'est plié ! ») aient été prononcés ou pas, on l'aura bien compris ; le candidat a instauré le préjugé, la stigmatisation malsaine et de la peur en ressorts du pouvoir : première raison de voter contre Nicolas Sarkozy.

Le candidat de l'UMP cultive ses amitiés avec les journalistes, ou plutôt avec ceux qui possèdent les médias de notre pays. Ayant pris Martin Bouygues (TF1) pour parrain de son fils, il est aussi l'un des grands amis d'Arnaud Lagardère (Paris-Match, Europe 1) ou Serge Dassault (Le Figaro). Ce qui ne l'empêche pas de pester en permanence contre les médias, avec une aptitude innée à transformer les critiques en menaces, et les menaces en exécution : mécontent d'une Une de Paris-MatchParis-Match montrant Cécilia dans les bras d'un autre, il obtient le licenciement du Directeur de la Rédaction Alain Genestar. A la mi-mars, il se lâche devant le personnel médusé de France 3, « Il faut virer la direction de France 3 ! Je ne peux pas le faire maintenant. Mais ils ne perdent rien pour attendre. Ça ne va pas tarder ! ». Effectivement, une fois élu, Sarkozy bénéficiera à la fois d'un contrôle direct ou indirect autant sur les chaînes de télévision publique que privées. Une situation totalement similaire à celle de Silvio BerlusconiBerlusconi, qui étendit son empire télévisuel aux chaînes publiques en accédant au pouvoir. Normal que dans ces conditions, ce dernier soutienne sa candidature : deuxième raison de voter contre Nicolas Sarkozy.

Nicolas Sarkozy est aussi un grand colérique. Tout ceux qui le connaissent de près, et veulent bien le rapporter dans les médias, convergent sur un point : le candidat est frustré par sa taille, malpoli et surtout avide de pouvoir. Face aux caméras de télévision, il s'efforce de se mettre sur la pointe des pieds, et ce malgré ses talons rembourrés. Il traite ses collaborateurs de « connards », utilise formules cyniques et menaces régulières à l'encontre de ses prétendus amis ou rivaux. Alors certes : à chacun ses frustrations, et l'on attendrait certainement pas d'un Président d'être parfait, tout comme on ne le jugerais pas par sa taille. Mais dès lors, les gaffes de Ségolène Royal ne valent-elles pas mieux que le caractère impulsif, menaçant et dangereux d'un Sarkozy, véritable Napoléon paumé au milieu du XXIème Siècle ? Troisième raison de voter contre Nicolas Sarkozy.

Se pose naturellement la question des rapports avec l'extrême droite. Sarkozy entends 'décomplexer' la droite, quitte à flirter avec les thèses du Front National. Après tout, déclare le candidat, quel est le mal à ramener dans le giron de l'UMP des électeurs, qui, auparavant, votaient pour Jean-Marie Le Pen ? « Ce que dit Le Pen n'est pas intouchable », dit en substance Nicolas Sarkozy. Effectivement, en droitisant son discours, le candidat peut se targuer d'avoir terrassé le vote FN, ce qui explique bien entendu son excellent score du premier tour. Mais au final, Le Pen a beau être le grand perdant du 22 avril, ses thèses, elles, semblent bien progresser, puisqu'elles sont partiellement reprises par le candidat du parti crée par Jacques Chirac, pourtant anti-frontisteanti-frontiste convaincu. Rien n'oblige les citoyens à accepter cette lepénisation des esprits, quand bien même celle-ci serait portée par un candidat démocratique : quatrième raison de voter contre Nicolas Sarkozy.

Le candidat de l'UMP prétend incarner une politique « nouvelle », aux antipodes de son rival et mentor Jacques Chirac. Ces dernières semaines, il n'a cessé de critiquer les « manoeuvres politiciennes » suite aux appels du pieds de Ségolène Royal vers François Bayrou, tout en s'assurant en sous main du soutien forcé des députés de l'UDF. Mais est-ce pour illustrer cette politique que les Renseignements Généraux ont enquêté successivement sur la famille, puis sur le patrimoine de Ségolène Royal ? Est-ce dans un esprit de transparence que le candidat de l'UMP fut incapable de convaincre dans ses réponses aux allégations du Canard Enchaîné sur son appartement de l'Ile de la Jatte ? Amitiés cultivées dans les milieux économiques et financiers, journalistiques, et juridiques : celui qui prépare depuis cinq ans sa campagne a su tisser son réseau. Bien loin de révolutionner la politique, Sarkozy sera l'homme qui perpétuera les relations incestueuses entre le privé et le public qui gangrènent la démocratie française, en véritable héritier du système Chirac : cinquième raison de voter contre Sarkozy.

En nous offrant ses pensées soi-disant philosophiques sur l'inné et l'acquis, le candidat de l'UMP a fait fort. La pédophilie aurait un caractère génétique, le candidat « inclin[ant] à penser qu'on naît pédophile ». Sarkozy aurait pu s'arrêter là, et reconnaître avoir été trop loin. Mais non, nous a-t-il déclaré, critiquant ces « tabous » qui hantent la société française : Mr. Sarkozy, au contraire aurait « ouvert un débat ». Mais quel débat s'agissait-il d'ouvrir, puisqu'un tel rapport génétique, aux antipodes de plus d'un siècle et demi de psychanalyse, n'a jamais été démontré scientifiquement, et qu'aucune découverte récente ne concourrait à ses dires ? Comme l'a si bien dit Jean-Marie Colombani, de deux choses l'une : soit Sarkozy est complètement ignorant sur le sujet, auquel cas il aurait mieux fait de se taire ; soit il est persuadé du bien-fondé de ce qu'il dit, auquel cas ses paroles sont pour le moins inquiétantes, sinon dramatiques : sixième de voter contre Nicolas Sarkozy.

Alors certes, on soulignera que Ségolène, elle-même, n'est pas à l'abri de toutes critiques. Une aptitude à gaffer, un ton souvent monocorde dans le discours, comme le soir du premier tour, une personnalité parfois détestable, une image travaillée par des communicants et un sourire aussi indécrottable qu'énervant. Mais ne nous trompons pas : cette candidate, avec ses imperfections, changera la politique : elle l'a montré par son ouverture au centre, sa rébellion contre les barons du PS, sa capacité à débattre et à apprendre au cours des débats. Cette femme est intègre, raisonnable, ouverte à la discussion, contre les préjugés et les critiques faciles : elle saura gouverner la France. Septième raison, au soir du 6 mai, de mettre un bulletin « Ségolène Royal » dans l'urne. Et renvoyer Nicolas Sarkozy en banlieue. A Neuilly, bien sûr !

Manu Brutin

Agora Vox, le média citoyen

Commentaires (17)

Flux RSS 17 messages · Premier message par rachmaninov · Dernier message par kellermann

  • Je pense voter Ségo, mais j'ai pas de drapeau français chez moi, alors suis un peu emmerdé :(
    Et puis j'aime pas la France fliquée... alors je pensais qu'avec elle on allait échapper à ça : raté, lors du débat elle a dit qu'elle voulait qu'il y ait plus de flic... Alors je suis perdu, tu comprends...

    Heureusement, elle va faire raccompagner toutes les fonctionnaires-femmes le soir en sortant du boulot, et ça je trouve que c'est vachement bien. Mettre des gardes du corps derrière chaque femme, c'est une super idée !! (+) (tain, si Sarko avait sorti une idée comme ça, j'imagine même pas le tollé contre le délire sécuritaire...)
  • Faire peur aux gens permet de leur faire faire n'importe quoi. La droite l'a tout à fait compris et ça ne date pas d'hier. Elle fait passer la pilule économique en faisant croire aux gens que les "barbares" sont à nos portes, près à égorger nos fils et nos compagnes.

    Comment veux-tu que la gauche ne prenne pas en compte la question de l'insécurité lorsque certains en font leur fond de commerce? Aujourd'hui c'est malheureusement devenu une demande de l'opinion publique (quelle horreur).
  • L'opinion publique n'a jamais réclamé des gardes du corps pour les femmes fonctionnaires qui rentrent le soir du boulot...
  • Attends, il est question des femmes policiers pas des secrétaires de marie et cela ne concerne que la nuit tard.

    Après, je t'avoue franchement que je m'en branle de ce détail. Ce qui est en jeu est bien plus important que cette histoire "abracadabrantesque" (Jaco) comme le changement du statut pénal du chef de l'Etat, l'abrogation du 49.3, la hausse des salaires etc.
  • Les boulettes de son candidat, on appelle ça des détails... Les boulettes de Sarko ne sont pas des détails par contre...
    Attention, je peux voter Ségo, sérieusement ! Je réclame juste un traitement identique et juste pour les 2 candidats dans les argumentaires !
  • Oui parfaitement, c'est un détail. Après, de là à dire que c'est une boulette ça n'engage que toi. Pour ma part, je n'en suis pas persuadé.

    Et puis, ton vote tu peux le mettre au cul parce que franchement t'es un bon casse-couilles. Même avec des gants tu ne voterais pas Ségo ma gueule alors pas la peine de palabrer davantage.
  • "Exsangue" de toutes critique...merde les gars, faisez gaffe !
  • Oui c'est très maladroit comme expression. Dans ma précipitation je ne l'ai même pas relevée.

    Voici ce que l'auteur aurait dû écrire : "Alors certes, on soulignera que Ségolène, elle-même, n'est pas à l'abri de toutes critiques."
  • Si tu veux pas débattre, ferme le billet aux commentaires, je ne vois pas ce que j'ai fait pour mériter de me faire insulter, à part discuter. Mais peut-être fallait-il que je sois d'accord avec toi en tous points, que j'encense ton copier-coller. Je m'excuse d'avoir eu l'outrecuidance de formuler quelques critiques.

    Quant à ce que je vais voter, t'es très mal placé pour le savoir, donc tes préjugés à ce propos, tu peux te les mettre au cul. (Je ne fais que reprendre ta rhétorique, ne sois pas vexé)
  • Ton verbiage n'est que de la rhétorique de petit bistrot. Débattre avec toi n'est pas constructif, désolé. Si tu t'intéressais aux mesures phares proposées par les deux candidats, aux deux choix de société qui s'offrent à nous, je n'aurais rien à faire d'autre à faire que d'essayer de te contredire (si cela se justifie bien évidemment). Mais bien au contraire, tu t'attardes à des éléments secondaires et sans importance !

    Au lieu de me reprocher à tort de ne pas accepter la contradiction, essaie de d'avoir des propos plus argumentés et plus pertinents ainsi nous pourrons échanger en toute intelligence.

    Pas de souci, je ne suis pas vexé au contraire je m'amuse beaucoup.

    En attendant de pleurer ce soir, mais là c'est une autre histoire...
  • Avoir un débat construit, je ne demande que ça. Mais qui, de nous deux, a commencé à traiter l'autre de "casse-couille et à parler de vote à se "foutre au cul" ?
    Ce n'est pas moi qui ai perdu mon sang froid en l'occurrence.
  • L'herbe est si verte dans le pré où paissent les moutons.
  • "Ton vote tu peux le mettre au cul parce que franchement t'es un bon casse-couilles. Même avec des gants tu ne voterais pas Ségo ma gueule alors pas la peine de palabrer davantage."

    Ce commentaire fait perdre absolument tous crédit à ta démonstation. Au delà des leçons de tolérence et de morale, il y a une valeur à laquelle je suis profondement attaché, c'est le respect de l'autre. Absolument rien ne justifie que tu parles de cette manière à Rachmaninov!

    Je respecte tes convictions. Ton comportement est par contre à vomir, et ne fait guére honneur à la candidate que tu soutiens...
  • Tout au plus, mes propos sont grossiers...

    Je les revendique un brin moqueurs et volontairement provocateurs car je voulu piquer au vif mon détracteur.

    Cependant, M. le Redresseur de Tort vous me voyez bien désolé que ceux-ci vous provoquassent quelques ennuis gastriques.
  • A quand un billet sur "les raisons profondes de la défaite"? J'ai un peu suivi les propos des deux camps, et il me semble que les déclarations de Mme Royal à l'issue du scrutin s'opposent aux réctions plus ou moins virulentes de M.Fabius, M. Strauss-Kahn et consorts. Même M. Hollande n'a pas pu s'empêcher d'émettre des critiques, à mon goût inappropriées, alors que la candidate socialiste avait fait l'unanimité chez les militants lors de son investiture, puis fut soutenue par un mouvement populaire extraordinaire durant la campagne électorale.

    J'ai trouvé ces paroles bien éloignées des valeurs de "rassemblement" prônées par Mme Royal. Force est de constater que M. Sarkosy a gagné les élections car il a su rassembler, avec un parti qui l'a soutenu depuis le début de la campagne, ce que le PS n'a pas su faire. On ne peut rien reprocher à Mme Royal qui a mené une campagne honorable, mais les réactions à chaud de certains éléphants du PS montrent bien que leur soutien à la candidate n'était qu'un apparat qui s'est vite dissout à l'issue du scrutin. Une attitude excécrable.

    Je suis vraiment déçu pour tous ceux qui ont adhéré au projet de société du Parti Socialiste, alors que ses principaux dirigeants n'ont été que des soutiens d'occasion pour Mme Royal.
  • Je souscrits à ton analyse.
  • Une psychanalyse de Nicolas Sarkozy par Gérard Miller

    Une explication entre les lignes du discours de Nicolas Sarkozy. Comprenne qui peut encore se servir de son esprit "critique"...

    http://www.dailymotion.com/video/x1vfyt_gerard-miller-analyse-sarkozy

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