"Fautes graves", ou la vérité oubliée en chemin

06/11/2009 15:28
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Le récent livre de Gilbert Gress est truffé de contre-vérités, de caricatures, de faits ou de propos déformés. Florilège.
L'une des lignes de défense principales de Gilbert Gress dans son ouvrage Fautes graves, Un été d'enfer à la Meinau (Editions du boulevard, 95 p., 9,90 €;) consiste à dire que les médias - presque tous ligués contre lui - ont menti. D'où la volonté de donner "sa version". Dommage que, dans cette quête éperdue de vérité, Gilbert Gress se sente obligé d'oublier certains faits en route et d'en maltraiter d'autres. Le lecteur trouvera ci-dessous une liste - non exhaustive - d'affirmations discutables ou carrément fausses que l'on peut relever dans l'ouvrage sus-cité.

http://www.editionsduboulevard.fr/images/stories/editions/couv-de...
J'avais déjà dit pas mal de conneries, mais il en reste


* p.19, à propos du dernier match de la saison 2008/2009 à Montpellier : "L'Alsace est devant son poste, inquiète. Son Racing est en danger : rester une année de plus en Ligue 2 serait une catastrophe. Son Racing ? A cet instant le club n'est plus le Racing de personne". Personne, réellement ? Quid des 500 supporters environ qui ont fait le déplacement un vendredi à l'autre bout de la France pour soutenir leur équipe ? Une telle mobilisation à l'extérieur est pourtant rare, hors finales de coupe.

* p.35, à propos de la tentative de renouveler le contrat James Fanchone : "Le joueur est sorti du bureau en disant qu'il ne remettrait plus les pieds ici, qu'il se souviendrait de la façon avec laquelle il avait été traité. Peu de temps après, il a signé à Lorient". D'après L'Alsace, la rencontre a eu lieu le 13 juillet. Fanchone a signé à Lorient le 29, plus de deux semaines plus tard, délai important en période de mercato pour un joueur libre. "Peu de temps", vraiment ?

* p.42 : "Quant à Cassard et Lacour, qui sont de grands professionnels, je n'ai jamais rencontré le moindre problème avec eux". Il y a pourtant eu au moins un accrochage, bénin certes, avec Lacour, lors d'un match contre Evian-Thonon-Gaillard quand le capitaine, agacé, a dit à Gress : "Cessez maintenant et laissez-nous jouer". Cette scène a été rapportée par la presse mais aussi par de simples spectateurs qui ont assisté au match. Beaucoup de suiveurs ont noté qu'un tel écart était inhabituel chez Lacour.

* p. 42 : "Avec les grands pros, les champions, je n'ai jamais connu de difficultés". Frank Leboeuf n'est pas un "grand pro" et un"champion" ? Il a pourtant remporté la coupe du monde et ses relations avec Gress furent notoirement difficiles. Parmi les récits des champions de 1979 interrogés pour le récent hors-série des DNA, on retrouve également ça et là des traces de conflit avec l'entraîneur : "prises de bec" avec Domenech (p. 41), "cassure" à propos de l'absence de fête suite au titre chez Piasecki (p. 43), ressentiment chez Duguépéroux, privé de cadeau et de bouquet pour son dernier match à la Meinau (p.46), etc. "Jamais" de difficultés, vraiment ?

* p. 45, à propos de Jean-Alain Fanchone : "On m'a confié récemment qu'il avait un sosie et que ce même sosie se trouvait à deux heures du matin, la veille du match, dans une discothèque près d'Erstein..." Un sosie ? Il s'agit au mieux d'une figure de style malheureuse. Soyons sérieux : soit l'auteur est sûr de ses informations et il accuse sans détour, soit il ne l'est pas et alors il se tait. Mais ce genre de formulation insidieuse relève davantage de la calomnie, que Gress entend pourtant dénoncer.

* p. 47 : "Il est toujours possible d'incriminer les joueurs et les entraîneurs quand la machine ne fonctionne pas. Mais quand ils sont régulièrement remplacés à un rythme record - comme c'est le cas au Racing depuis quatre ans - il faut peut-être chercher la cause des problèmes ailleurs que dans le domaine sportif". Ces remplacements réguliers ne datent pas des quatre dernières années, loin s'en faut. Ils sont une constante dans l'histoire du Racing et l'instabilité existait déjà du temps où Gress était joueur. Le "record" de changements d'entraîneurs n'appartient d'ailleurs pas à la période récente mais date de la saison 1970/1971 : Frantz puis Mateo puis Csnakady puis Frantz. Rien de bien nouveau sous le soleil, contrairement à ce que suggère Gress.

* p.54 "Calomniez, calomniez... disait Beaumarchais, il en restera toujours quelque chose". Comme beaucoup de gens, Gress tombe dans le panneau du cliché. La citation est de Bacon, pas de Beaumarchais.

* p. 56 "Pour certains journalistes , le retour de Gress et sa "préparation" expliquent à eux seuls les raisons d'une telle descente aux enfers". On passera sur la lourdeur stylistique pour se concentrer sur l'approximation du propos. Y-a-t-il vraiment un seul journaliste qui a écrit que la préparation était seule en cause dans l'échec du début de saison ? Qui ? Gress ne le dit pas. Peut être tout simplement parce que ça n'est pas le cas.

* p. 57 : "Aujourd'hui, on prétend que les compétitions demandent encore plus de condition physique, car le jeu est devenu plus rapide, plus athlétique. Alors comment pourrait-on y parvenir en s'entraînant moins ?" La simplification est ici abusive. On pourrait simplement rétorquer à Gress que l'équation "plus d'entraînement = une meilleure condition physique" ne se vérifie pas non plus. Si la matière était aussi simple, n'importe qui pourrait s'improviser entraîneur de haut niveau.

* p.74, à propos de ses déclarations suite au match de Châteauroux, concernant Paisley et Ginestet : "Je n'ai fait que répéter ce que j'avais dit deux semaines auparavant". Gress avait effectivement évoqué l'affaire dès le 1er août mais sans nommer personne ("un joueur", "quelqu'un"). Après Châteauroux, la mise en cause est directe et concerne des personnes identifiées, ce qui fait tout de même une nette différence. On ne peut donc parler de "répétition".

* p. 75, le récit de la rencontre avec Paisley : "J'en ai profité pour lui demander de venir dans mon bureau. Je l'ai regardé droit dans les yeux et je lui ai posé cette question : "Vous a-t-on demandé de me salir dans la presse ?" Sa réponse a été sans équivoque. Paisley est un homme honnête, intègre." Une réponse "sans équivoque" mais que Gilbert Gress ne nous donne pas ! Le 1er août il avait pourtant été moins cachotier. D'après lui le joueur - alors non nommé - aurait reconnu sans ambages que "oui" on lui avait demandé de casser. La subite timidité de Gress s'explique peut-être par le fait que le 9 août l'agent de Paisley a déclaré : "Il y a eu une discussion entre Grégory et Monsieur Gress, explique-t-il. Gress lui a demandé : « vous a-t-on demandé de vous payer l'entraîneur ? » Grégory lui a répondu : « l'ai-je fait ? » Si on lui avait demandé de le faire pour partir, il l'aurait fait. On ne lui a simplement pas demandé." (DNA, 9 août). Paisley a donc démenti Gress et, du coup, Gress semble moins sûr.

* p. 87 : "Emil Gargorov est revenu après cinq semaines de vacances avec une journée de retard. Je lui ai demandé des explications. Peu satisfait de sa réponse, je n'ai pas pris de gants pour lui signifier que les choses ne pouvaient pas se passer comme ça avec moi". Gress maltraite la chronologie. Dans les faits, il a publiquement fustigé le joueur avant que celui-ci arrive même à Strasbourg et donc avant qu'il ait pu fournir des explications.

* p.91, à propos d'un article des DNA : "En vérité, je n'étais pas "lâché" par le grand public". Comment Gilbert Gress peut-il le savoir ? Comment juger l'attitude du "grand public" ? En tous cas, la manifestation devant le stade, annoncée dans la presse, pour protester contre son éviction a attiré moins de manifestants que de policiers.


Gilbert Gress se plaint à plusieurs reprises dans son ouvrage de voir ses propos et actes déformés. C'est peut-être bien le cas, mais cela ne l'autorise pas à céder à son tour à ce type de tactique.

Commentaires (6)

Flux RSS 6 messages · Premier message par iuliu68 · Dernier message par roquettesyntaxe

  • triste triste sortie de piste pour celui qui restera comme l'un de ceux qui a le plus fait rêver les supporteurs du Racing...
  • La-Une ! La-Une !
  • Je sais pas si ça compte comme un accrochage, mais quand même... source, les niktout de la LAFA :

    Stéphane Cassard par exemple, pas la peine de lui demander son avis. Le gardien strasbourgeois, marqué, ne compte pas ressasser l'une de ses plus belles mésaventures en dix-huit ans de carrière. S'il fallait être de l'intérieur pour le comprendre vraiment, pouvoir en juger, cette préparation 2009-2010, d'après l'ensemble des témoignages recueillis au fil de l'été, convergent tous vers le même constat : le calvaire.
  • Pour la p.57, tu pourrais ajouter aussi que plusieurs joueurs (Ducrocq au moins, Bellaïd aussi je crois) n'ont pas mis en cause la charge du travail, mais sa nature.
  • Effectivement, c'est encore une caricature de GG.

    Il y en a tellement...
  • Bellaid est arrivé bien après le départ de GG, Zottel. Pour Ducrocq c'est vrai qu'il s'est répandu dans la presse dès les premiers jours de la préparation avec des insinuation lourdes de sens.

    GG est assurément de mauvaise foi mais vu le niveau pathétique de la bande de buses qu'il avait sous ses ordres cet été, franchement, Capello et Trappatoni réunis n'en auraient pas fait autre chose que des relégables.

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