Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Lens - RCS : une valse à trois temps

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5.0 / 5 (4 notes)
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Après-match
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Par knack90
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Après une fin d’année en pleine forme et un mercato hivernal d’ajustement (dans le sens où le Racing était bien ajusté dans la ligne de mire du foot business), la reprise de la Ligue 1 « travailleurs précaires » a été bien plus difficile pour les Bleus. Nuls à Marseille et Clermont, défaite au Parc et un effectif décimé avec des matchs qui s’enchaînent tous les 3 jours... Pas la meilleure manière d’aborder un déplacement à la Pierre Bachelet Arena de Lens. Nouvelle année, nouvelle dynamique, nouveau format des analyses « tactiques ».

La présentation du match

Date et lieu du match : 10.02.24 – Stade France Travail de Lens – 17:00
Compétition : 21ème journée de Ligue 1
Classement de Lens avant cette journée : 6ème avec 32pts
Classement du Racing avant cette journée : 10ème avec 25pts

Les compositions initiales

Le RC Lens de Franck Haise :
Equipe


Absents : Cabot et Machado (blessures), Thomasson (trop mauvais en ce moment)

Pas de surprise avec l’équipe artésienne, un 3-4-2-1 qui fait ses preuves depuis trois saisons. Le RC Lens s’appuie toujours sur son point fort : un schéma tactique composé de triangles multiples dont l’animation est l’une des plus fluide du championnat.

Le Racing de Patrick Vieira :
Equipe


Absents : Doukouré, Mothiba, Sebas, Gameiro, Fila, Ângelo (blessures), Prcic et Ahoulou (les Loana et Jean-Edouard du Loft), Sels (la grosse moula pour lui et le club – cf « mercato d’ajustement » pré-cité)

Côté alsacien, le coach insiste, malgré les nombreuses absences, avec son schéma qui fonctionne plutôt bien depuis deux mois : 4-3-3 « pointe basse » qui évolue parfois en 4-4-2 en phases défensives.
Concernant le choix des hommes, pas vraiment de choix en réalité.
La seule question qui pouvait se poser, une fois le schéma en 4-3-3 maintenus, étant de savoir qui de Thomas Delaine ou Marvin Senaya allait devoir jouer plus haut sur le terrain. C’est finalement l’ancien joueur du PFC, « qui a été jardinier avant d’être footballeur pro » #jesuisRobertMalm, qui jouera ailier gauche.
En même temps, c’était ça où revoir Jessy Deminguet (ou ma grand-mère) sur le terrain.

Le scénario du match

Début de match à l’avantage des locaux. Possession de balle et occupation du terrain à leur avantage. Les Strasbourgeois semblent complètement désorganisés, notamment sur leur flanc gauche où le duo Guilbert/Delaine regarde passer les attaquants lensois comme des vaches regardent passer les trains.
Au milieu, Sissoko est invisible et le duo Mwanga/Diarra semble continuellement à contre-temps sur le pressing.
Résultat, deux fixations côté gauche, des appels nordistes bien coordonnés et des courses directes, plein axes, et finalement deux buts dans la musette alsacienne (Wahi 16ème et Pereira Da Costa 30ème) .

Après ce deuxième but, changement de schéma tactique du Racing, avec un passage en 5-3-2 où Frédéric Guilbert s’intègre à la ligne défensive et où Dilane Bawka se réaxe sur le papier mais dispose d’une réelle liberté de déplacement.

Equipe


Les débats se rééquilibrent alors. Les Bleus semblent mieux organisés et ferment mieux les espaces dans leur zone défensive, permettant à leur trio médian de refaire surface, de récupérer plus de ballons et d’initier des actions de transition qui finiront par aboutir à un but chanceux, mais néanmoins mérité pour le Racing, par l’intermédiaire de Thomas Delaine (40ème).

2-1 à la mi-temps.
L’occasion de se chercher une boisson fraîche au frigo pour s’éviter le traditionnel karaoké géant de Bollaert. D’ailleurs, je me demande si, pour rendre la chose encore plus magnifique, les supporters lensois ne pourraient pas se mettre une lampe de mineur dans le fondement. Le côté « sons et lumières » pourrait concurrencer celui du Puy-du-Fou.

Début de seconde mi-temps dans la continuité de la fin de la première, avec un match très équilibré dont on a l’impression qu’il pourrait basculer d’un côté comme de l’autre. Une erreur d’Abakar Sylla, bien exploitée par l’intenable (et insupportable) Florian Sotoca (58ème) viendra quasiment mettre fin au suspens, cela malgré une fin de match où les Alsaciens multiplieront les tentatives (11 tirs dans la dernière demi-heure) face à une équipe lensoise beaucoup plus prudente.

Au final 3-1, un match en trois temps : un naufrage dans les 30 premières minutes, une remise à flot dans la demi-heure suivante, et un sabordage à la 60ème pour finir de couler le navire.

Le point tactique

Alors, je ne vais pas y aller par quatre chemins. Patrick Vieira n’a pas fait le bon choix dans le schéma tactique initial proposé face à cette équipe nordiste. Il est, à mon sens, le principal responsable du naufrage collectif auquel on a assisté durant les 30 premières minutes du match et jusqu’au deuxième but des Sangs et Or, et par conséquent de la défaite finale.

Je l’écris d’autant plus facilement que j’aurais aligné exactement la même équipe, avec le même schéma et la même composition, si j’étais à sa place. Force est de constater, résultat à l’appui, que c’était un mauvais choix.

Comment notre bloc défensif, et notamment notre trio du milieu, a pu être aussi désorganisé et facilement transpercé pendant ces 30 premières minutes ? Pourquoi, devant notre télévision (et certainement encore plus au stade), avons-nous eu cette désagréable impression que nos joueurs courraient partout et nulle part à la fois ? Peut-être un coup de génie tactique de Franck Haise, qui aurait décelé une faille dans le Patoche Project ?

Après coup (c’est toujours plus facile), je crois que, simplement, chaque équipe a voulu jouer son jeu et que le point fort des Lensois correspondait, en miroir, au point faible strasbourgeois. En déroulant son jeu habituel, le RCL a appuyé là où ça mal chez nos Bleus.

Ce point, c’est la gestion de la largeur.

J’en avais déjà parlé dans l’analyse du match « aller » mais le schéma lensois et la coordination entre les mouvements des attaquants de soutien (Sotoca à droite et Pereira Da Costa à gauche) avec ceux des pistons et des stoppeurs (Gradit à droite et Médina à gauche), en font la meilleure équipe (à mon avis) du championnat dans l’occupation et la gestion des espaces, notamment dans la largeur.

Sur le schéma théorique, Sotoca, Pereira Da Costa, Gradit et Médina sont des joueurs axiaux, occupants les demi-couloirs axe-droit et axe-gauche. Mais en phase de possession lensoise, la donne change.
Si le ballon est côté droit par exemple, Gradit évolue comme un arrière droit (attention, pas un latéral) et Sotoca comme un ailier. Combiné à la présence du piston (à l’extérieur ou à l’intérieur selon la position des deux autres joueurs), cela permet aux artésiens d’être continuellement en surnombre « côté ballon ». Ainsi, on notera une position moyenne de Sotoca et Pereira Da Costa, plus intérieure que celle des pistons (notamment en raison du replacement défensif et de leur position au départ des actions) mais une « heat map » laissant entrevoir une forte activité le long des lignes de touche (illustration de leur propension à dézoner constamment).
Dans certains cas (transition rapide ou après un CPA), c’est un milieu axial, l’ailier opposé ou le 9 qui peut venir faire le troisième si nécessaire. Après, tout est une affaire de compensation.

De cette manière, Lens fixe la défense adverse sur un côté, oblige à multiplier les permutations entre joueurs de couloir adverses. Ils attendent ensuite qu’un défenseur ou un milieu défensif adverse viennent compenser le sous-nombre de son équipe et étire, de fait, son bloc dans la largeur (et parfois la profondeur). À cet instant, comme un ressort qu’on étire, les intervalles entre les anneaux (les défenseurs) s’agrandissent.
Lens attaque alors les zones libres, par des courses directes, parfois « plein axe ».

Par exemple, dans le cas du 1er but, c'est Guilbert qui "sort" pour compenser l'absence d'opposition à Sotoca et ouvre dans son dos, l'espace qu'attaquera Pereira Da Costa. (visible entre les secondes 0:28 et 0:31 du résumé LFP)

https://i.imgur.com/iaMBkVI.png

Le passage à cinq joueurs sur la ligne arrière, décidé beaucoup trop tard à mon sens par Patrick Vieira, permettra de corriger ce problème en disposant un joueur alsacien dans chacun des cinq demi-couloirs et d’éviter ces compensations génératrices d’intervalles. Face à un bloc plus dense dans la largeur et l’absence de « zones libres » évidentes, le jeu lensois c’est alors beaucoup ralenti, permettant à nos trois milieux, constamment en retard durant la première demi-heure, de créer des zones de duels et de récupérer des ballons.

Des observations personnelles en vrac


  • depuis le match aller face à Lens, Patrick Vieira a construit son plan de jeu, étape par étape. La prochaine me paraît évidente : une progression sur l’occupation de la largeur en phase défensive.Nous sommes régulièrement en difficulté quand une équipe arrive à nous fixer sur les côtés et parvient à contourner le triangle Diarra/Mwanga/Sissoko : Marseille en première mi-temps à la Meinau, Lille idem, à Reims... les exemples sont nombreux.
  • Frédéric Guilbert sur son pied droit (en latéral ou même en central), c’est un très bon joueur de Ligue 1. A gauche, il devient sans grande plus-value.
  • j’ai toujours cru que Thomas Delaine était un ailier qui jouait arrière gauche. En fait, ce n’est pas non plus un ailier gauche. En fait, c’est exclusivement un piston. Donc, si on ne joue pas à cinq derrière…
  • pour les deux observations précédentes, le poste d’arrière gauche doit vraiment être LA priorité absolue de cet été.
  • Ibrahima Sissoko, c'est Alou Diarra 2.0 (ou Christian Bassila 3.0). Si, on parvient à orienter les milieux adverses dans sa zone d'intervention, il leur marche dessus. Si l'adversaire l'oblige à dé-zoner , il a l'utilité de Matthieu Dreyer dans un effectif pro en 2024.
  • on a gagné au xG (1,89 contre 1,57), on a tiré deux fois plus que les locaux (19 tirs à 10), on a fait jeu égal dans la possession, le nombre de passes et dans les duels. Donc, soit on est Belges #RadioStub, soit on méritait mieux.


Et maintenant ?


On espère (ré)intégrer des solutions supplémentaires au milieu et en attaque pour pouvoir préparer au mieux les deux prochaines échéances en championnat à la Meinau (Lorient et Brest), qui seront, à mon avis, déterminantes pour la dynamique de fin de saison.
Alors, fin de championnat en claquettes à regarder nos jeunes pousses prendre du temps de jeu (et de la valeur marchande) ou retour à la course au maintien où notre manque d’expérience pourrait s’avérer préjudiciable ? Réponse d’ici 10 jours.

knack90

Commentaires (3)

Flux RSS 3 messages · Premier message par superdou · Dernier message par mouloungoal

  • Analyse très intéressante, comme toujours.
    Ce match prouve encore une fois les lacunes tactiques et de préparation des matchs de notre entraîneur, qui est plus un formateur qu'un entraîneur.
    Là où ses prédécesseurs, que ce soient Antonetti, Stephan ou surtout Laurey, maître en la matière, savaient préparer un schéma tactique permettant de bloquer les points forts adverses tout en mettant en avant nos points forts, Vieira se fait régulièrement battre tactiquement. Cela est normal si l'adversaire a préparé son coup. Cela l'est beaucoup moins si l'adversaire joue simplement son jeu habituel, et c'était le cas de Lens. Une bonne préparation tactique en amont de ce match, surtout avec les absences, aurait permis dès le départ de modifier le schéma tactique pour à la fois bloquer Lens et mettre une composition avec des joueurs à leur poste. Sow étant disponible, un 5-3-2 ou 5-4-1 comme évoqué par plusieurs journalistes ou stubistes aurait probablement évité cette première demi heure catastrophique.
  • @superdou

    Alors... non.
    Vieira n'a pas fait le bon choix et il est sûrement le principal responsable de la défaite.
    Mais en aucun cas, cela signifie que lui et son staff sont des incompétents ou qu'ils ne préparent pas leurs rencontres.
    D'ailleurs, en début de saison, la période de stagnation du niveau de jeu coïncide plutôt avec une période de suradaptation tactique à l'adversaire. On se souvient tous des postes "hybrides" de Doukouré face à Lens à l'aller ou le rôle de piston/relayeur de Senaya contre Nantes.
    Vieira a fait sans doute surévalué la capacité de son milieu de terrain a couvrir le terrain d'un demi-couloir à l'autre, mais de là a en profiter pour en faire un mix entre un incapable et un fainéant c'est juste malhonnête.
  • Citation:
    mais de là a en profiter pour en faire un mix entre un incapable et un fainéant c'est juste malhonnête.
    Tu découvres @superdou?

    Merci pour l'article. Je retiens qu'on perd dans un match sans "chance", mais pas sans occasions et sans envie, comme en témoignent les xG. Un match à oublier rapidement, il y aura des jours meilleurs.

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