sous leurs paupières
baignées d'ombre de brume
Le jour ils ont les yeux ouverts
rêvant avec le ciel nomade
les migrations les Désirades
Mais dans le lourd sommeil des vases
l'envers hanté sous leurs yeux clos
fermentent les métamorphoses
Les feux follets de l'eau profonde
remontent courir dans la nuit
Et des grottes vertes d'attente
sortent des racines-serpentes
qui s'enroulent autour des arbres blanchis
Et du haut du saut du chevreuil
dans ce bruissement de légende
de la secréte Quénécan*
on voit luire perdues dans le vent
leurs grandes pupilles pâles
comme des regards de clairière
dont on ne voit jamais le fond.
On s'approchait pourtant du bord
sans voir où passe la lisière
A peine un clapotis d'oiseau
aux cils des herbes et des joncs
Glissade d'insectes ou d'aiguilles
On reste là comme un roseau
Et le temps, immobile, brille..."
Jacqueline Saint-Jean, "Entre lune et loup"

*Quénécan est une forêt bretonne...