Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Kenny, vidi, gâchis

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Par louky
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© Le Dijon Show

Il est venu, il a vu, il a convaincu. Entre 2017 et 2019, Kenny Lala a mis la Gaule à genoux, arpentant son couloir droit en conquérant. Las, depuis, sa folie des grandeurs n’a eu d’égale que sa nonchalance. Ou comment le latéral, taillé pour l’Europe, s’est mué en joueur quelconque errant.

Cette fois-ci, la feinte a pris. En ce vendredi 29 janvier 2021, supporters et suiveurs assidus du Racing ont tous été décontenancés par ce mouvement chaloupé de Kenny Lala, dit de « la danse du mercato », qui consiste à se frotter le talon avant de se frotter les mains. Il aura donc fallu trois ans et demi pour voir le latéral droit quitter la Meinau et - enfin - s’envoler vers d’autres cieux. Vers l’Olympe, plus précisément. Le royaume des dieux, où Kenny, qui a une croyance indéfectible en lui-même, ne fera pas tâche. Le voici donc en route pour le Pirée et, souhaitons-lui, pour le meilleur.

Au Racing, le meilleur, Kenny Lala l’a assurément été. Sur le terrain en tout cas. A son arrivée en août 2017 en provenance de l’autre Racing, le latéral droit fait rapidement montre de toutes les qualités que l’on lui connaît lorsqu’il est impliqué mentalement : tranchant en défense, diablement efficace en attaque. Véritable athlète, rarement blessé, capable de jouer sur le flanc gauche de la défense, le natif de Villepinte a le profil du latéral idéal dans le foot moderne. Lors de ce cru 2017-2018, il reste également comme celui qui a eu la lucidité, au moment fatidique, de laisser le coup-franc décisif à son compère Dimitri Liénard.

Pendant quatre mois, la Ligue 1, c’est Lala-land


Valeur sûre d’un effectif en manque de taulier, Kenny Lala prend une nouvelle dimension dès sa deuxième saison en bleu. Au sein d’une équipe considérablement renforcée (Sels, Ajorque, Thomasson, Mitrovic…), il met un mois et demi à trouver son rythme de croisière : celui d’un bolide lancé à toute vitesse vers l’Europe.

C’est simple : après son match incroyable face à la bête noire amiénoise, fin septembre 2018, le latéral est irrésistible. Dans son sillage, c’est tout un peuple qui se prend à rêver. Quatre mois durant, la Ligue 1, c’est Lala-Land. Les suiveurs du championnat ne s’y trompent pas, puisque le défenseur est élu « Joueur du mois » en décembre 2019. Une récompense largement méritée à l’époque, tant le latéral savate à lui tout seul - ou presque - des clubs tels que Monaco, Rennes ou Bordeaux.

Point d’orgue de cette période de grâce : une demi-finale de coupe de la ligue dans le volcan du Krimmeri que Lala survolera allègrement en compagnie d’un autre Racingmen alors en feu, Ludo Ajorque. Des performances XXL qui en feront un temps le défenseur le plus décisif d’Europe. Plus fou encore : en l’absence de titulaire incontournable à son poste, Kenny Lala est même pressenti pour être appelé en équipe de France. La hype l’envoie à Arsenal, Manchester City ou au PSG. En attendant le prochain mercato estival censé être décisif pour sa carrière, Lala prolonge son contrat au Racing jusqu’en juin 2021 avec l’assurance d’un bon de sortie promis par le président Keller.

Mais qui a tué Kenny ?


Fort logiquement, la suite aurait dû s’écrire ailleurs pour celui qui a grandement contribué au retour de Strasbourg en coupe d’Europe. Au final, que nenni. La faute à qui ? A l’époque, les responsabilités semblent partagées entre un latéral qui vise peut-être trop haut et un président Keller qui souhaite beaucoup trop gros. Dans les faits, cela fait plusieurs mois déjà que Lala n’est plus que l’ombre de lui-même. A Nice, en mars 2019, sous les yeux de Didier Deschamps venu le superviser, le latéral se noie et livre une prestation indigente qui lui ferme probablement définitivement les portes de la sélection. Un premier coup dur qui a forcément un impact sur sa fin de saison, en roue libre, à l’image de ses coéquipiers.

Une certitude : dans sa tête, Kenny n’est plus là. A la reprise, les prestations du latéral oscillent entre le moyen et le carrément inquiétant. Lala traîne ostensiblement sa nonchalance et son spleen sur son flanc droit où Thierry Laurey persiste à le titulariser. Il faudra un électrochoc, et un passage sur le banc face à Nice - où il sera remplacé par un certain Momo Simakan- pour le remobiliser très légèrement. Dans son attitude, le message est clair : Kenny fera le job, mais ça s’arrête là. Preuve en est des stats en chute libre (5 buts et 9 passes décisives en 2018-2019, 2 buts et 1 passe décisives en 2019-2020). Et pas sûr qu’il aurait fait mieux si la saison s’était prolongée jusqu’à son terme.

Foutues sirènes


Au fond, Kenny ne peut s’en prendre qu’à lui-même. Chose qu’il semble malheureusement peu enclin à faire, plongeant dans une forme de déni. A force de se croire trop fort pour le Racing, Lala est devenu sa propre caricature, enchaînant dribbles vains, mauvais choix et replacements défensifs aléatoires, pour ne pas dire inexistants. C’est tout le paradoxe de celui qui est probablement le meilleur joueur de champ du Racing au XXIe siècle - au point de revêtir le n°10 sans que personne n’ait trop rien à redire - : un gars à la foi en lui aussi inébranlable que son mental est friable. Digérer les déceptions pour revenir plus fort, c’est la marque des champions. Certains en sont capables (Momo Simakan, si tu nous lis), d’autres non.

Chez les supporters aussi, le Francilien laissera une empreinte contrastée. D’abord adulé, Lala a progressivement ébréché la franche unanimité qui régnait à son égard. Récemment, certains sur les réseaux sociaux ne cachaient plus leur ras-le-bol, l’incitant en des termes parfois peu fleuris à aller se faire voir chez les Grecs. Prophétie auto-réalisatrice, puisque le latéral s’apprête à signer à l’Olympiakos, chez le leader du championnat hélène. L’occasion pour lui de retrouver l’Europe au milieu d’anciennes gloires (Valbuena, M’vila) et le Racing de récupérer quelques deniers, malgré tout.

Ainsi s’achève l’épopée de Lala en bleu. Des souvenirs grandioses, des rencontres épiques et, pourtant, le sentiment d’un inexorable gâchis. Peut-être parce que, dans l’Odyssée de Kenny, cela fait longtemps que les sirènes ont gagné.

louky

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