Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Final countdown

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© denisub90

J-2, J -1, H-5, H-4... Le compte à rebours final de RCS-Bayonne a marqué toute cette semaine au fer rouge. Dans d'autres clubs, ce décompte annonce en général un moment d'exception. Chez nous c'est l'extrême onction.

We're leaving together...


D'habitude, il faut subir les railleries sur le Racing des amis, parfois de la famille, plus souvent des collègues, et de manière générale des gens qui ne vivent le foot par le fast-food cathodique de la ligue des champions ou de Téléfoot. Cette semaine, les chambreurs ont changé d'attitude et de regard. Cette semaine on a lu les journaux. Cette semaine on me demande ce qui se passe au Racing et on se soucie de savoir s'il n'y a rien qui peut être fait pour changer la situation. Cette semaine, on me demande si je vais bien. Finalement, je me dis que les railleries avaient du bon, elles étaient la preuve infâme que tout allait bien au Racing, et qu'il était encore vivant.


But still it's farewell...


Aujourd'hui, c'est D-Day, le Dernier jour. Au boulot, je n'ai cessé de me faire violer par des souvenirs du Racing, si bons qu'ils en étaient douloureux : RCS-Rennes et Keshi, la Coupe de la Ligue 1997 et Stéphane Collet, Liverpool et Zitelli, Inter et Ismaël, ainsi que tous les autres couples moins prestigieux mais qu'on se régale de ressasser autour d'une bière d'après-match tels que Besançon et le but de Rouxel ou Lille et le quadruplé de Nouma. Et j'ai le coeur qui me pince, sans doute pour me rappeler que je ne rêve malheureusement pas.

Ce soir, je me prépare pour le match comme d'habitude, ou presque. Je mets un t-shirt bleu conformément à l'appel des supporters. Bleu, la couleur de l'espoir, l'espoir c'est beau mais, comme dirait l'autre, c'est quand il y en a beaucoup que ça peut poser problème. Je fouille dans mon bazar d'écharpes pour chercher la plus belle d'entre elle afin de bien présenter à l'enterrement. Un peu comme une fille le matin dans la salle de bain, mes essayages durent une éternité et je ne suis toujours pas content. Je laisse tomber et saisis mon écharpe habituelle, celle avec des couleurs douteuses, avec un noeud non défait et qui sent encore les derniers exploits du Racing, donc pas très frais. Le Racing ne m'en voudra pas, cela fait quelques années que lui n'est pas très beau non plus et je ne lui ai jamais rien dit.


And maybe we'll come back to earth, who can tell...


L'avant-match avec les amis ressemble à tous les autres entre blagues, sourires, bières plus fraiches que les chips. Sauf que je suis ailleurs, et pour une fois l'alcool n'y est pour rien. Je ne cesse de me dire que c'est la dernière fois. Sur le chemin qui mène au stade, j'ai l'impression que chacun de mes pas engouffre tous les éléments du paysage si familier, et détruit à jamais chaque élément de cette habitude. Je deviens une sorte d'Attila des souvenirs, mais plus urbain qu'herbeux.

Quelques voitures qui nous croisent klaxonnent en voyant nos couleurs, ça ressuscite, un peu. Une saucisse blanche comme repas du condamné plus tard, je me présente avec tous les autres anonymes de ce cortège funéraire vers l'entrée du stade. La fouille est plus que légère, pour la première fois je suis déçu. J'ai presque envie de dire au stadier qu'avec ma pièce de 1 euro je suis prêt à doubler son salaire pour qu'il recommence à me palper et surtout qu'il prenne son temps car c'est la dernière fois. Mais j'entre sans rien dire dans l'enceinte et dois me satisfaire de ces préliminaires bâclés.

Je regarde devant moi : putain que la Meinau est belle ! Putain de sirène, putain de naufrage. Mon regard est attiré par les escaliers qui mènent au kop. Au fur et à mesure que j'avance, ma vision se réduit petit à petit et se concentre vers le quart de virage nord-ouest. Je ne vois plus que les marches de l'échafaud qui m'appellent. Plus que la prise de poids, c'est la prise de conscience qui rend plus lourd chacun de mes pas. D'un coup, un sourire vient vers moi et m'éblouit d'un « Le kop est presque plein, dépêche-toi ! ». Une claque venue de nulle part me démonte le coeur, je me dépêche avec des frissons déjà plein le dos. J'entre dans le quart de virage à toute vitesse et je me prends une deuxième claque : je vois du bleu partout, des corps serrés les uns contre les autres et ces chants d'avant-match qui appellent au dernier combat pour les joueurs, pour le Racing, pour nous aussi.


I guess there is no one to blame, we're leaving ground...


L'entrée des pros se fait dans un moment d'émotion intense et le match est lancé comme la dernière charge avec comme seules armes tantôt l'énergie du coeur, tantôt l'énergie du désespoir. Pour la première fois de ma vie de passionné, je regarde constamment le tableau d'affichage avec ce paradoxe de vouloir retenir chaque minute qui ose changer à un rythme semble-t-il irrégulier, et celui de vouloir dans le même temps en finir une fois pour toute. Les négociations avec le temps n'avancent guère, chaque seconde nous rapproche de la fin, et pendant ce temps nos cordes vocales plient mais ne rompent pas.

Puis vient LE but. On ne sait pas de qui, on ne sait pas comment mais on le sait et on le ressent, c'est bien ça le principal. Les chants redoublent de force et d'émotions et cette fois-ci on ne retient plus le temps, qu'on en finisse, vite ! Les autres tribunes, belles de la mobilisation du public, chantent à l'unisson. Les passionnés et les joueurs ont su redonner les lettres de noblesse à cette passion qui ne s'achète pas et qui ne se vit pas à huis-clos que dans les esprits cocaïnés et immatures.


Will things ever be the same again? It's the final countdown !


L'arbitre siffle la fin officielle de la rencontre mais de notre côté rien ne s'arrête : tout n'est que chants, cris, sourires, larmes aussi, et surtout communion avec tout le peuple bleu. J'étais venu pour un adieu et je me retrouve à quitter le stade en lui soufflant à l'oreille « à bientôt ». Finalement, la vie du Racing restera jusqu'au bout un compte à rebours dans l'attente du dernier match de Guingamp, dans l'attente d'un repreneur, dans l'attente de la suite tout simplement. Les prochains rendez-vous nous feront cocher, chacun à notre manière, chaque jour qui nous rapproche de la prochaine échéance qu'elle soit positive ou inquiétante, mais tant qu'il y a des échéances, il y a la vie. J-6, J-5, J-4. Le nouveau compte à rebours du RCS est enclenché au rythme du battement du coeur de ses amoureux pour qui, plus que jamais le Racing... c'est d'la Bombe bébé !

id

Commentaires (11)

Flux RSS 11 messages · Premier message par mario-67 · Dernier message par guigues

  • Franchement, je pense qu'on était plein à avoir ce sentiment, que tu illustres magnifiquement dans cet article. Putain, on ne peut pas mourrir !
  • Autre signe, on arrive à faire de vrais articles sans parler (ou quasiment pas) de l'autre demeuré
  • Magnifique, j'en ai eu des frissons!
  • Très bel article, mais le quadruplé de Nouma c'était à Montpellier :)
  • Super article id !
  • Magnifique.
  • Très bel article, beaucoup d'émotions pour ma part en le lisant !
  • Bravo, tout simplement magnifique. J'étais au stade aussi vendredi soir, 550 km en aller simple pour l'échafaud, en provenance de Lyon où je suis exilé depuis 15 ans. J'étais seul, dans ma tribune présidentielle et mon statut de cadre et je vous ai envié. Je me suis revu aussi , il y a plus de 20 ans, avec ma veste en jean manches courtes brodée de "mort au FCM" et autre Blaue Front, qui aujourd'hui prend les mites au fond du placard de maman à Haguenau... Je n'ai jamais pu lâcher le RCS, même ici chez les gones, ce qui m' a valu bon nombres de quolibets et autres moqueries. Mais qu'importe, je me suis rappelé aussi cette soirée magique de la montée contre Rennes où j'ai pleuré comme un gosse, et j'ai eu la larme à l'oeil vendredi, plus discrète et moins joyeuse... Voilà, c'est tout, j'espère surtout que notre Racing survivra à la perfide Albion. J'irais donc à Rouen fin de semaine, au grand damme de mon fils et de son écharpe de l'OL qui ne révait que d'aller à Monaco. Raté, papa ira à Rouen, et puis c'est tout. Allez Racing
  • Merci Id, c'est parfait. Mais c'est moche [pas l'article]. Tres moche.

    Blourg

    JPDarky
  • de l'excellent id ! bravo ! :)
  • Les émotions continuent même après le match ! Bravo.

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Stammtisch
  • pliughe Bonne nuit
  • takl bonne nuit
  • takl 2024 devrait accoucher d'un 2025 appaisé et empathique. Tout va bien se passer, le Racing sera en L1, paix amour liberté et fleurs.
  • takl futur antérieur : [lien]
  • takl mais bon on a pas le droit de les exterminer. Y'en a qui ont essayé, ils ont eu des problèmes.
  • takl le monde serait mieux sans "les gens"
  • takl les gens tu leur donne une pelle ils creusent avec le manche
  • pliughe Pff si les gens creusé un peu plus ça nous éviterait de polluer
  • takl BO de la saison : [lien]
  • takl il manque plein de choses dans la dernière phrase, dont des mots, la honte.
  • takl allez dédicace à tous ceux qui ont eu la "cahnce" de mourir avant vu la Racing BlueCo [lien]
  • pliughe Mais oui
  • takl Excellent les Young Gods
  • pliughe L'octogone
  • pliughe [lien]
  • pliughe Et pour le fun, genre yen a dans locomoteur et puis l'entraînement
  • takl allez un morceau quye j'adore : [lien]
  • takl mais c'est frais
  • takl Ca ressemble à ce que The Streets faisait y'a genre 25 ans
  • pliughe Putain maintenant c'est les punks qui rap

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