Dernière marche

C'est un temps que les moins de vingt ans ne peuvent connaître, et dont les frais trentenaires ont des souvenirs au mieux très parcellaires. Strasbourg avait 2000 ans et le proclamait fièrement sur des autocollants qui faisaient alors fureur dans les cours de récréation. Le Racing jouait en D2 et alignait une prestigieuse défense avec Juan Ernesto Simon, Léonard Specht, Vincent Sattler, Robert Barraja et Abdallah Liegeon soutenant une attaque efficace où l'on retrouvait notamment l'ailier gauche Cyriaque Didaux, auteur d'un triplé ce jour là. Strasbourg s'était imposé 6-0 à Saint-Dié en coupe, pour la dernière rencontre en date entre les équipes premières des deux clubs. Une dizaine d'années plus tôt il y avait eu une autre raclée, en championnat cette fois, infligée par les hommes d'Elek Schwartz, qui avaient passé cinq buts à l'expérimenté gardien alsacien Eugène Battmann. On comprend ainsi que les Déodatiens font figure de souffre-douleur idéal pour un RCS déchu qui ambitionne de remonter au plus vite.

Ce qui tombe plutôt bien, car en s'imposant de façon concluante ce soir face aux Sports réunis de Saint-Dié, le Racing dissiperait les doutes nés de la dernière prestation moyenne face à l'autre club canonique qu'est Saint-Louis Neuweg. Ce serait surtout l'occasion de revenir à sept points de Vesoul, qui a déjà joué la semaine dernière, avec un match en retard à disputer face à une équipe de Neuves-Maisons qui ne fait pas exactement figure de foudre de guerre. Au tiers seulement du championnat, cela constituerait un bilan d'étape somme toute fort honorable si l'on tient compte du néant où se trouvait le club en juillet, et aussi si l'on se souvient de la marge de progression des hommes de Laurent Fournier la saison passée, dans des circonstances similaires mais tout de même moins apocalyptiques.

Attention toutefois à ne pas confondre Déodatien et béotien en matière de football. Les SRD ne figurent certes pas dans les figures de proue du groupe C de CFA 2 (10ème), mais il se portent mieux depuis quelques semaines après un très mauvais début de saison (six défaites sur les sept premiers matches). Présent à cet échelon depuis six saisons maintenant, le club vosgien offre un profil similaire à son homologue montagnard du groupe, Pontarlier, seule équipe à s'être imposée à la Meinau depuis des lustres. L'an dernier, Saint-Dié faisait également partie des équipes ayant réussi à dicter leur loi à la jeune troupe de François Keller. C'était en novembre 2010, dans les Vosges, devant les yeux de quelque stubistes illuminés qui avaient vraisemblablement nui au moral de la fière équipe strasbourgeoise (la preuve en image).

Signe du profond bouleversement qu'a connu le Racing cet été, il n'y aura ce soir sur la pelouse qu'un seul rescapé de cette rencontre d'il y a à peine plus d'un an, Adel Benchenane. En vérité, il y aurait pu en avoir trois, mais Eric Nyatchou Ndema souffre toujours de l'adducteur tandis que Joris Ursch se plaint de la cuisse. Des absences auxquelles il faut ajouter celles de David Ledy, Vincent Guignery, et Anthony Sichi (suspension) mais aussi celles de Francisco Donzelot et Steven Keller, insuffisamment remis de leurs pépins physiques respectifs. Ce qui au total nous donne pas moins de sept titulaires réguliers de ce début de saison qui manquent à l'appel, et conséquemment un afflux de sang neuf et juvénile (Jean Stutz, Robin Binder, Jordan Radisavljevic mais aussi le déjà mythique Simphorien Noundou Kinding ). Ce devrait surtout être pour François Keller l'occasion de tester des joueurs jusqu'ici utilisés avec parcimonie, comme Abdoulaye Coulibaly et Aymeric Ounissi.



Sans Didaux, mais avec Pinaud, sans Simon, mais avec Golliard, il faudra s'imposer pour, comme en 1988, rêver de tutoyer à nouveau les sommets.