Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Fabrice Ehret

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  • Fabrice Ehret s’évade du foot


    À 18 ans, il n’éprouvait pas le désir de faire du foot son métier. Aujourd’hui, à 36 ans, il assure qu’il ne regarderait même pas une rencontre à la télévision. Entre ces deux âges, Fabrice Ehret a pourtant disputé 368 matches au plus haut niveau et réalisé une énorme carrière. Portrait d’un garçon déroutant.


    Pour la première fois en plus de dix ans, convenir d’un rendez-vous avec lui a été d’une facilité déconcertante. Un seul texto a suffi à régler l’affaire. « Pas de problème. On se voit où vous voulez, quand vous voulez, j’ai le temps maintenant, je suis à la retraite ! » Du coup, on a rencontré Fabrice Ehret dès le lendemain, dans un restaurant mulhousien, où il s’est pointé avec un gros 4x4 noir, un large sourire et un épais bonnet gris vissé sur la tête.

    Dans les faits, voilà déjà 16 mois que son genou gauche est parti en pension lors d’un match de Ligue 2 disputé avec Nancy et qu’il n’est plus footballeur. Dans son esprit, ce fut un peu plus compliqué. « Il faut du temps pour réaliser. Se faire à l’idée qu’on ne rejouera plus, que le bouquin s’est fermé et qu’il ne se rouvrira pas. Aujourd’hui, ça y est, je sais. »

    Accepter de finir sur une blessure est à la fois délicat, frustrant et douloureux. « Mais le plus dur aurait été d’arrêter parce que plus personne ne voulait de moi. Ça au moins, je l’ai évité. » Attention, sujet sensible. Ce que l’on peut bien penser de lui, ce que le monde du foot pense de lui, ce que sa carrière laissera derrière lui : Fabrice Ehret n’a jamais vraiment su se départir de toutes ces questions existentielles. Peut-être simplement parce que lui s’est toujours senti un peu différent de ses congénères footballeurs. Légèrement à la marge. Parce que lui, contrairement aux autres, n’a jamais idéalisé ce monde lorsqu’il était adolescent. Mieux, il ne l’a même jamais désiré.

    « Taper dans un ballon, c’était un jeu. Aller en cours pour décrocher mon Bac, c’était la vie »

    « Devenir professionnel ne m’intéressait absolument pas, jure-t-il en vous fixant avec ses grands yeux bleus. L’idée ne me traversait même pas l’esprit. J’avais 17 ans et je prenais autant de plaisir à faire de l’athlétisme que du foot. Taper dans un ballon, c’était un jeu. Aller en cours pour décrocher mon Bac Pro, c’était la vie. Je n’ai jamais raté une heure d’école pour aller au stade. Et puis, je n’avais pas toujours ce besoin d’avoir le ballon entre les pieds. Je voyais mes copains qui jonglaient même dans leur cave pendant des heures. C’était pas mon truc, tout ça. »

    D’ailleurs, lui ne savait pas jongler, ou presque pas. Passé à côté de la case « centre de formation », il possédait une technique pour le moins rudimentaire. Il sourit : « À ce moment-là, peu auraient misé sur moi. » Certains, fascinés en revanche par sa vitesse de pointe et son aptitude à répéter les efforts, ne s’y sont pourtant pas trompés. Au final, lui a très vite intégré l’équipe première du FC Mulhouse, puis le prestigieux Racing Strasbourg, alors pensionnaire de l’élite. La belle histoire débutait.

    « J’ai ce dégoût-là pour le foot »

    Aujourd’hui, elle est terminée et Fabrice Ehret est déjà passé à autre chose, entretenant encore et toujours ce même rapport déroutant avec le foot. « Jouer un an ou deux de plus avec Nancy m’aurait fait plaisir. Mais maintenant, c’est terminé. Je n’ai aucune intention de rester de près ou de loin dans ce milieu. Pourquoi ? Parce qu’il ne m’intéresse pas. Je ne me vois ni entraîneur, ni directeur sportif, ni agent, ni rien. Je veux poursuivre ma route loin de cet univers. Je ne regarde quasiment plus aucun match à la télé. Et je ne bloquerai jamais aucune soirée pour assister à une rencontre, à part peut-être si c’est une finale de Coupe du monde ou de Ligue des champions. Et encore… En fait, aujourd’hui, j’ai ce dégoût-là pour le foot. »

    Les mots sont durs. On gratte et on regratte pour tenter de comprendre d’où provient la cassure. Comment ne plus rien éprouver pour quelque chose qui vous a tout donné ? Le natif de Petit-Landau jure qu’il ne crache pas dans la soupe, qu’il a conscience d’avoir été un « privilégié » , qu’il a aimé ce jeu d’un amour véritable et qu’il lui arrive parfois de penser à cet instant où, joueur d’Anderlecht, il s’est retrouvé parcouru de frissons dans le couloir d’Anfield Road (le mythique stade de Liverpool), au moment où commençait à résonner l’hymne de la Ligue des champions. Mais il y a aussi ces cicatrices qui, à l’évidence, ne sont pas encore refermées.

    Fabrice Ehret, qui a besoin d’être aimé, ne s’est pas toujours senti apprécié à sa juste valeur. Pas forcément sur les terrains, mais en dehors, où, à tort ou à raison, il dit avoir souvent ressenti des vents contraires. « J’ai fait l’objet de critiques tout au long de ma carrière, assure-t-il. Certains ont constamment pensé que j’étais là par chance ou par hasard. Que je n’avais pas le niveau, que j’étais l’invité-surprise. J’ai toujours su qu’on ne pouvait pas plaire à tout le monde, mais je finissais quand même parfois par douter de moi-même. Les critiques, quoi que tu en dises, ça fait mal. Tu as toujours envie de faire l’unanimité. Mais bon… »

    Pas bien méchant, ni grande gueule pour un sou, le garçon n’a jamais fait grand-chose pour tenter de changer son image. À ses détracteurs, le latéral gauche a toujours pris le soin de répondre sur le terrain. « Ma carrière pro s’est étalée sur 18 ans, quand la moyenne actuelle est de 6 ans. Être chanceux un an ou deux, je veux bien, mais 18… Mon CV parle de lui-même. Hormis l’équipe de France A, j’ai à peu près tout connu. Tant pis pour les gens qui sont de mauvaise foi. Moi, je suis fier de ce que j’ai réalisé. »

    « Ecoute Fabrice, de toute ma carrière, je n’ai jamais vu un joueur de foot aussi nul que toi à l’entraînement »

    Il le sait. Sa réserve naturelle et son extrême timidité ne l’ont pas toujours servi non plus. « On m’a souvent pris pour quelqu’un d’arrogant parce que je ne me mélangeais pas trop aux autres. Mais c’était juste ma nature. Je n’aime pas me mettre en avant. Je préfère être tranquille dans mon coin. Ma mère me demande toujours pourquoi on me voit toujours tout au fond sur les photos. Dans le foot, c’était pareil. Certains ne comprenaient pas pourquoi je faisais mes petits entraînements dans ma bulle. Je donnais l’image de quelqu’un de suffisant. C’était pas ça pourtant, je vous l’assure. »

    Non, c’était juste qu’il n’aimait pas trop s’entraîner, Fabrice Ehret. Il y voyait certes une utilité, mais aucune joie. Aucun plaisir à gagner un match de tennis ballon, aucune satisfaction à remporter un trois contre trois contre ses propres coéquipiers. Forcément, parfois, ça se voyait un peu. « Un jour, Thierry Debès (ancien gardien du Racing) m’a dit : ‘‘Ecoute Fabrice, de toute ma carrière, je n’ai jamais vu un joueur de foot aussi nul que toi à l’entraînement. En revanche, le week-end, je suis très fan.’’ Ça m’a fait marrer. Il n’avait pas tort. J’avais besoin de monde dans les tribunes pour me donner à fond. J’ai toujours eu besoin d’adrénaline. Mon coach à Cologne, Christoph Daum, me comparait aux joueurs brésiliens qui n’aiment pas trop le froid, les terrains boueux, les entraînements et tout ça… »

    Il n’empêche que le joueur alsacien aux 368 matches chez les pros n’a jamais séché un seul entraînement de toute sa carrière, songeant le plus souvent à son père qui, lui, se levait chaque matin à 5 h 30 pour aller travailler dans sa boucherie en Suisse. « Je n’avais pas le droit de me plaindre et je ne l’ai jamais fait. Je connaissais trop la réalité des choses de la vie. »

    C’est pour ça qu’il en a profité à plein, refusant de mener une existence d’ascète. On le dit bringueur ? Il assume d’un sourire en coin. « C’est vrai, je sortais, mais presque toujours après les matches. Avant, on ne me voyait pas. Je voulais avoir une jeunesse comme tout le monde et profiter des copains quand ils venaient me voir. Disons que j’étais un fêtard consciencieux ! J’avais peut-être les qualités physiques pour concilier les deux. » Amateur de sapes et de belles voitures, il ne s’est rien refusé non plus dans ces deux catégories. Il faut bien vivre. L’essentiel était simplement pour lui d’investir tout le reste de ses salaires. Propriétaire de son premier appartement à l’âge de 19 ans, le Petit-Landaunais est aujourd’hui à la tête d’un patrimoine immobilier important, qu’il gère en parfait businessman.

    On joue le temps additionnel, loin d’Anfield Road, au cœur d’un restaurant mulhousien. Fabrice Ehret glisse son portable et ses clés dans la poche, puis se lève. « Avoir un œil sur mes affaires, faire de la musique et profiter des miens, voilà à quoi va ressembler ma vie désormais. Elle sera toute simple et loin du foot. »


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    Le clash - « Tu sais quoi ? Le SS, il t’emm… »


    Fabrice Ehret reste profondément marqué par un violent clash qui l’a opposé à Pascal Dupraz, son ancien coach à Evian.

    Impossible pour Fabrice Ehret de raconter sa carrière de footballeur et de se raconter lui-même, en tant qu’homme, sans évoquer Pascal Dupraz, un entraîneur qu’il a côtoyé durant trois ans à Evian et dont il garde un souvenir amer. « Parce que c’est l’homme qui a réussi à ne plus me donner envie de jouer au foot, dit-il. Et c’est lui qui a quelque part mis un terme à ma carrière en prononçant des mots inacceptables avant un match contre Saint-Etienne. Je n’oublierai jamais. »

    Ce jour-là, en plein milieu de sa causerie, le coach interpellait brusquement son joueur : « Bon, aujourd’hui, est-ce que je vais avoir droit au Fabrice Ehret avec son casque de DJ ou au Fabrice Ehret avec son casque à pointe de SS ? » La réponse est tout aussi cinglante : « Tu sais quoi ? Le SS, il t’emmerde. »

    Quarante-cinq minutes plus tard, le latéral gauche était remplacé. Ou plutôt placardisé. « Ce jour-là, ça a été le début de la fin. Ce genre de truc, c’est pire qu’une blessure. Ça ne guérit jamais. Tu sais que tu es condamné, quoi qu’il arrive. Mais je n’avais plus envie de laisser passer ça, plus envie de faire de concession. Je ne regrette pas de lui avoir répondu car c’est quelqu’un qui n’avait aucun respect pour ses joueurs. Il était envieux. Il taillait à longueur de journées les joueurs qui venaient bien habillés au stade ou qui roulaient en grosse voiture. Il ne supportait rien. En fait, il voulait être LA star de son club. La notoriété, il n’y a que cela qui l’intéressait. »


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    Une reconversion en musique



    Lors de ses dernières années de footballeur, chacun de ses buts était célébré de la même manière : en mimant le geste du DJ, une main sur l’oreille, une autre sur la platine. La passion de la musique était déjà bien ancrée en lui, mais son emploi du temps ne lui laissait guère le temps de se produire. Aujourd’hui, Fabrice Ehret se fait plaisir, réalise ses propres compilations et commence à se faire un petit nom dans le monde de l’électro. « J’ai toujours écouté beaucoup de musique, mais j’ai commencé à mixer en 2008. Au fil du temps, c’est devenu un truc dont je ne pouvais plus me passer. Je n’ai pas de bases musicales, je n’ai jamais fait de solfège et je n’ai jamais osé jouer de la flûte à mon père, quand il en avait fini avec ses douze heures de boulot. Je me suis formé comme ça. Je m’éclate sans me prendre la tête et sans ambitionner quoi que ce soit, un peu comme au foot. Mon objectif est de me faire plaisir et de faire en sorte que les gens qui m’écoutent en prennent aussi. J’essaie enfin de progresser et de faire évoluer ma musique. Je n’aime pas faire deux soirs de suite la même chose. »

    C’est pourquoi Fabrice Ehret s’injecte chaque semaine « deux ou trois heures de nouveaux sons ». « Parfois, quand je me prépare à jouer dans une boîte spécialisée en Allemagne, où 2000 personnes sont là juste pour m’écouter, je retrouve un peu ce que je ressentais avant les grands matches de foot. Cette adrénaline… J’aime vraiment ça. »


    L'Alsace

    Mise en place du lien vers le site de l'Alsace
  • Faut croire que Dupraz a un vrai problème avec les alsaciens, ou un problème tout court d'ailleurs :)
  • https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=132604547292284&id=100016282182687 fabrice a rechausser les crampons hier soir dans mon club. Pour le fun peut etre..... mais niveau ballon et du jeu il a rien perdu.... pour un petit club comme nous ca fait plaisir..... merci fabrice....
  • 4 ans après avoir mis un terme à sa carrière, Fabrice Ehret fait son jubilé ce samedi à Petit-Landau (14h30).
    quelques anciennes gloires (Johansen, Kanté, Abdessadki, Laquait, Bugnet, Barbosa, Ljuboja, Meriem, Govou, Beye) sont anoncées.

    Article de L'Alsace

    Bizarre que @paplo n'en ait pas parlé...
  • Sympa j'espère qu'il y aura du monde pour lui....
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