Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

JPP revient

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Par zottel
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« Le maintien avec le pace-maker », ça sonnerait pas si mal © kibitz

Footballeur français à la cloison nasale déviée, ballon d'or à l'ère pré-Cannavaro, terreur de la D1, je suis - je suis - je suis ?

Le site officiel a confirmé avoir passé un accord pour l'arrivée de Papin. Rapide retour sur l'ex-joueur et l'entraîneur, connus comme le loup blanc en Alsace.

Papin, le joueur


Alors c'est l'histoire d'un gars qui s'appelle Jean-Pierre. Né à Boulogne-sur-Mer, aux marges incertaines du pays, il commence sa carrière entre Valenciennes et Bruges en Belgique. En première division belge - championnat d'un niveau parfaitement respectable à l'époque - il crève l'écran au point d'être sélectionné en équipe de France pour la Coupe du monde 1986. Certes, à 23 ans seulement, on n'en attend pas davantage qu'un Chimbonda, mais il marquera tout de même deux buts. On identifie déjà son style caractéristique : doté d'un gabarit moyen (1,76 m), son équilibre dans la frappe, sa gestuelle parfaite de buteur et son peu d'appétence pour la prise de tête en font une belle petite machine. Y compris de loin, ce qui frappe les imaginations (dans la lucarne) et lui vaut le surnom de Patator. Car oui, c'était lui le prototype de Patator, avant même que la star de votre club de village n'apprenne à marcher et n'hérite de ce surnom.

De Bruges, Papin débarque à Marseille, club en pleine ascension grâce à l'ambition et l'argent de Bernard Tapie. Le VRP à brushing voit loin. Il s'attache à composer une équipe mêlant vieilles gloires des années 1970-80 - comme Klaus Allofs, un des mentors de JPP, mais aussi Jean Tigana ou Manuel Amoros - et la génération montante de la formation française. Et ça marche.

De son côté, si le Vélodrome siffle JPP à ses débuts, s'il le baptise « J'en peux plus » ou plus couramment « Putaing enculé », c'est du bizutage bon enfant. Les nuls Niang, Drogba, Ribéry peuvent en attester. Et ça marche ! Après six saisons, le temps de cinq titres de meilleur buteur de D1 d'affilée, le nom de Papin devient éternellement associé à celui de l'Olympique de Marseille. Il y a bien sûr aussi - voire surtout vu d'Alsace - les soirées européennes où Papin et l'OM sont des ambassadeurs étincelants du football français, pendant les longues années de dépression post-Platini des Bleus.

Il y a la demi-finale de ligue des champions perdue en 1990 contre le Benfica de Lisbonne, à cause de la fameuse main de Vata. Si Charlize Theron en pleure encore, elle n'est pas la seule. Tapie n'était pas content : « Ce soir, moi, j'ai compris comment faire pour gagner une coupe d'Europe ...» et ça a marché. Une seule fois. Aulas a essayé aussi après Eindhoven, mais lui n'a décidément pas le Mojo. Ça marche aussi à retardement, car 1993 est encore loin. La saison suivante, l'OM perd en finale contre l'Etoile Rouge de Belgrade, à Bari. Papin, buteur régulier, n'y peut rien mais reçoit logiquement le Ballon d'or dans cette phase creuse pour les compétitions internationales.

Après ces deux échecs consécutifs, la désillusion est grande, et l'équipe considérée comme la plus forte de l'histoire de l'OM se délite. Entre la retraite de Tigana puis d'Amoros et les envies de départ de Waddle ou Mozer, Papin s'en va lui aussi, après une année 1992 sans beaucoup de saveur : un simple titre de champion de France, de meilleur buteur et des éliminations précoce en Coupe des Champions et à l'Euro 92.

Au Milan AC, il entre dans un trou noir pour le public français. A cette époque, les transferts d'un pays à l'autre sont rares et la médiatisation est centrée sur la D1. La concentration de bons joueurs au Milan AC et en Italie est extraordinaire, et il est difficile d'y être l'homme providentiel comme à Marseille. Papin et son concurrent milanais Van Basten sont simplement les deux meilleurs attaquants du monde, sans compter que les limitation du nombre de joueurs le met en concurrence avec Gullit, Rijkaard, Boban et Savicevic pour les places de titulaires. Son parcours italien est cependant honorable, mais la succession des blessures amorce le déclin.

C'est d'ailleurs bien fait pour lui, il n'avait qu'à rester en France. Au fil du temps le refrain « JPP reviens ! » des Guignols de l'Info sonne de moins en moins sincère. Il ne reviendra pas à Marseille qui reste ce club que tout le monde adore mais où personne ne revient jamais (alors que le Racing...). Sa carrière internationale sombre aussi, un soir de 1993, face à la Bulgarie, en éliminatoires de la Coupe du Monde (de merde).

Ses dernières années de joueur sont anecdotiques. Blessé chronique, il ne fait que passer au Bayern, juste le temps de glaner sa première Coupe d'Europe, une petite C3. Pas rancuniers, tant il avait peu joué dans l'équipe des affreux Kostadinov et Klinsmann, les vaincus bordelais l'embauchent pour la saison suivante. A l'expérience et à l'envie, il se maintient au niveau d'un bon attaquant de D1 quand sa santé le laisse en paix. C'est son chant du cygne. Glissons sur sa pige à Guingamp et les années d'amateur qui suivent, révélatrices de son insatiable goût du jeu.

On se souvient de son ultime but chez les Bleus, contre l'Azerbaïdjan, dans la boue du stade de Trabzon (victoire 2-0). Une soirée où l'on devinait qu'il ne s'agissait pas tant de construire la future équipe de l'Euro 1996 mais de gagner, à tout prix, un match crucial. La gloire pouvait attendre. Un an après, cette même équipe de France, proche de sa plénitude, écrase l'Azerbaïdjan 10-0 et sans appeler JPP.

Papin, l'entraîneur avec le coeur


Au début de l'ère Ginestet, alors que le Racing entame des années de sinistrose dont nous ne sommes pas sortis, toute la Meinau s'interroge sur le devenir de Jacky Duguépéroux. Personne ne songe à siffler la légende, l'équipe souffre visiblement d'une malchance incroyable, d'un manque de troupes invraisemblable et de la faiblesse psychologique de ses pseudos-cadres. L'intéressé semble détruit moralement par sa saison, mais ne parle pas explicitement de départ. C'est alors, à la surprise générale - à commencer par celle de Dugué - Ginestet sacre Jean-Pierre Papin entraîneur du Racing Club de Strasbourg. C'est sa première expérience sérieuse d'entraîneur, après plusieurs années réussies comme entraîneur-joueur à Arcachon.

Le choix, chargé du prestige, fait rapidement l'unanimité du public, reçoit l'onction de Guy Roux, et fait souffler un petit vent fraîcheur sur le club un peu déboussolé après le départ de l'équipe de Marc Keller. Aux côtés de son adjoint Sébastien Migné, Papin impose une préparation physique commando et le club recrute des joueurs à son image : puissants et sans complexes, à l'image d'Hervé Tum ou Jeff Strasser. Alors qu'on attendait de l'attaquant un jeu offensif et audacieux, la référence est clairement celle de la rigueur italienne. On veut la montée, avec le coeur ou toute autre partie de l'anatomie !

La saison commence par une victoire de prestige contre le Bayern, une courte période d'errements défensifs qui se termine avec l'arrivée de Jeff Strasser, et continue ensuite de façon linéaire. Jamais réellement dominateur, le Racing ne dévie jamais non plus de la voie de la montée, et finit par l'arracher contre Metz à la Meinau. C'est très beau, et même le messin Laurent Agouazi est ému.

Il faut dire que ceux-ci étaient déjà assurés de monter depuis plusieurs, avec un effectif et un budget comparables à ceux du Racing. Pour nuancer ce succès, ajoutons aussi qu'en coulisses, l'équipe est minée par les querelles internes - impliquant tour à tour Abel M'Phela, Haikel Gmandia, Pascal Johansen, Edgard Gnoleba Loué, Abou, Jean-Christophe Devaux, Emil Gargorov - et les recrutements hasardeux parfois validés par Papin - Jérémy Perbet, David Amadou M'Bodji, Ahmed Kantari, Pascal Camadini, Nicolas De Gea, Ali-Sami Yachir, Eugène Claude Ekobo N'Joh. Tout cela compromet gravement l'équilibre du groupe et grève les possibilités de se renforcer pour la L1 : n'est pas Marseille qui veut, n'est pas Tapie qui veut, Jean-Pierre. Plus grave, on s'interroge aussi gravement sur les compétences tactiques du bonhomme et de son adjoint Migné, dont la promotion depuis le milieu amateur ne convainc pas tout le monde.

Dans le fracas des épopées grecques, le Racing poignarde son Papin, alors que la Meinau résonne encore des « JPP, JPP » du match contre Metz. Et tout cela, on s'en souvient, avec Jean-Marc Furlan dans le cheval de Troie du football intello ; Ferhat Khirat dans le rôle du traître Sinon, qui lui fait ouvrir les portes ; avec Philippe Ginestet dans celui des Moires, qui tisse une histoire jolie comme un maillot à carré blanc.

La suite de la carrière de JPP donne certes raison à ses détracteurs alsaciens : remplaçant au pied levé Guy Roux, qui fait défection après quelques matchs de L1, Papin coule avec le RC Lens en L2. C'est là un des scénarios les plus improbables qu'ait connu le championnat de France, alors que Lens semblait taillé pour les premiers rôles. L'arrivée de la légende locale Daniel Leclercq, pour épauler Papin, ne change rien et finit par ridiculiser complètement l'« élève », privé d'autorité et de son adjoint. On ne sait guère aujourd'hui à quoi est dû exactement le désastre, entre les faiblesses intrinsèques de Papin et celles de cet attelage improbable imaginé par Gervais Martel associant un Druide taciturne et un ancien Ballon d'Or réduit à une fonction de Cécile Traverse en short. Mais c'est une belle tache sur le blason de Papin.

Papin II


Dans ces conditions, on ne sait que penser de son retour voulu par Julien Fournier. L'homme est indiscutablement attachant, et son charisme avait suffi a transformer le Racing mou et sans caractère de Duguépéroux-Keller en une équipe de besogneux impitoyables de L2. On ne saurait oublier pour autant les nombreuses critiques qui ont poursuivi le technicien durant ses expériences strasbourgeoises et surtout lensoises. Il est possible pourtant que, dans la situation actuelle du Racing, un Papin mûri par ses échecs et à l'enthousiasme intact soit l'homme qui tombe à pic.

zottel

Commentaires (1)

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  • Avis mitigé. Portrait trop long dans la partie "joueur" et -lien de cause à effet?- une fin un peu courte voire expédiée, d'où le ressenti d'un article déséquilibré. Rien de dramatique mais, puisqu'il faut choisir, ce sera moyen moins.

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