Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Un titre pour le Nouvel An

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Souvenir/anecdote
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Par athor
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C'est une des lignes les plus méconnues du palmarès du Racing. Le 1er janvier 1964, le club remporte la toute première édition de la coupe de la ligue. Retour sur cette compétition oubliée.

Remonté en première division en 1961, le Racing passe le début des années 1960 à vivoter dans le bas du ventre mou du classement. La faute à des difficultés financières et à une instabilité au niveau de la direction, avec la passage de la présidence de Jean-Nicolas Muller à celle de Joseph Heintz, mais également les départs de l'entraîneur Emile Veinante et du directeur sportif Joseph Heckel. Mais sur le terrain, l'équipe comporte quelques belles individualités, à l'image du redoutable Casimir Koza, ou des prometteurs Gilbert Gress, Robert Szczepaniak et Gérard Hausser. Après avoir terminé la saison précédente à la 14ème place, un rang correspondant aux moyens du club, le RCS aborde la saison 1963/1964 avec l'ambition de progresser, sous la houlette de Robert Jonquet, entraîneur pour la troisième saison consécutive. Si le club enregistre quelques renforts, dont le génial José Farias, la composition de l'équipe a finalement peu variée.

D'un point de vue plus général, le début des années 1960 est surtout marqué par la contestation des joueurs professionnels vis-à-vis de la Ligue de football. Ceux-ci sont alors liés à vie aux clubs, qui sont seuls à décider des transferts. Ce climat permet la création de l'UNFP en 1961, avec l'idée de mieux défendre les footballeurs. Mais l'organisation peine à se faire entendre, et il faudra attendre 1963 et les déclarations chocs de Raymond Kopa (« les footballeurs sont des esclaves ») pour faire avancer la cause, même si ces propos lui vaudront six mois de suspension.

C'est dans ce contexte tendu que la Ligue Nationale décide, le 1er juin 1963, de la création d'un trophée réunissant les clubs de première et deuxième divisions. Cette idée, amorcée par Antoine Chiarisoli, président de la LNF, et poussée par le président du Stade Français, Roger Pouchès, a pour but de « remplacer les matchs amicaux de début de saison par des rencontres officielles constituant une meilleure préparation sur le plan sportif et susceptibles d'intéresser davantage de public », mais aussi et surtout de satisfaire la demande d'aide financière formulée par les clubs de D2, le règlement de cette coupe prévoyant en effet que 30% des recettes seraient versées dans une caisse de péréquation destinée à aider ces clubs. Ce trophée laisse tout de même la presse et le grand public pantois, ces derniers se demandant s'il ne s'agissait pas là d'une nouvelle coupe Charles Drago (consolante de la coupe de France, qui n'aura durée que de 1953 à 1965) ou si les clubs allaient vraiment le prendre au sérieux.

La compétition se déroule alors en deux phases. La première réunit tous les clubs de D1 et D2, qui sont répartis géographiquement dans neuf groupes de quatre clubs. Chacune de ces équipes s'affronte alors en matchs aller et retour, au cours du mois d'août. Parmi les neuf vainqueurs de groupe, les deux ayant marqué le moins de buts à l'extérieur sont qualifiés pour un tour de barrage. Les sept autres vainqueurs sont directement qualifiés pour la phase à élimination directe, qui a lieu durant l'automne. Afin de s'approcher un peu plus des conditions d'un match de pré-saison, le règlement permet également de remplacer le gardien de but à tout moment, et de procéder au remplacement d'un joueur de champ à la mi-temps. Rappelons que les premiers remplacements de joueurs ont été autorisés en 1967.

Le Racing hérite du groupe 3, avec le Stade Français, 15ème du précédent championnat, Nancy, qui vient d'être relégué en D2, et Sochaux, qui vise la montée. Pour son entrée en lice, le 4 août 1963, à 16h45, le Racing reçoit son homologue de première division à Mulhouse, au stade de Bourtzwiller, afin de « ne pas offrir deux fois la même affiche au public du stade de la Meinau », mais également de renforcer la popularité du club dans le Haut-Rhin. Mais l'avant match est encore marqué par le climat social, et les joueurs n'ont accepté de disputer la rencontre qu'à la condition de « discuter ultérieurement des conditions financières avec le président Heintz, dès son retour de congés ». Seul Denis Devaux manquera à l'appel pour cette raison. Le match est remporté 2 buts à 1, devant 3 067 spectateurs, et une certaine indifférence, puisque les DNA ne publieront aucun compte-rendu le lendemain. Au niveau national, les 18 rencontres de cette première journée n'ont attiré que 41 000 spectateurs, soit à peine plus que pour des matchs amicaux. Surtout, certaines équipes n'ont pas vraiment joué le jeu, en n'alignant que très peu de professionnels. Dans le groupe 3, Nancy n'a ainsi pu compter que sur quatre titulaires habituels et s'est incliné 7-1 à Sochaux.

Nancy, c'est justement le second adversaire du RCS. Disputé à Essey-les-Nancy, le match vire à la correction, les locaux n'alignant cette fois ci que deux joueurs pros. Devant à peine 200 spectateurs, l'équipe de Robert Jonquet s'impose 6-0, grâce notamment un quadruplé de Casimir Koza. Deux jours plus tard, le match retour a lieu à … Sarreguemines, mais cette fois-ci, les Bleus ne peuvent faire mieux qu'un match nul 1-1. Entre ces matchs de coupe viennent alors s'intercaler des matchs amicaux, donnant à cette préparation estivale un rythme très soutenu, d'autant que l'équipe change assez peu. On notera par exemple cette rencontre face au FCO Neudorf, disputé sur son stade du Langhaag, lieu d'entraînement du Racing, et gagnée facilement sur le score de 11-0.

Le 17 août, Strasbourg se rend au stade Bonal pour y affronter Sochaux. Devant 2 329 personnes, et malgré le retour de Denis Devaux, les visiteurs s'inclinent 1-0 en fin de match, malgré une supériorité numérique durant toute la seconde période. En effet, le Sochalien Serge Bourdoncle a été expulsé durant la mi-temps pour avoir bousculé Ramon Muller en rentrant aux vestiaires. Le match retour, disputé quatre jours plus tard à la Meinau, pour la première fois de la saison, est facilement remporté 2-0, grâce à l'inévitable Koza et à Gérard Hausser. Après cinq rencontres disputées, le club est donc en position de se qualifier, à condition de ne pas perdre face au Stade Français.

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Koza (genou à terre) transmet le ballon à Szczepaniak, lors du match contre Sochaux

Cette véritable finale du groupe 3 se déroule au stade Bauer de Saint-Ouen, le 24 août, à 16h15. Pour cette rencontre, Jonquet doit composer avec la blessure de Devaux, titulaire en défense, et l'absence de son « remplaçant naturel » Roland Merschel, qui vient tout juste d'être prêté à Nancy, dans le cadre du transfert d'Edmond Biernat. Malgré cela, le RCS gagne sur le score de 2-1, mais a à peine le temps de savourer, puisqu'un match amical est prévu dès le lendemain 16h à Chaumont. Le premier tour s'achève donc avec la qualification de Reims, St-Etienne, Cannes, Aix (vainqueur de Valenciennes en barrages), Bordeaux, Nantes, Rouen et Strasbourg en quart de finale.

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Le classement final du groupe 3

Le tirage au sort des quarts de finale offre une belle affiche aux Strasbourgeois, le Stade de Reims et ses vedettes, qui ont animés la dernière décennie. Mais le club digère mal le départ du mythique Albert Batteux à l'intersaison, et rentre peu à peu dans le rang en championnat, au point de lutter pour son maintien. Le match aller se déroule au stade Auguste Delaune, devant une affluence modeste. Rapidement réduit à 10, après l'expulsion de Denis Devaux pour un choc avec l'international Bruno Rodzik, le RCS mènent la vie dure aux locaux, mais se heurte plusieurs fois au gardien Maurice Barreau, et s'inclinent 1-0. Le match retour est annoncé comme une belle fête à la Meinau, l'occasion pour le public de voir ou revoir à l’œuvre Jean Wendling, mais aussi Roger Piantoni ou le revenant Raymond Kopa. Malheureusement, Reims plus concerné par le championnat ne se rend en Alsace qu'avec cinq professionnels et repart avec trois buts dans les valises.

En demi finale, Strasbourg hérite d'un "divisionnaire", le club de D2 d'Aix-en-Provence, dont le statut de petit poucet est renforcé par son président Laurent Reynier avant le match aller: « nous vivons avec les moyens limités du bord et nous ne disposons que de quatre joueurs professionnels ». Disputé le 16 octobre, à la demande du Racing, qui a souhaité profiter du déplacement à Monaco en championnat trois jours auparavant, le match est pris au sérieux par Robert Jonquet, qui aligne sa meilleure équipe possible. Seule petite expérimentation opérée par le technicien, la titularisation de Gilbert Gress à un poste inhabituel d'ailier droit, durant la première période. La rencontre est remportée assez facilement sur le score de 2-0. Un score que les Provençaux ne parviennent pas à renverser au match retour, qui s'achève sur un 0-0 dans une Meinau quasi-déserte.

Le Racing est donc qualifié pour la finale et affrontera Rouen, club du milieu de tableau, qui est venu à bout de St-Etienne aux tirs au but. La date de cette finale est bien particulière, puisqu'elle se déroule le 1er janvier 1964, au stade de la Meinau, alors qu'elle était initialement prévu le 7 décembre à Paris.

Devant 7494 spectateurs venus prolonger le réveillon, et animant les tribunes des restes de pétards de la veille, le Racing se présente avec le 11 suivant:
Equipe


Après une vibrante Marseillaise et un protocole digne d'une finale, les Bleus prennent rapidement la mesure de la rencontre, en exerçant un pressing haut. A la 29ème minute de jeu, à la suite d'une touche rapidement jouée, le capitaine René Hauss adressa une longue passe à José Farias qui décocha une lourde frappe de 22 mètres au ras du montant droit. Les Normands eux n'eurent jamais vraiment la possibilité de tromper François Remetter. Le coup fatal est porté à la 70ème minute. Gilbert Gress lance José Farias, dont le centre est repris victorieusement par Robert Szczepaniak, qui avait remplacé Hausser à la pause, malgré le retour désespéré de deux défenseurs. Le score est alors acquis, et Antoine Chiarisoli, président de la ligue, peut remettre le (lourd) trophée à René Hauss, qui entama un tour d'honneur avec ses coéquipiers, sous les vivats du public.

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René Hauss portant le trophée, avec à sa droite Gress et Sbaïz, et à sa gauche Leblond, Koza, Szczepaniak, Devaux et Stieber.

Il s'agit là du second trophée, fût-il peu prestigieux, de l'histoire du club, mais surtout, le signe annonciateur d'une belle période pour le Racing, marquée par une belle épopée européenne (Milan AC, Bâle, Barcelone et Manchester United) et la victoire en coupe de France 1966.

Citations et photos: DNA

athor

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