Les Amiens de mes Amiens ne sont pas mes ennemiens

La météo d'Evelyne Laborde

"Amiens" dérive certainement de l'adjectif possessif. Pas le votre, le mien, très bien, [c'est le sien, tu as le tien et j'ai le mien. Sitôt que se dessine l'instinct de propriété, à la faveur d'un mauvais coup de dents à la crèche par exemple, survient aussi le besoin de designer ce qui est sien ; encore qu'il ne s'agit le plus souvent d'un réflexe. On vous a mordu, bon, il faut marquer le territoire. Mais on dira bien "ma voiture, ma femme, mon chat", alors que ça n'accoure pas quand on siffle ! C'est bien simple, si Amiens l'était vraiment, il s'appellerait Reviens. J'espère avoir été assez clair.
Autrement on rentre de plain-pied dans les mauvaises habitudes. Et il faut de la constance pour garder Amiens. Mais c'est où, Amiens ? ...Souviens toi, ça parlait de la Picardie, et des roses qu'on trouve là-bas. La Picardie est une région sous-marine gagnée sur l'Eau en creusant des trous et en branchant des sèches-cheveux. Évidemment, chaque année, elle ne se contient plus, et vient se déverser de par toute la Somme avec l'insouciance qu'on lui connaît. C'est tout mouillé. Il faut lui reprendre Amiens en mettant un tablier de poissonnier.
Pour cette raison on appelle Amiens la petite Venise du Nord. Les Venises pullulant comme les moustiques à Colmar on peut même parler de "petite Venise du Nord, première à gauche". Mais le fait demeure ; c'est humide. Encore un peu vous avez du moisi dans les joints de la salle de bains.
La campagne d'Amiens est très jolie, à perte de vue s'étendent les herbiers d'algues où les hippocampes jouent à cache-cache. En temps de sécheresse on y plante même des betteraves. On se demande parfois ce que mangent ces gens, mais on note - c'est un indice - que Rabelais n'y a mis en scène aucune histoire de géant médiéval.
Non vraiment, Amiens l'est peut être, mais si vous insistez je fais un prix. Pas le mien, le votre.

Richesses du monde

La faune amiénoise se compose essentiellement de Picards et de Picardes. Parmi les premiers, un spécimen intéressant est le Sébastien Cauet. Vulgaire, gras, laid, volontiers stupide à l'antenne, il n'a d'égal dans la médiocrité que ses spectateurs et auditeurs. Ce qui lui fait un point commun avec l'autre grand spécimen de Picard, à savoir Jean-Pierre Pernaut. Qui, en plus de la litanie de qualités ci-dessus, est facho. Ce qui est assez fréquent dans cette région désolante. Et désolé. Amiens, il faut y penser, c'est la ville de Minime Gremetz (sifflez pas, Gremetz n'est pas le symbiote entre Gremlin et Graoully). Bref, la faune d'Amiens n'est pas une faune mais une faute.
La géologie, parlons-en. La géologie d'Amiens a ceci de particulier que, de temps en temps, le Parisien aime embêter son voisin septentrional (rigolez pas hein, je vous rappelle qu'à une distance à peine plus grande, vos voisins septentrionaux s'appellent Ludwigshafen). La géologie d'Amiens permet à Paris de noyer Amiens, alors qu'aucun cours d'eau ne relie les deux villes, lesquelles sont, de surcroît, situés sur les bassins versants de fleuves différents (rappel : Paris se situe sur le même fleuve que Troyes alors qu'Amiens se situe sur le même fleuve qu'Amiens). Mais peu importe, le pécore local s'imagine que lorsqu'il a été submergé d'eau au printemps 2001, c'était la faute à Paris. Alors que tout le monde sait que c'était simplement le signe prématuré d'une apocalypse qui devint réalité lorsque Joseph-Louis Chilavert offrit la Coupe de France aux Choucroutiers. Passons à la botanique (sa mère).
A part le Sébastien Cauet, dont la nature animale, minérale ou végétale reste incertaine, Amiens est célèbre pour ses hortillonnages. Personnellement, je m'en fous un peu, vous n'avez qu'à passer vos vacances en Picarderie pour voir ce que c'est. La principale culture de la Amiénie, jumelée avec l'Anémie et avec l'Ennemi, est la betterave. A tel point que, parfois, le Picard ressemble aux amarantacées. Et que, quand le TGV daigne s'y arrêter, il le fait dans une gare située pile poil à mi-chemin entre la ville de Gilles de Robien et celle de Xavier Bertrand. Quand on vous dit que la Picarderie est sinistrée, on ne vous ment pas. La Picarderie est une région lamentable. D'ailleurs, des gens sains d'esprit voudraient l'offrir à la Belgique. Je suis pour.
Y a-t-il de belles choses à Amiens ? La réponse, aussi surprenant que cela puisse vous paraître, est oui, bien entendu. D'abord, Amiens est équipée d'une cathédrale démesurément démesurée compte tenu de l'insignifiance des lieux. Et d'une beauté assez incroyable, je dois dire, surtout comparé à la cathédrale Saint-Charles-Borromée de Saint-Étienne et à la cathédrale Saint-Manuel-Valls d'Évry. Et puis, surtout, Amiens se distingue par une gare dont les quais sont un ravissement perpétuel. Lorsque vous montez dans un train pour n'importe quelle autre ville. Même Boulon-sur-Mer ou Écrou-sur-Somme.

Les grand hommes, les vrais : Jean-Alphonse Robinet

Jean-Alphonse Robinet, grand ami de René Goblet, autre local de l'étape avait l'habitude de frayer avec Anne Brochet. C'est le plus grand homme à avoir vécu en Picarderie. Il mesurait 2,12m, sans les talonnettes. Avec, on culminait à 2,13m. C'est dire. Mais personne ne se souvient de ce grand homme. Ingratitude.
L'autre grand homme d'Amiens est François Damiens. D'ailleurs, il était tellement grand que posé sur une carte, quand il avait les pieds à Amiens, il avait la tête à Bruxelles. L'heureux homme est donc considéré comme belge, né en Gelbique, à Uccle. “Ho, hisse, uccléais”. Nous ne parlerons donc pas davantage de lui puisqu'il n'est pas vraiment amiénois.
Passons sur Michou, enfin, c'est une image.

Que faire après le spectacle ?

Rien, ou si peu. Ici, c'est Amiens.

Mais, il y avait un spectacle ?

La chronique mentionne l'existence d'un club de football, l'ASC, qui partage ses premières lettres avec les ascaris, superbe genre des nématodes qui vivent dans le gros intestin des mammifères. Ce qui donne tout de suite une explication à l'existence de Sébastien Cauet déjà mentionné supra, ce qui permet à cet importun de se glisser deux fois dans ce papier. C'est trop.
Comme si cela ne suffisait pas, l'ASC aura offert à la France cet ignoble moment de mièvre lamentable que fût la demi-finale de Coupe de France 2001 remportée aux tirs-aux-buts par l'équipe à l'époque emmenée par Denis Troch, la cousine d'Edwy Plenel, sur un ignoble club d'une région tout aussi incertaine que la Picardie entraînée par une starlette médiocre et heureusement fugitive avec bloc-notes pour copier Jacquet. C'est avec une horreur indicible que nous repensons à l'atroce tartine de sucre candy servie à la ménagère tueuse du football d'avant par Téléfoot sur fond musical sirupeux pour illustrer ce pathétique exercice de théâtre surjoué sur le banc du stade de la Licorne. Quelle angoisse.
Et c'est surtout pour ça, et accessoirement faire mentir les probabilités sinistres de nos chances de maintien qu'il faut l'emporter largement vendredi.

Co-écrit par le télépathique @zottel, le sympathique @jpdarky et l'antipathique @meem