Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Dans le rétro : avril 1988

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Souvenir/anecdote
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Par kitl
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Kasperczak a encore le sourire

A l’instar de huit prétendants à l’Elysée, le Racing de Kasperczak bat la campagne. La première division est dans tous les esprits, mais gare à la campagne de second tour…

Nous avions quitté de valeureux Racingmen à l’issue du match aller de Coupe de France contre le Montpellier Paillade Sporting Club, conclu sur le score d’1 à 1. Expulsé en cours de match pour un coup de tête parfaitement gratuit, le fantasque Abdallah Liegeon se voit sanctionné en interne pour ce geste contraire aux valeurs du club. Jean-Pierre Dogliani ne transige pas avec l’image du RCS retapé de fond en comble depuis dix-huit mois.

En attendant le retour à la Mosson, le Racing dispute un match piégeux à Saint-Dizier, sans-grade de la division qui avait toutefois arraché le nul à la Meinau. Henryk Kasperczak relance Andrieux, enfin débarrassé de ses pépins, au relais de Liegeon, mais c’est d’un autre élément longtemps blessé que surgit la lumière. Cyriaque Didaux ouvre le score sur penalty, avant de doubler la mise depuis l’entrée des seize mètres, excentré, en reprenant son corner mal renvoyé par les Bragards. Le RCS s’est imposé à chaque fois que le gaucher moustachu a fait trembler les filets. Le leader s’offre surtout la bonne opération du soir en prenant cinq points d’avance sur Caen, défait à la surprise générale à Melun. A sept journées de la fin, l’officialisation de la montée devrait être acquise à la fin du mois, à la manière de l’impressionnant FC Sochaux-Montbéliard dans l’autre groupe.

Strasbourg s’envole l’esprit léger vers Montpellier afin de se qualifier pour les huitièmes de finale de Coupe de France ou, à défaut, de s’étalonner face à un pensionnaire de l’élite. Pour les Alsaciens, c’est la douche froide : 3-0 à la 18ème minute, Roger Milla ayant profité d’un service de Lemoult, avant que Flucklinger ne repousse deux frappes dans les pieds de Guédé puis de Thierry Laurey. Le match s’emballe lorsque Vincent Sattler fait admirer ses qualités athlétiques sur corner, imité cinq minutes plus tard par Reichert. 3-2 à la 27ème ! Le score ne bougera plus mais on préférera retenir le positif de cette double confrontation face au septième de D1.

S’il est tombé avec les honneurs dans l’Hérault, le Racing manque totalement sa partie devant Guingamp (1-2). C’est la première défaite à la Meinau pour Juan Ernesto Simon, première recrue de l’ère Hechter un an et demi auparavant. Ouverture du score signée Robby Langers (tiens, tiens) puis coup de massue d’Assadourian, que tout le monde a vu hors-jeu, à la 89ème. Les DNA se fendront le lendemain d’un rectificatif, ce but était parfaitement valable. Au-delà des palabres autour de l’arbitrage, ce revers fait office de rappel à l’ordre pour une équipe à qui il ne manque que quelques points pour valider son ticket. Le calendrier dégagé devrait l’y aider, alors que ce match contre En Avant était le quatrième en douze jours.

Une toute nouvelle carte d’identité informatisée voit le jour, à quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle dont tous les protagonistes sont à présent connus. Seul candidat obscur à avoir obtenu les « 500 signatures », obscur en dehors des sphères trotskistes s’entend, Pierre Boussel alias Lambert se prépare à mener bataille en ayant bénéficié, selon son propre décompte de 45 secondes de temps de parole depuis le mois de novembre.

La dernière ligne droite est animée, dans le droit fil de cette campagne hystérique, vécue à l’instar de toute la législature comme un match retour de 1981. Les vaincus d’alors ruminent leur revanche, le tenant du titre louvoie telle une anguille mais la configuration de 1988 n’est pas la même : lequel de Chirac ou de Mitterrand est le véritable « sortant » ? Quelle est la vocation de la candidature Barre ? Et surtout, quel sera le poids électoral d’un ancien parachutiste à la mèche jaune canari, encore inexistant cinq ans auparavant mais qui semble phagocyter tout le débat ?

Retour à la D2. Un déplacement périlleux attend le RCS à Robert-Diochon, enceinte considérée parmi les plus chaudes de la division. La jet-set a descendu la Seine : on aperçoit, outre les récidivistes Stéphane Collaro, Eddie Barclay et Paulo Cesar, le pilote automobile Gérard Larrousse et « le chanteur-footballeur Patrice (sic) Bruel ». Léonard Specht retrouve ce poste new look de numéro 6, témoignant des progrès constants du jeune Sattler. L’autre taulier défensif, Juan Simon, ouvre le score de la tête avant que la défense tout entière ne pare au plus pressé durant de longues minutes.
Sur une énième offensive rouennaise, Robert Barraja sauve un but de la main, à l’insu dans un premier temps de l’homme en noir, M. Lartigot. Confusion, hésitation, consultation. L’arbitre va voir son juge de touche, qui n’a rien manqué de l’action – ce qui constitue selon les canons de l’époque une « faute d’arbitrage ». Penalty transformé par le goleador normand Martet.

Après Guingamp, cela fait deux décisions litigieuses en défaveur du Racing, dont les dirigeants ont quelque difficulté à dissimuler leur tension. Le mardi suivant, Jean-Pierre Meyer préfère sourire de ce penalty en rappelant que Diochon avait servi de cadre au tournage du chef d’œuvre A mort l’arbitre, avec Eddy Mitchell et Michel Serrault.

Une trêve de quinze jours s’ouvre, le temps de laisser Patrice Garande étrenner le maillot bleu en Irlande du Nord. Il faut bien meubler cette quinzaine alors que tout le monde est sur les dents, tant les sportifs que les accros à la politique. Quatre matchs restent à disputer, la montée n’est pas encore validée mais les Dernières Nouvelles d’Alsace obtiennent bon nombre de scoops sur les transferts.
Ont déjà été conclues les arrivées de Patrice Ferri (convoité depuis plus d’un an), de la révélation dunkerquoise Jean-François Péron, ainsi que d’un futur gardien bis, Pascal Janin. Au rayon des partants, le Racing entend dégraisser au maximum, essentiellement parmi les remplaçants : Schaer, Niesser, Gousset (aucun match cette saison), les gardiens Schuth (borduré au SCO) et Aubry ne seront pas renouvelés. Barraja, seul titulaire concerné, s’est déjà mis d’accord avec Quimper.
Les deux joueurs étrangers auraient été approchés par d’autres clubs : pour Reichert, on apprendra par la suite qu’il s’agissait de Francfort. La situation de Simon semble plus ambiguë. Le libero semble ouvrir la porte à un retour au pays. Le River Plate de Menotti l’aurait contacté, pour l’associer à Daniel Passarella. « Je ne sais pas encore si je m’en irai. Ce dont je suis sûr par contre, c’est que tous les efforts restent tendus vers un seul but. Emmener Strasbourg vers la première division ». Telle est la situation au 28 avril.

Evoquées début mars, les pistes Philippe Vercruysse et Bruno Bellone sont toujours dans l’air. Plusieurs paramètres entrent en considération dans le recrutement : les clubs fonctionnent à effectif constant ; il y a toujours une limitation à deux joueurs étrangers – certains dirigeants influents militent pour un étranger supplémentaire – qui sont généralement les plus gros salaires du club ; et surtout, les salaires et indemnités de transfert connaissent une énorme inflation, depuis le tournant foot business de 1985-86.
L’équation à résoudre est donc délicate : il s’agit de renforcer une équipe compétitive mais sans génie, à qui il manquerait de l’avis général un « joueur créateur » pour bien figurer. On sent bien que la philosophie d’Hechter et Dogliani consiste à rehausser le niveau moyen de l’équipe, de manière à ce que les titulaires actuels – les Didaux, Christen, Lemonnier… – soient de bons remplaçants en D1.
Plongé dans cette partie de billard à trois bandes, le Racing se renseigne tous azimuts. La piste du Hollandais John Van’t Schip aurait été écartée pour d’évidentes raisons financières, ce qui n’aurait pas empêché Daniel Hechter d’engager des discussions avec le meilleur joueur européen du moment, Ruud Gullit… Le Hongrois Detari, qui évolue à Francfort, figure également sur les tablettes.
Bref, il y a là-dedans à boire et à manger, mais friande de ces indiscrétions, la presse locale relaye abondamment les rumeurs, même les plus improbables.

Pierre Desproges disparaît le 18, la dépêche AFP annonçant son décès s’achève par la célèbre mention « Etonnant, non ? ». Il est temps de commenter les résultats du premier tour de la présidentielle, alors que se déroulent des événements tragiques aux antipodes, sur l’île d’Ouvéa : 3 gendarmes sont tués et 27 retenus en otages par les indépendantistes kanaks.
François Mitterrand est largement en tête en Alsace, devant Le Pen, Barre et Chirac. Waechter frôle les 10%. Gros coup de semonce pour la « majorité alsacienne », qui bâtit à la hâte un comité de soutien commun RPR-UDF, à la manière de la conférence de presse commune Chirac-Barre dès le lendemain du premier tour.
Les DNA publient un large verbatim du débat d’entre-deux-tours du 28 avril. Les deux impétrants sont annoncés à Strasbourg le weekend du 1er mai, le Président de la République sera au Wacken et le Premier ministre dans un chapiteau installé sur un parking du stade de la Meinau.

Auront-ils davantage de supporters que le Racing, qui dispute un match décisif le 30 contre les Vendéens de Bourg-sous-la-Roche ?

Article réalisé à partir des archives des Dernières Nouvelles d'Alsace, consultables à la médiathèque André Malraux ou au Musée historique de Haguenau.

kitl

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