Saison 2023/2024
Racing Club de Strasbourg

Entretien inclusif avec l'Actionnaire

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Aiguillonnée par une vive jalousie envers les autres sites mieux servis de la racingosphère, la Rédaction, elle aussi, a voulu avoir une belle interview qui ne se met pas les doigts dans le nez. C'est chose faite.

(NDLR : cet article fait partie d'une série d'articles au ton décalé et résolument second degré. A lire avec précaution et humour !)

Enfin ! Après des efforts inhumains, qui ont parfois pu menacer l'intégrité physique de plusieurs membres du Stub et en mener certains au bord de la prostitution, nous avons pu obtenir une interview de cet Actionnaire si décrié.

Comme l'homme préfère garder l'anonymat, pour des raisons évidentes que nous ignorons toujours, nous ne citerons qu'une seule de ses fausses identités ; c'est lui qui animait le personnage de Casimir dans cette émission de notre enfance (N.B. ça n'était donc pas Fantômas).

Mais ça n'était rien, nous n'étions pas au bout de nos surprises... Car ce garçon est étonnamment bon et courtois. Nous sommes conquis. Nous pensons aujourd'hui qu'une nouvelle ère de paix et d'amour pourrait s'ouvrir. Sois ouvert, ami supporter, laisse s'éveiller ta conscience. Joie, bonheur, rassemblement, collaboration.

Nous vous livrons notre meilleure traduction du propos original, qui était entièrement codé en texto.


Les derniers résultats du club en championnat sont légèrement moins bien qu'excellents : êtes-vous toujours enthousiaste ou un peu étonné ?


Allons, allons. Tout de suite de grands mots.

Ca me rappelle mes enfants. Il faut savoir que j'ai des enfants. Je comprends l'enfance, j'ai moi-même une formation d'enfant, même si ce n'est que tout récemment que j'ai investi dans la procréation. Ils ont un regard si doux ! Certains ont des réactions presque surnaturelles, et pour des choses qui nous paraîtraient dérisoires, un objet en plastique, leur génitrice...

Je prédis parfois même les fluctuations du Dow Jones d'après les rots de mon petit dernier, celui qui écrit les communiqués du site officiel ! C'est une méthode plutôt robuste, même si on peut déplorer un bruit statistique assez conséquent (rires)

Je prépare d'ailleurs un livre sur le sujet, « La théorie du chaos à l'épreuve du reflux oesophagien », je le signale ici, même s'il ne sera compris que de l'élite de la City, dont moi-même.

En tout cas, je peux garantir que ça bosse dur. Pour le reste, je pense pouvoir affirmer que l'on verra bien.


C'est absolument incroyable. Je crois que le peuple d'Alsace cherche un peu son Papa depuis bien longtemps, et n'est pas loin de l'avoir trouvé... Savez-vous que vous êtes beau ? L'objectif reste-t-il la montée ?


Bien sûr, il reste plusieurs mois, des matches et puis nous pouvons encore faire quelques belles affaires.

L'équipe est impressionnante, construite autour d'un noyau dur de vieux briscards blanchis sous le harnois, et de jeunes ludions fantasques comme Steven Pichaud par exemple. La totalité des joueurs sont bipèdes, et ils savent tous faire une croix sur un contrat. A ce sujet, je pense que nous pouvons saluer au passage l'excellent travail de nos recruteurs, qui travaillent d'arrache-pied – « à la Eric Di Méco », pour parler comme cet entraîneur-adjoint que j'ai viré depuis. Je ne comprenais rien à ce qu'il racontait, mais je l'aimais bien (soupir).

Nous sommes aujourd'hui une vraie équipe de bourreaux de travail. Certains de mes associés se privent parfois de croissants à 10h00 ! Je peux vous dire que nous sommes connus comme de redoutables négociateurs (rires) ! Et les gogos, enfin « les efforts » comme vous dites, payent toujours.


De nombreuses rumeurs parlent de vous ; les plus improbables vous annoncent désireux de vendre le club. Qu'en est-il ? Allez, non, pas ça !


Nous ne sommes pas vendeurs. Ou alors en liquide, mais bon... Non, mais rangez ça, « chèque restaurant », ne me prenez pas par les sentiments.

Je ne vois qu'une seule explication à ce genre de rumeur ; la jalousie, encore la jalousie, toujours la jalousie. Mais c'est légitime, et je le pardonne. Vous ai-je dit que je savais pardonner ? Car j'ai découvert la plénitude du pardon dans ce temple de l'Himalaya que j'avais acheté. Eh bien, je peux vous dire que ce n'est pas de la petite bière... Allez c'est pas grave, en plus je m'en fiche. Ca ne me fait rien. Que dalle. Rien, rien, rien, rien, rien, rien, rien. Rien. Rien, rien. Je suis serein.


Il y avait bien ce bougre, Sommerlé, qui était prêt à venir vous aider en investissant dans le club. Pourquoi cela a-t-il échoué ?


Vous savez, Siegerlé est un commerçant, et ces marchands de tapis ne proposent jamais rien par bonté de coeur. Hélas ! Il y a fort longtemps que les chantres du mauvais goût, de la cupidité et du désordre ont pris le dessus sans vergogne. J'ai expliqué cela l'autre jour à mes enfants, qui croyaient naïvement avoir gagné un séjour aux Seychelles en ouvrant un courrier du catalogue des deux Belges. Allons, soyons un peu sérieux !


On parle également de dépôt de bilan : les supporters ont-ils tort ou raison de s'inquiéter ?


C'est assez fastidieux à expliquer, et de toute façon vous ne comprendriez pas. Il faut savoir que le taux indexatoire du retour sur la marge nous interdit toute prévision de la décote de notre participation dans les actifs. Quant à l'investissement, je n'en parle même pas (rires) ! C'est que ça coûte du blé vos salades.

Sérieusement, certaines factures n'en sont qu'aux rappels, alors on a le temps, largement. Tout sera fait en temps et en heure, je peux vous le garantir sur la tête de ce Mars que j'aperçois dépasser de votre blouson. Allez posez-le, soyez adulte un petit peu.


Vous avez rencontrés les supporters mais ça ne s'est pas bien passé. Que vous ont-ils fait encore, les rosses ?


(rires) Allons, allons. Quel feu, quelle énergie !

La plupart des supporters ont des réactions d'enfants, excepté ceux dont l'âge interdit toute confusion. Les vieux restent bien sûr mes favoris, surtout les sourds. On rit comme des fous.

Pour les autres, oui, j'en ai vu, figurez vous. Ce sont de grands gaillards, pleins de sève, ils sont épatants. J'ai dû m'employer à les calmer : « Messieurs, veillez à ne pas me contrarier une fois encore, sinon vos épaules souffreteuses recueilleront les brûlures de mon fouet ».

Tiens ! Le grand nerveux là, vous devez le connaître, Grégoire, ou Gaston ; eh ben, je l'aime bien. Je songe à lui pour un poste de profiler de tribunes, ou stadier, ou directeur sportif, enfin bref quelque chose. Parce que vous savez quoi ? Il m'a fait de la peine. J'ai été sincèrement ému par la tristesse profonde qui émanait de ce pauvre hère. C'est dur aujourd'hui d'être supporter du Sporting Surbourg, j'en suis le premier conscient vous savez ! Je l'ai trouvé très confus, dans un état proche de l'aliénation mentale. Un peu fluet aussi, la dénutrition sans doute. Il devrait faire du golf ! Je dis ça, il me revient que des amis alsaciens m'ont parlé de la crise, je comprends tout ça beaucoup mieux qu'on ne l'imagine... Revenons à Gontrand ; sachez que je connais d'excellents praticiens à Londres et en Tchétchénie, et je songe à leur parler de lui. Car nous aurons besoin de rassembler toutes les forces pour ramener le club en D3. C'est là mon projet, ma seule ambition, et tous ensemble nous y travaillons jour et nuit, parfois même le matin.


Les journalistes aigris de la presse départementale ne vous ont pas épargné. Ces vilains vous trainent dans la boue depuis des mois et des mois. J'imagine que vous souffrez le martyr ?


Point du tout. Vous savez, je les comprends eux aussi. Pour ces pauvres scribouillards paysans, L'Olympique de Phalsbourg représente bien plus qu'un moyen de tromper l'ennui, ils le considèrent même comme leur gagne-pain les insolents. Et ils sont incroyablement susceptibles. Lorsque mon ami Albert est venu leur dispenser une leçon en chaire de théorie du chaos appliquée, ces chenapans n'ont rien trouvé de mieux à faire que de protester parce qu'on les avait fait attendre une heure dans le froid et l'ondée automnale. Mais est-ce de notre faute s'il fait toujours moche dans cette contrée inhospitalière ? Inutile de dire qu'ils n'ont rien compris aux diagrammes d'Alexis, ce qui fut source d'une très durable rancune. Nous faisons de notre mieux pour ne pas les humilier mais c'est difficile ; j'ai fait le compte dans des notes que je publierai un jour pour favoriser le retour à des moeurs plus saines : que d'approximations et de supputations de la part de ces gratte-papier, les bras m'en tombent !


Vous avez parlé de fermer le bar des supporters, pour trois matches : c'est pas un peu fumier ça quand même ? On va glander où nous maintenant, chef ?


Vous savez, je viens de la finance et je ne suis pas dupe. Tous les gens que nous fréquentons ne sont pas des saints ; nous savons comme le monde est dangereux. Vous auriez vu nos pertes il y a un an, je vous jure que ça vous aurait fendu le coeur.

Eh bien, je crois qu'il nous faut tous faire un effort pour qu'en quelque sorte, nous ne voyions plus jamais ça. Il faut arriver à ce que la violence sorte des stades, assez de morts, assez de massacres comme l'an dernier à Châtellerault. Il suffit, cessez.

Certains d'entre les supporters – pas tous, non ! – sont même manipulés politiquement. Si ! Votre fameux Gédéon, il m'a même affirmé, avec un aplomb qui m'a glacé le sang, être radical valoisien... ou ultra-philippard, enfin bref, un dur quoi. Eh bien moi je trouve ça grave. Je suis peut être un naïf mais j'irai jusqu'au bout, jusqu'à la destruction administrative au B-52 de la tribune C de la Ziegelau, s'il le faut.


Ah oui, c'est affreux. Parlons un peu de votre arrivée au club, beau gosse. Non parce qu'au début, au moins au début, c'était cool non ?


Au début c'était simple, enfin moyennant un certain niveau en ingénierie financière. Nous on avait du pognon, lui il en voulait... alors forcément, l'offre et la demande... je lui fais pouet-pouet, il me fait pouet-pouet, on se fait pouet-pouet, et puis ça y est.

Après ça a été l'horreur. On nous a traînés dans la boue, vilipendés, parlé allemand,... Les taxis étaient en retard, il pleuvait, j'ai marché dans un chewing-gum, la presse me demandait mon nom de famille « parce que ça fait bête sinon dans l'article ». La terre alsacienne exhale la haine, vous savez. J'ai senti immédiatement que les forces étaient contraires. Je licenciais, licenciais, mais l'ennemi revenait sans cesse en surnombre...

Certains exigeaient un salaire fixe tous les mois, vous imaginez ? Tout ça parce qu'on n'est pas n'importe qui, et puis « pourquoi un café sans sucre serait une faute grave », et « qu'est ce que j'écris sur le site off qui n'est pas à jour depuis une semaine »... Mais zut à la fin, voilà qui dénote l'absence de la plus élémentaire bienséance chez ces agioteurs, quand elle ne jette pas le trouble sur l'existence de leurs âmes.

Mais je suis quand même resté stoïque. C'est une attitude que je sais adopter depuis cette retraite spirituelle dans le désert de Gobi, à moins que ce ne soit ce séminaire « le management des perdreaux », enfin je demanderai à Totophe si j'y pense.

En tout cas, ce qui est sûr c'est que tout le monde est responsable. Enfin, je dis tout le monde... dans la mesure où nous payons aujourd'hui cinq siècles d'errements, que nous sommes les meilleurs et que nous travaillons comme des bêtes. Donc vous voyez, c'est plutôt positif en fait.


Vous avez été si généreux que nous nourrissons quelque crainte sur l'avenir du centre de réinsertion... heu... de formation, qui coûte cher et rapporte peu. Agirez-vous en grand humaniste, par exemple en envisageant une hausse du prix des billets pour maintenir à flot le centre ?


Écoutez, c'est précisément pour moi l'occasion de rappeler que Cadet Roussel Finance travaille depuis longtemps avec les pays en développement, et la preuve en est que nous avons choisi de racheter un club en Alsace, ce qui n'est tout de même pas un hasard. Nous avons décidé, André et moi, de chercher de nouveaux débouchés au Sri Lanka, qui est un pays immergeant, et qui a certainement besoin de nos conseils, puisque les conseils gagnants, c'est notre spécialité – faut-il vous le rappeler ?

Bien entendu, le Sri Lanka n'est pas pour l'instant un grand pays exportateur de footballeurs, mais il faut admettre que ce pays présente deux avantages : d'abord, faire venir les futures perles de ce pays coûtera moins cher au club, puisqu'il y aura moins de risque que les Cinghalais s'entassent tous dans les soutes à bagage comme le font les boat-people chinois, par exemple ; ensuite, cela rappellera à mon ami Anatole la période où il tentait de faire fortune en vendant des produits détergents contre la boue sur les bords du Gange. D'ailleurs, il a bouffé de la vache enragée, et ça ne leur a pas trop plu, aux Hindous (rires).

On aurait pu essayer les Brésiliens, une filière qui a toujours bien marché au Sporting, mais déjà qu'il y avait des incertitudes sur le sexe, mais si, en plus, il faut leur payer des voyages autrement qu'en low-coast, je dis : non, j'ai beau être un grand humaniste, plein de bonté et de magnanimitude, je suis là pour faire des économies !

Quoi qu'il en soit, si cela ne marche pas, alors il sera toujours temps de faire appel à mon ancien ami, Alfie Honegger, qui trouvera bien un moyen d'expédier les joueurs qui ne perceront pas au fin fond de la Russie, où il y a encore quelques cailloux à casser.


On vous voit trop peu en tribunes. Maintenant que nous sommes amis, vous allez venir plus souvent j'espère ?


Mais je suis déjà là ! Tapi dans l'ombre, j'oeuvre pour notre bien à tous. Pour ce qui est du stade, je ne consentirai à m'y afficher que quand cesseront toutes ces vulgarités. C'est horrible ce qu'il s'y passe, vous savez. Des amis bien informés m'ont raconté. On y voit des hommes à demi-nu hurler des borborygmes dans un dictaphone, ils se nourrissent de mets infâmes. Mon ami Adhémar a tenté de se procurer une portion de ce brouet dans l'une des misérables cahutes qui jouxtent la fange, je peux vous dire qu'il est reparti ventre à terre ! J'ai le nez délicat, un mauvais Graves m'enrhume, et je ne puis supporter l'idée que mon sens olfactif soit exposé à des fumets aussi immondes.

Mais laissons cela, je ne désespère pas de voir un jour la terre libérée des péquenots et semi-mongoliens qui l'habitent. Vous savez, c'est mon ami et client Jonathan Swift qui me confiait l'autre jour, alors que je le protégeais une fois encore de son manque d'expertise : « quand un vrai génie apparaît en ce bas monde, on le peut reconnaître à ce signe que les imbéciles sont tous ligués contre lui. »

Interview imaginaire rédigée par filipe, manwithnoname, strohteam et zottel, avec l'aide bien involontaire du Canard Enchaîné, de Pierre Desproges et de John Kennedy Toole.

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